PAPE ALÉ NIANG LÈVE LE VOILE SUR LES DÉFIS FINANCIERS ET LES AMBITIONS DE LA RTS
Invité de l’émission matinale Salam Sénégal, le directeur général de la Radiodiffusion-Télévision du Sénégal a abordé les tensions autour des contrats d’entreprises, le soutien de l’État, et l’importance de l’indépendance médiatique.
Le directeur général de la Radiodiffusion-Télévision du Sénégal (RTS) était l’invité de la matinale Salam Sénégal de la radio nationale. Il a abordé de nombreuses questions notamment les audits réalisés au sein de la boîte, les conventions d’accord avec les syndicats, ainsi que sa relation avec le Président de la République et le Premier ministre.
Abordant tout d’abord la couverture des élections législatives, Pape Alé Niang précise que, grâce à l’accompagnement de l’État, la RTS couvre les 41 listes de candidats et produire des journaux de campagne sous la supervision du Conseil National de Régulation de l’Audiovisuel (CNRA), garantissant ainsi une couverture équitable et équilibrée de toutes les listes en lice.
Après six mois à la tête de l’audiovisuel public, Pape révèle que « nous sommes dans un gouffre financier, du moins selon les révélations faites par un cabinet d’experts durant deux mois ». Il ajoute : « La RTS croule sous des dettes. J’avais l’habitude d’interpeller le directeur administratif et financier pour lui dire que j’avais l’impression que nous ne payions pas nos fournisseurs, car chaque jour, sur ma table, tombent des factures salées. » La RTS traverse de grandes difficultés sur le plan financier, mais « nous nous battons », poursuit le directeur.
Il révèle également que « l’Inspection Générale d’Etat viendra faire son travail, car le Président de la République l’a demandé ». Pour illustrer ses propos sur ce gouffre financier, il cite l’exemple de la tour de la RTS. « Prenez notre tour, inaugurée en grande pompe avec des discours dithyrambiques pour le Président Macky Sall ; cette tour a déjà englouti 33 milliards et n’est pas opérationnelle. » Selon l’opinion de nombreux Sénégalais, la RTS se retrouve dans cette tour, qui est actuellement un bâtiment vide. De plus, la société demande un avenant de 10 milliards pour la terminer.
Pape Alé assure que « tout ce dossier est sur la table du Premier ministre et de l’État afin qu’ils puissent faire le nécessaire. Car, en tant que journalistes, ce que nous recherchons vraiment, c’est d’être dans le confort, et nous voulons que cette tour soit terminée pour faire convenablement notre travail ». C’est pourquoi il appelle tous les travailleurs et agents de la RTS à « être un bloc soudé ». « Je ne considère pas un agent comme membre d’un syndicat, mais comme un agent de la RTS. Nous devons être fiers de travailler pour l’entreprise afin de réhabiliter la dignité du journaliste. Vous, de la radio, vous n’avez pas tant de problèmes puisque vous recevez tout le monde, mais c’est sous mon mandat que la télévision reçoit des figures de l’opposition, et cela continuera car rien ne l’interdit. » Il en profite pour « remercier les autorités de ce pays ; ni le Président, ni le ministre de tutelle, ni le Premier ministre ne m’ont interpellé sur le passage de qui que ce soit à la télé ». D’ailleurs, le Premier ministre « me dit souvent de me battre pour que la RTS soit la télévision de tous les Sénégalais et qu’elle puisse relever le défi de réconcilier le peuple sénégalais ».
Aucun contrat n’a été suspendu
Lors de cet entretien, Pape Alé est également revenu sur les accords de convention d’entreprises entre la RTS et les syndicats. Selon lui, « il y a amalgame, car aucun contrat n’a été suspendu. Il y a des CDD arrivés à terme qui n’ont pas été renouvelés, et cela ne doit pas être automatique ; cela dépend de l’appréciation ». Il se demande même : « Si le Président Macky voulait vraiment du bien pour la boîte, pourquoi signer un décret à quelques jours de la fin de son mandat ? » Il note également que l’ancien directeur a signé l’accord d’entreprise le 29 mars, décret qui, selon lui, « ne profite qu’aux directeurs ».
Nous avons des relations formidables et de vérité
Parlant de sa relation avec le duo Sonko-Diomaye, le directeur révèle que « beaucoup en parlent, mais notre relation remonte à 2005, lorsque j’étais à la radio Sud FM. Ousmane Sonko se battait à la direction générale des impôts et domaines pour y installer un syndicat. À l’époque, la douane luttait aussi pour avoir son syndicat, et lui (Sonko) a réussi le défi en tant que secrétaire général des impôts et domaines. Mame Boy Diao était le porte-parole. C’est de là que vient notre connaissance ». Donc, c’est bien avant la création de son parti, que j’étais parmi les rares journalistes à l’inviter. Je l’ai invité dans SamediMag (émission de la 2STV) après la création de la CREI, car il avait écrit un article montrant comment cette institution violait la présomption d’innocence. J’ai trouvé l’article pertinent et l’ai appelé pour qu’il puisse venir s’expliquer dans SamediMag. Depuis, nos relations sont restées les mêmes, même si toute la presse le boycottait, je continuais à l’inviter dans mes émissions. Pape ajoute que « beaucoup de gens font un mauvais procès à Sonko sans vraiment le connaître, car ils ne voient que son engagement sur le terrain politique, mais il a un cœur d’or ». Quant au Président Diomaye, il est aussi formidable que son Premier ministre, raconte Pape Alé. « Je l’ai interrogé pour la première fois dans l’émission Décryptage (émission de la 2STV), où nous avons parlé du code minier. Ce sont donc des relations particulières avec eux. »
Pour ceux qui s’attendaient à autre chose, Pape Alé « défie quiconque de prouver que je détiens une carte de membre de Pastef ». D’ailleurs, en tant que journaliste, « je ne suis jamais allé à une conférence de Pastef, ni jamais couvert leurs activités ». Par contre, « ce que je poste sur mes réseaux sociaux ne concerne que ma personne et non le directeur de la RTS », conclut-il.