DAKAR, CAPITALE DIVERGENCE
Être maire de Dakar, ce n’est pas seulement diriger une ville. C’est occuper une place stratégique dans le paysage politique sénégalais, entre influence locale et rayonnement national. Mais, Mamadou Diop, Pape Diop, Khalifa et Barth en ont fait les frais
La Ville de Dakar s’est toujours affirmée comme le cœur battant de la vie politique sénégalaise. Ses enjeux démographiques, ses figures politiques emblématiques et ses dynamiques sociales en font une plateforme stratégique pour toute ambition électorale. Son rôle dans l’échiquier politique ne peut aller que crescendo, confirmant ainsi son statut de poumon politique et électoral du pays. Etre le maire de Dakar, ce n’est pas seulement diriger une ville. C’est occuper une place stratégique dans le paysage politique sénégalais, entre une influence locale et un rayonnement national. International même. C’est également revêtir une importance politique unique, un mélange de pouvoir symbolique, économique et institutionnel. La fonction confère une visibilité exceptionnelle. Mais, Mamadou Diop, Pape Diop, Khalifa Sall et Barthélémy Dias en ont fait les frais.
Depuis l’indépendance du Sénégal en 1960, Dakar s’est imposée comme le pivot de la vie politique et électorale du pays. Capitale politique, économique et culturelle, cette mégapole incarne un enjeu stratégique pour les partis politiques et les candidats à la présidence. Avec ses 4 millions d’habitants, Dakar est bien plus qu’une capitale: c’est le thermomètre de l’opinion publique nationale. Lors des scrutins présidentiels et législatifs, cette densité électorale confère à la capitale un rôle décisif. Gagner Dakar représente un avantage psychologique et numérique crucial pour les candidats, car la ville donne imprime le reflet de dynamiques nationales, soulignant son poids stratégique.
Pendant 40 ans, le Parti socialiste a dominé Dakar, en ayant recours à partir de 1993 à des fraudes massives, selon l’opposition, pour ne pas perdre la mairie de la ville. L’année 1996 marque un tournant avec la nouvelle réforme de la décentralisation, qui renforçait les pouvoirs des collectivités locales. Ce changement a aiguisé les appétits politiques, transformant les élections municipales en un véritable bras de fer entre le Parti socialiste (PS), au pouvoir, et une opposition de plus en plus structurée. Dakar, en tant que capitale économique et politique, représentait un terrain hautement symbolique pour cette bataille.
Les élections locales de 1996 ont été l’un des scrutins les plus houleux de l’histoire électorale du pays. Spécialement dans la capitale sénégalaise. Dès le début du processus électoral, les tensions sont palpables. Plusieurs partis d’opposition dénoncent des irrégularités dans la distribution des cartes d’électeur et le recensement des votants.
Le scrutin, marqué par des irrégularités et de très fortes tensions. La contestation postélectorale, menée par l’opposition, Abdoulaye Wade en tête, et d’autres leaders, crient à la fraude massive et les observateurs nationaux et internationaux présents sur place constatent des manquements graves à l’organisation du scrutin. Les accusations de fraude se multiplient, visant directement le Parti socialiste et ses élus locaux, accusés de vouloir maintenir leur mainmise sur la capitale
Ils exigent l’annulation des résultats dans plusieurs communes et appellent à une mobilisation populaire. Face à l’ampleur de la crise, les autorités électorales se voient contraintes de réagir pour éviter un embrasement généralisé. Des résultats sont annulés dans certaines communes et les citoyens invités à revoter. Cette décision des autorités est perçue comme un aveu d’échec des autorités. Finalement, les résultats confirment la victoire du Parti socialiste dans plusieurs communes stratégiques, mais au prix d’un profond discrédit. Pour l’opposition, ces élections symbolisent un tournant, marquant leur progression dans la capitale et préfigurant la chute du PS en 2000.
Mamadou Diop, le parti socialiste et l’administration locale
La trajectoire politique de Mamadou Diop, maire de Dakar durant plus d’une décennie entre les années 1984 et 2002, reste à la fois remarquable et semée d’embûches. Arrivé à la tête de la capitale sénégalaise dans un contexte de transformations sociales et politiques majeures, il a dû composer avec une scène locale souvent agitée, marquée par des tensions entre les autorités centrales, membres du Parti socialiste et les attentes croissantes des populations.
Pendant près de deux décennies, la mairie de Dakar a été le théâtre d’une relation complexe entre Mamadou Diop et le Parti socialiste dont il est membre. En tant que maire, il a été un acteur central du pouvoir local, mais également un rouage essentiel dans la mécanique politique du PS, marquée par des alliances, des tensions internes et des jeux d’influence permanents.
Dès son arrivée à la mairie, Mamadou Diop s’est heurté à un système où la décentralisation est balbutiante. Si la Constitution sénégalaise prévoyait une autonomie relative pour les collectivités locales, dans les faits, le pouvoir central, le Parti socialiste donc, exerçait un contrôle étroit sur la gestion municipale, ce qui a souvent limité sa marge de manœuvre. Les rapports complexes entre la mairie et l’État ont été au cœur de nombreux blocages, notamment en matière d’urbanisme et de financement des projets structurants pour la ville.
Membre fidèle du Parti socialiste, Mamadou Diop a bénéficié du soutien à la fois politique et institutionnel du régime. Ce lien étroit lui a permis de s’imposer durablement à la tête de Dakar, une ville stratégique dans le dispositif électoral et économique du pays. Dakar était alors considérée comme une « vitrine politique », où le PS devait maintenir son ancrage face à une opposition croissante.
Cependant, cette relation n’était pas exempte de frictions. Au sein du Parti socialiste, les critiques à l’égard de Mamadou Diop ont émergé au fil des années. Certains barons du parti, aspirant eux aussi à des postes influents, voyaient en lui une figure parfois trop autonome. La centralisation du pouvoir au sein du PS, a souvent limité les initiatives locales et mis Mamadou Diop dans une posture délicate
Par ailleurs, la métropole dakaroise, en proie à une urbanisation incontrôlée et des revendications sociales pressantes, était un terrain fertile pour l’opposition. Les premières fissures apparaissent à la fin des années 1990, lorsque les contestations populaires s’intensifient. La pression des syndicats, des acteurs de la société civile et des électeurs frustrés à laquelle il faut ajouter celle de l’opposition, se fait de plus en plus grande, fragilisant l’assise politique du PS à Dakar et, par ricochet, celle de Mamadou Diop.
Sous la pression constante des populations, Mamadou Diop a dû faire face à l’accroissement des besoins en infrastructures. Dakar, qui s’imposait comme la métropole économique du pays, était étouffée par une urbanisation galopante et une explosion démographique. Les problèmes d’assainissement, de gestion des ordures et d’aménagement urbain se sont multipliés. de la mairie.
Et la tâche du maire était d’autant plus complexe qu’elle s’inscrivait dans un environnement politique national tendu. Dans les années 1990, alors que l’opposition gagnait du terrain face au Parti socialiste, au pouvoir depuis l’indépendance, Mamadou Diop est devenu la cible de critiques dont les plus virulentes, venaient de son parti. Si les opposants lui reprochaient son appartenance au système politique dominant et une gestion opaque et autoritaire, il est même arrivé que ses camarades de parti lui interdisent une campagne d’affichage en prévision de l’élection municipale de 1996!.
En parallèle, la crise économique qui frappait le pays à cette époque a laissé des traces profondes dans la gestion municipale. Les recettes fiscales étaient insuffisantes pour répondre aux ambitions de modernisation de la ville. Mamadou Diop a tenté d’y répondre par des partenariats public-privé, mais ces solutions n’ont pas toujours rencontré l’adhésion des populations, qui y voyaient une marchandisation des services essentiels.
Malgré ces difficultés, Mamadou Diop a laissé un héritage contrasté. Certaines de ses réalisations, comme la modernisation partielle de l’administration municipale sont reconnues.
Face à ces pressions, le maire, tout en restant loyal au PS, tentera de naviguer entre ses devoirs envers le parti et ses responsabilités vis-à-vis des habitants. Mais cette équation s’avéra difficile à résoudre, d’autant que le Parti socialiste s’essoufflait nationalement, laissant entrevoir une alternance. En 2000, avec l’arrivée d’Abdoulaye Wade au pouvoir et la chute du PS, Mamadou Diop, symbole de ce système en déclin, se retrouve isolé
Ainsi, la relation entre Mamadou Diop et le Parti socialiste illustre les dynamiques complexes de la politique pour diriger Dakar. Si elle a été longtemps bénéfique pour les deux parties, elle a fini par souffrir des tensions internes et des évolutions du paysage politique. Mamadou Diop, en tant que maire, restera une figure emblématique, mais aussi l’un des derniers représentants d’une époque où le PS dominait sans partage à Dakar, la scène politique sénégalaise.
Pape diop, une ascension politique sous l’ombre du pouvoir
Pape Diop, fidèle d’Abdoulaye Wade élu président de la République en 2000 , et cadre du Parti démocratique sénégalais (PDS), bénéficie du soutien direct du président pour accéder à la tête de la mairie en 2002. Cette victoire électorale survient dans un contexte où le pouvoir central cherche à renforcer son ancrage à Dakar, stratégique tant sur le plan économique que symbolique.
Rapidement, les critiques se font entendre. Certains observateurs et opposants accusent Pape Diop d’être moins un maire autonome qu’un « gardien de la place » pour le clan Wade. Les spéculations se concentrent particulièrement sur Karim Wade, alors conseiller spécial de son père et figure controversée. L’arrivée de Pape Diop est perçue par certains comme une manœuvre pour stabiliser Dakar en attendant que Karim Wade soit en mesure de briguer des fonctions électorales.
Les soupçons se nourrissent des interventions régulières du pouvoir central dans les affaires de la mairie. La relation de confiance entre Pape Diop et Abdoulaye Wade est à double tranchant. Si elle permet à la capitale de bénéficier de financements importants pour des projets majeurs, elle accentue aussi les critiques sur l’autonomie du maire. La gestion de projets comme la modernisation des infrastructures et l’aménagement urbain est souvent associée aux ambitions de Karim Wade, qui dirige parallèlement plusieurs programmes nationaux d’infrastructures, notamment ceux de l’Agence nationale de l’Organisation de la Conférence Islamique (ANOCI). Cette superposition de compétences alimente les soupçons d’une stratégie coordonnée pour asseoir l’influence du fils du président à Dakar.
Au fil des années, les interrogations se multiplient. Pape Diop est-il un simple exécutant des plans de la présidence ? Les tensions montent lorsque Karim Wade commence à jouer un rôle de plus en plus visible dans la gestion des affaires publiques. L’idée d’une succession dynastique, avec Karim Wade préparé pour prendre la tête de Dakar, devient un sujet central dans les discours de l’opposition. Certaines décisions prises par la mairie, sont interprétées comme des initiatives visant à créer un socle électoral pour Karim Wade. Pour l’opinion publique, la frontière entre les rôles de Pape Diop et de Karim Wade est floue.
C’est ainsi que son passage à la tête de la mairie de Dakar est marqué par cette ambivalence : un maire reconnu pour sa capacité à réaliser des chantiers d’envergure, mais aussi perçu comme un maillon d’une stratégie politique plus large orchestrée par Abdoulaye Wade, pour son fils. Les soupçons persistants jusqu’à sa défaite en 2009, ont contribué à alimenter les débats sur l’équilibre entre loyauté politique et gestion locale qui s’entremêlent, au point de brouiller les lignes.
2009 a vu l’opposition occuper l’Hotel de Ville. C’est cette situation qui prévaut encore aujourd’hui. Les manifestations contre la loi constitutionnelle en 2011, qui visait à instaurer un “ticket présidentiel” favorable à Abdoulaye Wade, ont trouvé leur épicentre dans les rues de Dakar. En 2021 et 2022, les manifestations de soutien à Ousmane Sonko, opposant radical à Macky Sall, sont parties de Dakar pour faire tâche d’huile dans le pays. Ces mobilisations populaires, largement relayées par la jeunesse, ont contribué à faire revoir leurs plans aux pouvoirs en place.
Khalifa Sall, Barthelemy T. Dias : sous l’étau politique et judiciaire
Si Mamadou Diop et Pape Diop ont vécu les plus fortes résistances dans leur parti respectif, le Ps et le Pds, le sort réservé à Khalifa Sall et à Barthélémy Dias illustre un problème plus large de la démocratie sénégalaise : la confusion entre justice et politique. Ces deux hommes sont devenus des symboles de la résilience face à des régimes perçus, par les opposants du régime de Abdoulaye Wade, de Macky Sall puis de ceux d’aujourd’hui, comme oppressifs. Leurs cas interrogent sur l’indépendance de la justice et la capacité des institutions à garantir un jeu politique équitable.
Khalifa Sall : une chute préméditée ?
Elu à la tête de la capitale en 2009 sous le régime de Me Abdoulaye Wade et du PDS et alliés, il a été réélu en 2014, quand Macky Sall était président de la République depuis deux ans déjà. Sa popularité, il l’a bâtie sur son pragmatisme et sa proximité avec les Dakarois, en initiant des projets innovants, s’appuyant sur des pouvoirs que lui conféraient les transferts de compétences contenus dans l’Acte II et III de la Décentralisation.
En 2017, une accusation de détournements de deniers publics dans ce qui a été appelé « l’affaire de la Caisse d’avance de la mairie de Dakar », le plonge dans un tourbillon judiciaire qui l’a conduit en prison. L’affaire repose sur l’utilisation de fonds de la mairie estimés à 1,8 milliard de francs CFa. Les enquêtes menées par l’Inspection générale d’Etat ont conclu à un détournement, mais ses partisans réclament une lecture plus nuancée des faits, invoquant des pratiques administratives courantes et un manque de preuves tangibles. Condamné à 5 ans de prison, le verdict a été interprété comme étant une manœuvre politique, visant à écarter un adversaire politique potentiel de Macky Sall, président de la République. Pour rappel, lors de la campagne présidentielle de 2012, Macky Sall avait promis de raccourcir le mandat présidentiel, en le faisant passer de 7 à 5 ans. Mais le Conseil constitutionnel en avait décidé autrement.
Son immunité parlementaire levée en pleine procédure judiciaire et sa radiation de la mairie de Dakar actée, sa mise au ban du Parti socialiste allié dans la coalition de Macky Sall, son inéligibilité déclarée ont suscité une vague d’indignation aussi bien sur le plan national qu’international. L’opposition et des organisations de la société civile dénoncent une instrumentalisation de la justice pour tuer dans l’œuf, toute velléité de concurrencer Macky Sall à la présidentielle de 2019.
Libéré en 2019 suite à une grâce présidentielle de Macky Sall réélu, Khalifa Sall reste inéligible. Il n’abandonne pas ses activités politiques, se posant comme un rassembleur et initiant des alliances conjoncturelles qui se sont défaites sur des coups de tête et d’égos hypertrophiés. Redevenu éligible, se présente sa candidature à la présidentielle de 2024, qui s’est soldée par un cuisant échec.
Barthélémy Dias, le combat permanent
Vendredi dernier dans la matinée, un arrêté rendu public, signé du préfet de Dakar, révoquait Barthélémy T. Dias l’une des figures les plus déterminantes mais aussi les plus controversées de la scène politique sénégalaise. Maire de Dakar depuis janvier 2022, il incarne cette nouvelle génération de leaders audacieux. Qu’ils soient au pouvoir ou pas. Retracer le chemin politique de Barthélémy Dias revient à explorer l’évolution d’un homme qui a su imposer son style direct et combatif dans un paysage politique souvent polarisé.
En devenant maire de la commune de Fann-Mermoz-SacréCœur, en 2009, Barthélémy Dias fait de cette station une tribune pour exprimer ses positions tranchées contre les injustices et les dysfonctionnements du système politique du pays dirigé à l’époque par Me Abdoulaye Wade.
Une polémique nait en 2011, lorsqu’un jeune homme, (nervi pour l’opposition, non membre du parti pour le Pds) est tué devant la mairie. Cet évènement a entrainé pendant 13 ans, des implications judiciaires, des polémiques politiques, une polarisation des opinions publiques. Les évolutions récentes se sont terminées par la perte de son mandat parlementaire suite aux législatives de novembre 2024 et par sa révocation de la mairie de la Ville de Dakar, le vendredi 13 décembre.
Les positions politiques suite à la mort de Ndiaga Diouf ont été prises selon le moment, selon les régimes. Quant à Barthélémy Dias, il a toujours crié avoir agi en légitime défense, face à une attaque orchestrée contre sa mairie de commune et son éventuel assassinat et a dénoncé l’utilisation de nervis pour intimider les opposants du régime
Le Parti Démocratique Sénégalais (PDS) a toujours nié son implication dans l’organisation de l’attaque et s’est défendu d’avoir parmi ses membres, Ndiaga Diouf, qu’il ne qualifie pas de nervi, mais une victime de violences politiques
Macky Sall, opposant à Wade en 2011, a implicitement soutenu Barthélémy Dias et dénoncé ce qu’il considérait comme une tentative de manipulation politique et judiciaire du régime de Abdoulaye Wade pour neutraliser un opposant très critique. Son parti, l’Alliance pour la République (APR) se montrait solidaire du maire de la commune de Fann-Point E – Amitié et a de temps en temps, pris prétexte cette affaire pour renforcer son discours contre le régime de Wade, qu’il accusait de créer un climat de tension et de répression visant à se maintenir au pouvoir par tous les moyens, en vue de l’élection présidentielle de 2012, s’inscrivant de ce fait dans une stratégie plus large de mobilisation contre le régime de l’époque
En 2012, Macky Sall est élu président de la République et l’APR et la coalition qui la soutient sont majoritaires à l’Assemblée nationale. Parmi les alliés, le Parti socialiste auquel appartient Barthélémy Dias. Le régime affirme que l’affaire relève de la justice. Dias poursuit ses activités et assure ses fonctions politiques. Des critiques se font entendre, interprétant cela comme étant une volonté de Macky Sall de ne pas fragiliser la coalition qui le soutient.
En 2017, Barthélémy Dias est condamné à deux ans de prison ferme pour « coups mortels », mais n’a pas été incarcéré immédiatement, pour raison de remises de peine. La peine a été confirmée en appel en 2022 et attestée définitive en décembre 2023 par la Cour Suprême qui a rejeté le pourvoi en cassation de Dias. Pour les partisans de Macky Sall, cette condamnation n’a fait que renforcer le fait que le régime observait strictement la séparation des pouvoirs.
Pour le nouveau pouvoir installé en avril 2024, cette condamnation définitive entraine la déchéance de Barthélémy Dias de son statut de député élu lors les élections législatives de novembre 2024. De son côté la famille de Ndiaga Diouf qui avait entrepris des démarches pour recouvrer les 25 millions de F CFa de dommages et intérêts que Dias devait payer, sous peine de contrainte par corps a été créditée de cette somme le 12 décembre, par la sœur de Barthélémy, en raison de l’insolvabilité de son frère.
Suite à la déchéance de son statut de député de la XVème législature, Barthélémy Dias s’est vu notifié, le 13 décembre, par le préfet de Dakar, sa « démission de [son] mandat de conseiller municipal, de la Ville de Dakar » . Cette décision du préfet a pour base, la lettre du « citoyen Beyna Guèye, datant du 10 décembre, fondée sur l’article 277 du Code électoral ». En réponse, Barthélemy Dias a marqué un refus de cette décision, tant que ses recours ne sont pas épuisés et a qualifié sa révocation de manœuvre politique. Pour l’heure, les débats juridiques, les arguments des sachants ou non, inondent les plateaux de télévision, les ondes des radios et les réseaux sociaux
Dans ce cas précis, la mort de Ndiaga Diouf a révélé des fractures profondes dans le paysage politique sénégalais, qui se pansent vaille que vaille selon les alliances (parfois contre-nature) ou mésalliances du moment et continue encore aujourd’hui à polariser les débats autour des questions de rivalités politiques qui se transforment en batailles juridiques.
Le budget : le champ de bataille
D’une centaine de millions de F CFa en 1984, le budget de la Ville de Dakar, avec un budget qui dépasse 60 milliards de F CFa, et représente un enjeu stratégique pour les hommes politiques. Or, la capitale est qualifiée de « bastion de l’opposition » depuis 2009, qui tient tête aux régimes en place. Ces fonds, alimentés par une combinaison de recettes fiscales, de taxes aux entreprises, de subventions de l’Etat et de partenaires internationaux, destinés à financer des infrastructures, des équipements sociaux, attisent convoitises et rivalités au sein de la classe politique. Surtout de celle des régimes au pouvoir avec toujours de forts soupçons de faire de la mairie de Dakar, un tremplin pour la présidence de la République, qui se trouve à un jet de pierre.
C’est la raison pour laquelle chaque élection municipale est une véritable bataille pour le contrôle de cette ressource stratégique. L’enjeu est clair. Maîtriser le budget de Dakar, c’est non seulement disposer de moyens financiers importants, mais aussi contrôler un levier d’influence politique considérable. Les enjeux de ce budget vont bien au-delà des simples chiffres : ils traduisent des luttes de pouvoir et des visions concurrentes pour l’avenir de la capitale. Cette lutte pour le contrôle de la mairie est d’autant plus intense que Dakar « est dans l’opposition » dans un paysage politique national dominé par le parti au pouvoir. Les deux derniers maires de la Ville, Khalifa Sall et Barthélémy Dias en sont des exemples emblématiques. Sous leurs gestions respectives, Dakar a été au centre de nombreuses initiatives de développement, mais aussi de controverses politiques, notamment avec son incarcération et sa radiation suite à des accusations de mauvaise gestion, pour le premier nommé et celle de Barthélémy Dias, suite à l’ « affaire Ndiaga Diouf », sont perçues par beaucoup comme une tentative d’affaiblir des figures politiques montantes de l’opposition et des manœuvres pour écarter des adversaires potentiels. Ce type de confrontation illustre comment la mairie de Dakar est un champ de bataille politique au sens propre et chaque élection municipale, à Dakar, un véritable enjeu national.