MACKY SALL ASSUME SES CHOIX
Le président défend sa décision controversée de report. Malgré les tensions, le chef de l'Etat assure que la démocratie sénégalaise est intacte. Il exclut toute remise en cause du franc CFA et met en garde contre une renégociation des contrats pétroliers
Le président Macky Sall s'est entretenu le mardi 19 mars 2024 avec l'agence de presse Bloomberg et a défendu sa décision de reporter les élections législatives prévues initialement le 25 février dernier. Bien que cette décision ait plongé le pays dans la tourmente, il a assuré que la démocratie et les institutions sénégalaises demeurent intactes.
"Il est vrai que nous avons connu un mauvais début d'un mois environ", a-t-il déclaré depuis la capitale Dakar. "C'était une expérience difficile, mais qui nous renforcera malgré les incertitudes". Jusqu'au report du scrutin, invoqué en raison de questions entourant la validation des candidatures par le Conseil constitutionnel, le Sénégal était largement considéré comme l'un des derniers bastions de la démocratie dans une région secouée par une série de coups d'État ces dernières années.
La décision a cependant été condamnée par les critiques du président, qui y ont vu une "coupure constitutionnelle". Macky Sall a expliqué que le report et l'amnistie ultérieure accordée aux leaders de l'opposition et à d'autres impliqués dans la violence politique étaient nécessaires pour réconcilier une nation divisée, et que la normalité reviendrait après le vote du 24 mars prochain. "Je voulais vraiment léguer un pays réconcilié, un pays en paix, qui poursuit sa trajectoire de stabilité", a-t-il ajouté.
Lors de ce scrutin, les millions d'électeurs devront choisir entre l'ex-Premier ministre Amadou Ba, soutenu par le président sortant, et le candidat de l'opposition Bassirou Diomaye Faye, emprisonné avec d'autres détracteurs du gouvernement avant l'élection. Faye a depuis bénéficié de l'amnistie accordée début mars dans le but d'apaiser les tensions, tout comme le chef de file de l'opposition Ousmane Sonko. Aucun candidat ne devrait l'emporter dès le premier tour, selon les analystes, qui anticipent un second tour après la fin officielle du mandat de Macky Sall le 2 avril.
Emmanuel Kwapong, économiste à Standard Chartered Bank, a indiqué à Bloomberg qu'une victoire d'Amadou Ba assurerait une continuité des politiques et rassurerait les investisseurs, tandis qu'un succès de Bassirou Diomaye Faye pourrait avoir des implications significatives pour l'économie régionale et les plans du Sénégal de commencer à produire du gaz et du pétrole d'ici le troisième trimestre de cette année.
Macky Sall a par ailleurs assuré à l'agence de presse que "je ne pense pas qu'il soit vraiment approprié de parler de quitter le CFA. Les contrats pétroliers et gaziers peuvent toujours être améliorés, mais franchement, penser que nous pouvons changer les contrats déjà signés avec les compagnies serait impossible. Ce serait un tournant désastreux pour le Sénégal."