ROBERT BOURGI ET LES TRANSPORTS DE FONDS DE L’AFRIQUE VERS LA FRANCE
Figure controversée de la Françafrique, il publie ses mémoires et fait des confidences explosives, revenant sur son parcours d'homme de l'ombre ayant exercé une influence de haute volée sur les relations politiques franco-africaines
Beaucoup prient tous les jours pour qu’il n’ouvre pas la bouche. Parce que Robert Bourgi est une bibliothèque de secrets. Notamment entre hommes politiques français et africains au point que certains l’on surnommé «fils de Jacques Foccart». «Ils savent que je sais tout : Ma vie en Françafrique», son livre-mémoire va paraitre aux éditions Max Milo.
Un condensé d’entretiens avec le journaliste Frédéric Lejeal entre souvenirs, archives et notes personnelles. «Mémoires d’une existence passée à déambuler dans les arcanes franco-africains», dit-il dans l’Avant-propos. L’influent lobbyiste y évoque ses rapports avec «de très hauts dignitaires ou l’organisation de transports de fonds de l’Afrique vers la France». Mais lui qui admet avoir profité du «système françafricain» a décidé de dénoncer ses «turpitudes» et «dérives». Comme il avait commencé à le faire depuis son entretien avec Le Journal du dimanche en 2011. Il partage avec E-Media l’Avant-propos de son ouvrage. C’est déjà beaucoup de propos.
A l’automne de ma vie, au terme d’une carrière m’ayant amené à servir des personnages en tous points exceptionnels et à en côtoyer beaucoup d’autres insipides, j’ai décidé de rassembler mes souvenirs, de nombreuses archives et notes personnelles dans cet ouvrage. Mémoires d’une existence passée à déambuler dans les arcanes franco-africains. Pour les avoir longtemps accueillis dans l’atmosphère rincée à l’encens de mon cabinet, avenue Pierre 1 de Serbie, journalistes et médias connaissent ma prodigalité en confidences et en informations de première main. Qu’elles se déroulèrent en France, en Afrique ou au Moyen-Orient, mes missions, tout comme mon rôle pour ma famille politique ou auprès des chefs d’Etat africains, étaient sues de tous et commentées avec régularité au gré de l’actualité de la Françafrique ou de la politique hexagonale.
«C’est pourtant ma stricte vérité, la seule qui compte»
Pour la première fois, j’ai cependant décidé d’aller beaucoup plus loin en convoquant toute ma vie sans exclusive, de mon enfance auprès de mes parents et de mon si fascinant père Mahmoud jusqu’à mes actions d’influent lobbyiste, en passant par mes rapports avec de très hauts dignitaires ou l’organisation de transports de fonds de l’Afrique vers la France. - Extorqués» pendant cinquante heures d’entretien avec finesse et intelligence par le journaliste Frédéric Lejeal, africaniste pointu et ancien rédacteur en chef de La Lettre du Continent, ces aveux dressent le tableau de ce qu’il m’a été donné de faire, d’entendre, de voir. Avec force détails, anecdotes et révélations, il restitue des scènes qui, par leur aspect détonant, voire ébouriffant, pourront laisser le lecteur totalement pantois. C’est pourtant ma stricte vérité, la seule qui compte.
«Les contempteurs continueront de s’employer à me discréditer»
Malgré ces témoignages et documents inédits, les contempteurs me qualifiant de «sulfureux», «d’intrigant», de «messager occulte» continueront, à n’en pas douter, de s’employer à me discréditer, ainsi qu’ils le font depuis tant d’années, en butant constamment sur les durs pépins de ma réalité. Pour stopper net leurs investigations, il leur suffit pourtant de revisionner le débat que Mediapart avait organisé, le 28 janvier 2023, entre moi et Eva Joly, juge ayant instruit l’affaire Elf, pour comprendre que le nom de Robert Bourgi reste à la source de tous les fantasmes, d’une image écornée, d’une légende falsifiée montée de toutes pièces par la rumeur, la méconnaissance, voire la calomnie.
«Des missions sensibles pour lesquelles la diplomatie officielle montrait ses limites»
Mon nom n’apparaît, en effet, à aucun moment dans cette retentissante affaire, pas plus qu’il ne ressort des multiples scandales de la relation franco-africaine, de l’Angolagate aux Biens mal acquis (BMA). Quelles furent réellement mes missions ? Du convoyage de fonds, principalement à une période où il était autorisé, des «services», de l’influence de haute intensité, des mises en relation stratégiques, des missions éminemment sensibles pour lesquelles la diplomatie officielle montrait ses limites. La libération, en 2010, de la jeune Française Clotilde Reiss, emprisonnée dans les geôles iraniennes, en est une illustration parmi beaucoup d’autres. Elle fut d’ailleurs, pour moi, un grand motif de fierté.
«Je ne conteste pas avoir largement profité du système françafricain»
Ces Mémoires me servent-ils pour autant de paravent aux critiques sur mes conduites, mon éthique, mes fréquentations ou mes choix de vie parfaitement assumés ? Évidemment, non. Décrié, le système françafricain, je ne conteste pas en avoir largement profité et l’avoir servi ad nauseum jusqu’à en dénoncer les turpitudes, les dérives et les travers, en 2011, dans le Journal du dimanche. En apportant au lecteur un regard sincère et plus encore lucide sur ce pan entier de la diplomatie et de la vie politique françaises, cet ouvrage n’est que la continuité logique de cette interview.