ULTIME BAROUD

Rien ne symbolise mieux le désarroi d’Abdoulaye Wade depuis l’arrestation de son fils Karim, le 15 avril 2013, que les coups de fil que l’ex-président de la République du Sénégal a passé à Pape Diop et demandé à Babacar Gaye d’en faire autant pour Abdoulaye Baldé afin d’obtenir une manifestation digne de son rang, pour de son retour le 23 avril prochain. Wade n’en peux plus de rester dans l’ombre et de se contenter de tirer les ficèles pour extirper son fils Karim des mains de la justice.
A 88 ans (officiellement sans la TVA), le pape du Sopi a décidé de redescendre dans la rue pour passer à la vitesse supérieure.
Pour cet ultimate fighting, Abdoulaye Wade est prêt à utiliser les règles non conventionnelles. Sinon comment comprendre son coup de fil à Pape Diop. Son ancien bailleur du temps des vaches maigres. Son homme de confiance, qui a cumulé le poste de président du Sénat et celui de Maire de la capitale, qu’il n’avait pas manqué d’accuser d’avoir «tué un albinos qu’il avait fait venir du Mali».
Plus courtois que son ancien mentor, visiblement marqué par la perte du pouvoir, le leader de Bokk Gis Gis s’était contenté de répondre ceci : « Je suis musulman, je peux mettre ma main sur le Coran. Je laisse au Bon Dieu le soin de nous juger le moment venu». Eh bien, le moment semble arriver. Plus tôt que Pape Diop ne l’aurait peut-être cru tellement la campagne de dénigrement contre l’ancien maire de Dakar a été virulente. Surprenante même pour beaucoup d’observateurs.
Mais cette volte-face de Wade prouve encore une fois que celui qui a dirigé le Sénégal pendant douze ans, n’est préoccupé que par son fils.
Pour tirer Karim Wade d’affaires, il avait aussi accusé publiquement Abdoulaye Baldé dans le dossier de l’ANOCI.
Lors de sa première conférence de presse, après sa perte du pouvoir, Wade avait affirmé que son fils, Karim Wade était simplement président du Conseil de surveillance de l’Anoci et que c’est Abdoulaye Baldé qui signait les papiers.
Ce qui ne l’a pas empêché de demander au secrétaire général de l’Union des centristes sénégalais (UCS), de venir l’accueillir, selon les confidences de Babacar Gaye.
Pourtant, nos prisons sont remplies d’hommes et de femmes de valeurs qui ont des pères et des mères. Certains d’entre eux seraient même innocents.
On est alors tenté de se poser la question de savoir, pourquoi tout ce tintamarre ? Une chose demeure au moins sûre, le « show » prévu ce 23 avril ne changera pas la donne. Parce que la reddition des comptes est plus qu’une nécessité dans un pays où les citoyens ne voient même pas la queue du diable pour la tirer.
Ce que Wade n’a pas compris ou plutôt n’en a cure, c’est que ces milliards supposés avoir été subtilisés auraient permis de construire plus d’écoles, plus d’universités, plus des forages ; d’électrifier des villes et des villages, de construire des routes et des pistes de production, de désenclaver des zones perdues dans les confins du pays. Par ailleurs, a sans doute oublié qu’il avait fait emprisonner Idrissa Seck pendant six mois avant de lui faire octroyer un non-lieu total. Il avait en tout cas tout programmé à partir du palais en faisant libérer le maire de Thiès.
Le machiavélisme en bandoulière, partout et à tout moment, Abdoulaye Wade prouve encore une fois qu’il résume tout à son fils. Il est le plus beau, le plus diplômé, dans un Sénégal où les doctorants ne se comptent plus.
Seulement aux yeux du père, le fils est incomparable et c’est pour cette raison d’ailleurs, qu’il avait voulu lui tailler un costume qui, s’est révélé trop grand pour ses frêles épaules, en voulant faire voter le honteux ticket le 23 juin 2011.
Wade aime le jeu mais ne supporte pas la défaite. La sportivité et le fair-play ne sont pas de ses qualités. Tout le contraire de son illustre prédécesseur dont les enfants se pavent allégrement dans les rues de Dakar, sans gardes du corps.
Wade, lui, a perdu son pouvoir. Tristement ! Et ce n’est pas en se lançant dans son dernier combat, qu’il va arriver à vivre heureux. Il n’aura la paix que quand il décidera de prendre de la hauteur, d’un homme d’état, en concédant à la justice de son pays, le seul pouvoir qu’il ne perdra jamais…