QUAND LES DIEUX DESCENDENT SUR TERRE
C’est un weekend qu’on a aimé, malgré les dérives qui l’ont pollué. On reviendra sur les souillures. Le temps est plutôt de savourer ce qui fut un weekend de plaisirs délivrés à l’excès. Le Clasico Real-Barça suffisait à le rendre exceptionnel. Mais c’est comme si, pour ces moments occasionnels dans leur calendrier divin, qui les voit descendre parfois sur terre, les dieux qui veillent sur le foot ne se sont pas privés de cette nourriture terrestre qui pousse sur les pelouses les samedis et dimanches.
Le Jour du Seigneur finissant d’avant-hier, ce qui s’est passé au stade Santiago Bernabeu était digne d’un gueuleton céleste. De quoi offrir une indigestion aux dieux du foot descendus sur terre ce weekend, après les petits plaisirs qu’ils se sont offert ici ou là.
Il y a eu notamment cette opération portes ouvertes en Premier League, où ils se sont procuré quarante-deux occasions de s’envoyer en l’air.
Comme pour les inciter à revenir souvent, Wayne Rooney leur a cuisiné une petite merveille de rosbif anglais, qui est parti pour figurer au panthéon de l’année et peut-être des décennies à venir, jusqu’à ce que la science invente un nouveau football. Son tir venu de nulle part ne peut finir ailleurs que dans ce Hall of Fame des buts exceptionnels.
Autre plaisir pour fins palais, cette louche de bonheur servie par Yaya Touré. Un coup franc d’une fluidité digeste devant Fulham, qui le consacre parmi les maître queux de l’année.
En ce weekend exceptionnel, les gloutons ne savaient plus où s’en mettre. Il en fut ainsi chez Manchester City (5-0 devant Fulham), comme chez Chelsea où Arsenal a pris une de ces galettes (6-0) qui va le suivre dans toute son histoire. C’était le millième match d’Arsène Wenger avec les «Gunners», il s’est retrouvé avec une indigestion mémorable.
Simple et compréhensible. Quand les dieux ouvrent leur boîte à malices, ils ne savent pas toujours dans quel sens file le petit lapin. Et parmi cette divine cohorte, figurent parfois des farfelus. Des qui, ne sachant pas toujours dans quel sens pointer la baguette magique, multiplient les galettes. Surtout quand les fins spiritueux leur montent à la tête.
Venant de Jupiter, étant passé par Mars avant d’atterrir, les dieux de ce weekend exceptionnel, qu’ils ont voulu à leur grandeur, n’ont pas oublié les pauvres en chérissant les riches. Sur la petite «planète rouge» où l’on cherche encore de «petits hommes verts», ils ont ramassé une poudre magique pour Papiss Cissé.
Qu’importe si le demi-dieu envoyé à Newcastle a failli arriver en retard à Saint-James Park. ll lui a suffi d’être là pour les dernières secondes du match contre Crystal Palace pour offrir à Cissé ce but du mois de mars dont il a toujours gratifié l’Angleterre depuis son arrivée dans ce pays en janvier 2012 – si vous aviez lu l’article de Khalifa Guèye dans l’édition du jeudi 20 mars, vous comprendriez ; c’est une raison de plus pour ne pas rater Waa Sports.
Finalement, c’était beau de voir ce weekend nacré se terminer chez les «Galactiques» madrilènes, dans la beauté d’un écrin à la dimension de Bernabeu, sous les lumières d’un club intersidéral. Un hôte dont les visiteurs barcelonais, invités à un banquet royal, se promènent en de telles occasions avec l’énergie du Big Bang.
Pendant 90 minutes, on a flotté entre ciel et terre. Devant ce football à la dimension des dieux, immaculé, dépouillé des souillures terre-à-terre, trempé dans le miel et parfumé des odeurs du paradis, on a été de petits Terriens transportés dans les dimensions interstellaires du football. Les dieux du foot, eux, penchés sur ce spectacle, s’y retrouvaient à merveille.
Ce weekend mérite d’être couché sur Dvd et la cassette glissée dans les soutes de la prochaine fusée que la Nasa enverra dans l’espace pour explorer d’autres planètes. C’est le meilleur moyen de trouver, enfin, les extraterrestres et autres preuves de vie qu’on cherche partout depuis des siècles, sans jamais les trouver.
Peut-être s’agit-il simplement d’êtres et de matières invisibles, mais non inexistants. Et pour sûr que s’ils tombent sur ce sublime Dvd, on n’aura plus besoin de fouiller l’univers pour les trouver. Il suffira de les attendre à Bernabeu, au Camp Nou, à Old Trafford… Dans tous ces lieux où s’expriment à l’occasion ce que les hommes font parfois de mieux sur Terre et qui font oublier toutes les guerres et les injustices sociales : jouer au foot.
Dommage qu’il y ait eu ceci… et cela. C’est-à-dire ces petits hommes jaunes qui, naguère, étaient noirs. Des hommes qui ne sont ni Japonais ni Chinois et qui polluent parfois les plaisirs du weekend.
Dommage que les extraterrestres puissent découvrir que ce jeu divin souffre de ceux qu’on appelle «arbitres». Dans la belle symphonie de ce weekend, c’est de là que viennent les fausses notes. Les leurs bien sûr, mais aussi celles des autres. Et il y a de quoi reparler de tout cela demain. Car si un arbitre est nul, ce n’est pas une raison de rendre le football plus nul encore.