MOI, AÏSSATA TALL SALL...
SITUATION POLITIQUE À PODOR, LOCALES, MACKY SALL, TANOR DIENG, ASSEMBLÉE NATIONALE, PARTI SOCIALISTE…
Candidate à sa propre succession à la mairie de Podor, Me Aïssata Tall Sall entend livrer un Mortal kombat contre l’alliance «nauséabonde» entre l’Apr et le Pds qui veut l’éjecter. Derrière cette combinazione politicienne qui la met aux prises avec Racine Sy, l’égérie socialiste entend répondre par son bilan et son ancrage. Un bilan qu’il juge largement positif et qu’elle défend avec une aise déconcertante.
C’est que Aïssata Tall Sall nourrit de véritables ambitions pour sa ville natale et pour le Sénégal. Et c’est peut-être cette ambition débordante qui fait d’elle la cible privilégiée tant au sommet de l’Etat que dans son propre parti. Dans cet entretien exclusif, elle se lâche littéralement, tourne en dérision son adversaire, envoie des flèches assassines à Macky Sall, flétrit Benno Bokk Yakaar et menace de ses foudres ses détracteurs.
L’AS : L’actualité, ce sont les élections locales. comment les préparez- vous ?
Aïssata Tall Sall : Je me prépare comme tout politique qui aspire à rempiler. Vous savez, rempiler est plus difficile que se faire élire. On se fait élire sur des promesses, on se fait élire pour de l’espoir que les populations portent en vous. Je pense que c’est la posture la plus simple. Aujourd’hui, moi je suis dans la posture la plus difficile. Celle qui consiste à présenter un bilan aux populations et surtout à faire accepter aux populations que nous pouvons faire plus que le bilan qui a été réalisé. Je suis donc jugée déjà par les Podorois sur mes réalisations, pas simplement sur des paroles que je prononce.
Justement, quel bilan pouvez-vous défendre ?
Lorsque nous allions à la conquête de la mairie, nous avions promis aux Podorois de régler douze points. Il a fallu dans un premier temps restaurer la santé financière de Podor. Et ça nous l’avons fait parce que nous avons augmenté le budget dans un sens qui n’est pas du tout démagogique. Je disais d’ailleurs aux Podorois : «ne vous trompez pas». Je n’ai pas la mairie de Dakar, je n’ai pas la mairie de Thiès, je n’ai pas la mairie de Saint Louis ; j’ai la mairie de Podor avec les ressources de Podor. Nous avons augmenté le budget, en allant chercher partout où il est possible de collecter des ressources de Podorois.
Aujourd’hui, Podor est l’une des rares villes où le soir, les gens peuvent jouer parce que c’est un stade éclairé, rénové et moderne et modernisé. Autre exemple, nous n’avons jamais pu disposer d’une radio privée à Podor. Il n’y avait que Radio Sénégal qui existe et qui d’ailleurs, je le souligne pour l’histoire, n’a été accessible que lorsque je suis devenue ministre de la Communication. Nous avons créé la radio municipale, elle sera fonctionnelle dans quelque temps.
Il y a l’espace jeune, la bibliothèque municipale, un centre multimédia, une bibliothèque virtuelle avec connexion de toutes les bibliothèques et un espace où les jeunes peuvent se rencontrer. Pour la gestion des ordures ménagères, Podor est citée en exemple, partout dans le Sénégal, de bonne gestion des ordures ménagères. Devant chaque maison vous trouvez deux poubelles, une pour les déchets solides et une autre pour les déchets liquides. Je ne parle pas de l’aspect social, de soutien aux Asc…
Vous peignez un podor en or. Est-ce que fondamentalement les populations pensent comme vous ? On vous reproche de n’y aller que rarement.
(Rire) Pourtant j’y vais très souvent. Et j’ai oublié l’éclairage public. Quand nous sommes arrivés, il y avait quelques foyers lumineux à Podor. Nous avons relancé l’éclairage public. Si vous vous promenez à Podor le soir, vous verrez que Podor a changé et vous verrez que c’est ce que pensent les populations.
Les choses ont changé, mais vous aurez en face de vous une liste coriace dirigée par racine sy. est-ce que vous ne craignez pas sa fortune ?
Est-ce que Podor est à vendre ? Si Podor est à vendre aux marchands d’illusion, oui, il faut craindre une fortune. S’il s’agit de compétition électorale avec des gens dignes, conscients de ce qu’ils veulent et de là où ils veulent emmener leur ville, la fortune n’a rien à y voir. Sauf à acheter des consciences. Mais je signale que l’achat de conscience est puni par la loi. Je ne pense pas qu’il puisse venir à l’esprit de quelqu’un de vouloir acheter un Podorois. Je sais qu’il y a des tentatives.
Tous les jours, on m’en parle. C’est un exercice futile, ça ne servira à rien. Et le jour où nous tomberons là-dessus de façon sûre et prouvée, une plainte sera déposée. Mais pour revenir à la fortune, Podor n’est pas à vendre au plus offrant. Il faut aimer Podor, vouloir Podor, pour conquérir le suffrage des Podorois, mais pas avec l’argent.
Mais est-ce que quelque part, vous ne craignez pas Racine Sy ?
Non. Vous voulez une réponse franche : c’est non. Parce que je ne vois pas quelle est la nouvelle donne que l’autre partie peut impulser à Podor. Qu’est-ce qu’on offre à Podor ? Qu’est-ce qu’on a offert aux Podorois ? Qu’est-ce qu’on a fait pour Podor et pour les Podorois avant ?
Pourquoi vous ne le citez pas nommément ?
Pour moi, cela n’a pas d’importance.
Vous vous êtes opposée pendant 3 ans au régime de Wade en tant que maire. Aujourd’hui, le régime de Macky Sall que vous avez aidé à élire vous donne ainsi un coup de poignard. Comment vous l’avez vécu ?
C’est la politique. C’est parce que ce régime a des raisons de le faire. Mais ce n’est pas parce que c’est dit que c’est fait. C’est loin d’être le cas. C’est eux qui savent pourquoi ils me combattent. Ils ont leurs raisons. La seule chose que je sais, c’est qu’on ne me défera pas comme ça.
Pourquoi on essaie de vous combattre ? Pourquoi vous ? Pourquoi Podor ? Pourquoi Racine Sy ?
Je crois qu’il y a plusieurs raisons. Des raisons politiques, c’est encore tôt de le dire parce que le message est un peu brouillé, mais la seule chose qu’on peut retenir est qu’effectivement, il se passe des choses à Podor, des choses qui ne se passent nulle part ailleurs au Sénégal. Maintenant pourquoi c’est Podor ? C’est peut-être parce que c’est la ville de Aïssata Tall. Ce n’est pas seulement que c’est Podor ou c’est quelqu’un qui brigue une mairie. C’est peut-être qu’il faut défaire Aissata Tall, mais de la coupe aux lèvres il va y avoir tout un combat à mener.
Le président de la République était votre voisin, il est votre ami et parent peut-être. Selon vous, qu’est-ce qui le pousse à vouloir vous abattre, alors que vous êtes dans la même coalition ?
Est-ce que vous avez une réponse à cette question ? (Rire)
Nous, on veut savoir…
Est-ce que vous avez même un projet de réponse à cette question ? Moi je ne l’ai pas. La seule chose que je sais, c’est que dans la coalition Benno Bokk Yakaar, il y a des maires qui dérangent. Parce que sinon, comment expliquer qu’on puisse accepter à Podor que le Pds et l’Apr aillent en coalition ? Comment l’accepter ? Parce que celui qui a été le parrain de cette coalition, c’est Abdoulaye Daouda Diallo, le ministre de l’Intérieur. C’est lui-même qui est venu à Podor donner son onction et son haut parrainage à cette coalition.
Sinon, je n’ose pas croire que les apéristes auraient osé. Un autre exemple : lorsque à Fatick le parti «Elan» a voulu partir avec des socialistes, on y a mis le frein tout de suite. Pourquoi pour Podor, le Président s’enlise dans ce silence que personne ne comprend ? Parce que Fatick, c’est sa base et que Podor, c’est la base de Aïssata Tall et Dakar, c’est la base de Khalifa Sall où on peut faire toute sorte de combinazione pour parvenir à ses fins. Voilà la lecture que j’ai.
Ce qui s’est passé à Podor, c’est l’image la plus nauséabonde de la politique. La fin justifie les moyens. Et ceux qui le font, qu’estce qu’ils vous disent ? Non, nous on ne fait pas de politique politicienne. Et j’en ai vu beaucoup de politiques qui ne sont pas arrivés à ce bas niveau de combinazione politiciennes. On vous dit : on ne fait de politique, on est pour le développement, on est pour la société civile, et on va faire des combinaisons que la morale et l’éthique politique réprouvent. Et le Président cautionne ça. Pourquoi ? On sera édifié bientôt.
Est-ce parce que le président a tenté en vain de vous faire transhumer à l’Apr ?
Oui, mais le Président ne peut pas me recruter comme ça et il le sait très bien. Ce que Wade n’a pas réussi en douze ans, ce n’est pas lui qui le fera en deux ans d’exercice de mandat.
Est-ce que vous le lui avez dit de vive voix ?
Disons que je n’ai pas l’habitude de rapporter ce que je dis au Président. Mais on en a parlé X fois. Peut-être qu’arrivera le moment d’en parler sur la place publique.
Ne pensez-vous pas que c’est ce qui explique cet acharnement ?
Peut-être qu’il y a cela. Il y a autre chose qui doit se jouer dans quelque temps. Le moment viendra…
Et le Parti socialiste dans tout cela ? Pourquoi votre parti ne s’est pas prononcé pour désapprouver la démarche de l’Apr ?
Cette question, il faut peut-être la poser à l’autorité suprême du Parti socialiste. En tout cas, j’observe que beaucoup de mes camarades m’ont appelée pour s’offusquer de cette situation là. Maintenant que le parti se prononce, ç’aurait été bien. S’il ne se prononce pas, on prendra acte. On avisera et le moment venu, on mettra tous ces éléments sur la table de discussions et de négociations.
Beaucoup de camarades vous ont appelé, dîtes-vous. Et Ousmane Tanor Dieng ?
Non. Non. Lui n’a pas téléphoné.
Selon vous pourquoi ?
Peut-être que vous aurez l’occasion de lui poser la question (éclat de rire).
Racine Sy, c’est aussi le magnat de l’hôtellerie. Il paraît qu’il a promis des milliers d’emplois aux Podorois. Cela ne vous ébranle-t-il pas ?
J’ai même appris que c’est 15.000 emplois qui sont promis aux Podorois. Alors laissez-moi rire un peu. 15.000 emplois à Podor, cela suppose que les bébés aillent travailler, que tous les retraités soient rappelés, qu’on débauche toute la fonction publique de Podor, les médecins, les enseignants, les chauffeurs, que tout le monde se mette à la disposition de l’employeur et cela ne suffirait pas. Il faudrait qu’on traverse le fleuve et qu’on parte en Mauritanie recruter de la main d’oeuvre complémentaire pour faire 15.000 emplois.
C’est complètement ignorer la population de Podor que de promettre 15.000 emplois. Je pensais qu’il aurait mieux valu proposer ça à Macky Sall qui a tellement de mal à respecter sa promesse sur les 500.000 emplois. Ça sera un bon début de commencement d’exécution. Non, c’est encore des promesses fantaisistes qui ont été faites dans l’ignorance totale de ce qu’est Podor, de ce que représente Podor et voilà pourquoi je pense que tout cela ne sera qu’un coup d’épée dans l’eau. Car celui qui fait de telles promesses n’est pas conscient de ça, les Podorois le savent.
Macky Sall disait à ses militants de ne jamais s’allier avec le Pds. Pourquoi à podor, il le cautionne ?
Je l’ai dit et ça a été fait sous le haut parrainage d'Abdoulaye Daouda Diallo. C’est la main du pouvoir derrière cela.
N’est-ce pas un casus belli ?
C’est plus qu’un casus belli, c’est un acte de guerre. C’est une déclaration de guerre. Moi je n’ai pas peur d’aller en guerre dans des cas comme ça. C’est un acte de guerre. C’est comme cela qu’on va le prendre.
Ça va être difficile sans le Ps et son patron …
Le Parti socialiste et son chef, c’est moi qui les représentais à Podor. C’est moi qui ai gagné pour lui au premier tour de la présidentielle. Donc à Podor le Parti socialiste, c’est moi, c’est personne d’autre.
Où en êtes-vous avec vos ambitions d’être secrétaire général du Ps ?
On le verra au prochain congrès.
C’est dans un mois, êtes-vous candidate ?
Je ne sais pas. Cela dépendra encore de la base à Podor. Parce que pour être candidat au poste de secrétaire général, il faut que la base vous propose. A Podor nous sommes dans ce travail. C’est eux qui décideront et à ce moment-là, on verra. En tout cas, je suis prête à me battre.
On oppose souvent Ousmane Tanor Dieng à Aïssata Tall Sall. C’est quoi vos relations avec lui ?
Correctes, pas plus que cela.
Apparemment, il veut faire du «wax waxeet» et rempiler à la tête du Ps…
C’est son droit de vouloir rempiler et c’est le devoir des militants de choisir. Les militants choisiront. Ce congrès-là sera différent de tous les congrès que nous avons connus. Parce que jusque-là le congrès servait à élire et à installer le secrétaire général du parti, mais celui vers lequel nous allons sera un congrès de formalisation d’une élection qui se sera déjà déroulée dans les instances du parti.
Il y a plus de 140 coordinations dans le pays. Lorsque quelqu’un est candidat, toutes ces coordinations seront appelées à délibérer et à voter au bulletin secret. Donc il va y avoir une élection qui va se dérouler sur l’étendue du territoire. Celui qui sortira vainqueur de cette élection sera secrétaire général et cette élection sera formalisée à l’ouverture du congrès. Donc si Ousmane Tanor Dieng veut rempiler, c’est son droit le plus absolu et c’est aux socialistes d’accomplir leur devoir de voter pour lui ou pour quelqu’un d’autre qu’ils pensent pouvoir prendre les destinées du parti.
Qu’est-ce qui peut expliquer votre absence du bureau de l’assemblée malgré votre background ? N’avez-vous pas le sentiment d’être combattue aussi bien par Macky Sall que par Ousmane Tanor Dieng ?
Moi, je ne suis demandeur de rien à l’Assemblée nationale. Je suis demandeur d’être député et je le suis. Ça me va. Maintenant, tout ce qui se fait autour du bureau, c’est vrai que ce sont des négociations politiques parfois très secrètes- moi-même j’ai été très surprise de constater ce jeu auquel les partis se livrent pour meubler le bureau de l’Assemblée nationale. Mais pour moi, tout cela c’est encore trop futile par rapport au monde politique, par rapport à l’ambition que l’on porte pour son pays.
On vous voit de moins en moins à l’Assemblée nationale. Qu’est-ce qui se passe ?
Parce qu’il n’y a pas de session. Et puis je parle quand j’ai quelque chose à dire. Je ne suis pas un bouton mécanique. Par exemple, lors de la Déclaration de politique générale, on a voulu que je parle, j’ai décliné. Je ne suis pas là à être actionnée à dire des choses qui sont contre mes convictions. Je suis libre.
Vous allez bientôt faire deux ans de législature. Comment jugez-vous le travail de l’Assemblée nationale ?
Je pense qu’on aurait pu faire mieux que ça. On aurait dû être une assemblée de haut niveau, de plus de combat, de plus de proximité par rapport aux problèmes des Sénégalais. Mais malheureusement le constat est là, il faut peut-être essayer, le temps du mandat qui nous reste de redresser la barre. Malheureusement, parfois le jeu politique fausse complètement le choix de compétence et de bon profil. C’est dommage pour le Sénégal, c’est dommage pour le processus démocratique. Malheureusement, c’est comme ça.
Avec les combinaisons que vous venez de décrier, peut-on considérer la coalition Benno bokk yakaar comme une réalité ou une vue d’esprit ?
Moi, j’ai toujours considéré que Benno bokk yakaar n’existait qu’au niveau des leaders. Les élections locales ou la préparation des élections locales viennent de me donner raison. Il n’y a de Benno nulle part. Elle était tellement fragile qu’elle s’est fracassée à la première occasion. Je pense que ce qui aurait été plus clair, plus courageux, c’était que Benno aide à asseoir une élection présidentielle et que chacun retourne chez lui et qu’on fasse les choses et que chacun compte sur ses propres forces, de façon claire, aussi bien pour l’Assemblée nationale que pour tout le reste. Aujourd’hui on n’en serait pas là. Mais là on donne une image pitoyable d’une coalition présidentielle qui n’était là que par raccommodage et qui n’a jamais été une coalition politique, encore moins une coalition électorale.
Parlons du président Abdoulaye Wade. Comment analysez-vous cet accueil qui lui a été réservé ?
Je pense que le Président Wade manquait tout simplement aux gens (rire). Il manque simplement au décor, au paysage politique sénégalais. Ce n’est pas méchant ce que je dis, mais Wade ce n’est pas n’importe qui au Sénégal. C’est encore moins n’importe qui dans l’espace politique sénégalais. C’est un personnage communiquant en diable, qui sait tirer toutes les ficelles de l’homo senegalensis. Je ne vois pas sur la scène politique quelqu’un qui connaît le Sénégalais comme Wade. De ce point de vue, il est passé maître dans l’art de connaître l’homme sénégalais. Donc il sait jouer sur ça.
Et c’est vrai qu’en deux ans d’absence du Sénégal, on a senti qu’il n’est pas là à tel point que vous, journalistes, passez votre temps à dire qu’il n’y a plus d’opposition au Sénégal, que la situation était morose. Moi j’étais à Podor, je regardais les images mais ce que Wade peut réveiller comme foule ! Qu’est-ce qui l’explique ? Il y a des déçus de la seconde alternance, il y a ses partisans à lui, il y a les curieux, il y a les Sénégalais à qui il manquait. Il y a tout cela. Mais tout cela, c’est la mayonnaise Wade et en tant que politique, il faut donner une interprétation à cela.
On ne peut pas lire une page comme cela et dire que rien ne s’est passé. Moi je regardais les journaux télévisés tard dans la nuit, Wade occupe la «Une» de toutes les télévisions. Les élections locales passent après. Il n’y a que du Wade. Moi je regarde ça et je me dis : "bon sang qu’est-ce qui est en train de se passer, seulement deux ans après". Je crois qu’il est de notre responsabilité de trouver une réponse. Et la responsabilité première incombe au Président Macky Sall.
Parce que peut-être le Président Sall n’a pas trouvé de solutions à leurs maux …
Ça les populations le diront, d’abord à l’occasion des locales. Parce qu’on a beau dire, les élections locales chez nous sont vécues comme les élections du mitdterm aux Etats-Unis. Elles sont situées dans le temps dans la mi-temps du mandat du Président. Ça permet aux populations de tout ressortir et la situation nationale peut tout à fait influer négativement ou positivement sur le choix des populations. En 2009, quand Benno faisait sa razzia de maires dans toute l’étendue du territoire, il y avait déjà un mécontentement contre Wade. Voilà pourquoi les élections locales de 2014 vont être un test grandeur nature pour le pouvoir.
Vous avez parlé de déçus de l’alternance ; Idrissa Seck parle de "deuk bi dokhogoul". D’autres disent "deuk bi dafa macky". C’est quoi la position d'Aïssata Tall ?
Je ne peux pas dire que je suis une déçue de l’alternance. Mais je pense qu’on aurait pu mieux faire. Il y a deux ans, j’avais lancé un cri d’alarme à Podor quand j’ai vu les agriculteurs abandonnés sur la route, en disant que Macky Sall n’a pas été élu pour faire moins que Wade. Je le réitère. Il faut qu’il fasse mieux que Wade à tout point de vue. Il y a le Plan Sénégal émergent. Peut-être sortira-t-on de la l’ornière ? Je le souhaite vivement.
Je pense qu’il y a des efforts à faire, à accomplir. Je pense que le Président Macky Sall lui même en est conscient. Quand je l’entends dire à ses ministres qu’il faut travailler plus, je pense qu’il est conscient qu’il y a une forte attente des populations qui n’a pas été satisfaite.
Le Pse n’a pas démarré. Depuis deux ans, qu’est-ce que Aïssata Tall vit en tant que politique dans ses relations avec les Sénégalais et en tant qu’avocat ?
Disons que je vis avec les Sénégalais, j’entends leurs critiques. J’observe leur comportement. Je suis au pouvoir sans y être parce que je ne décide rien. Si j’étais décideur, j’aurais corrigé beaucoup de choses. Il faut qu’il corrige, il y a un manque.
Les affaires marchent-elles pour Me Aïssata Tall, avocate ?
Les affaires sont restées les mêmes. L’avocat est un homme indépendant qui mène son propre business, quel que soit le régime. C’est vrai qu’avec Abdoulaye Wade, on avait souffert un peu, parce que beaucoup de sociétés nous avaient fui du fait du discours d’opposant qu’on véhiculait. Mais, on n’a plus cette pression. Mais le reste, toute condition étant égale par ailleurs, le cabinet est resté le même. On essaie de faire nos propres résultats, c’est beaucoup de sacrifices et c’est beaucoup d’attaques. Vous voyez celle dont j’ai été victime il n’y a pas longtemps. Mais c’est ce qui fait que je ne suis pas le politicien classique et atypique.
Oui justement, vous avez été cité dans une affaire de partage d’héritage. Qu’en est-il ?
Mon client m’a appelée pour me dire qu’il ne connaît pas ce Ignace Coly qui a parlé dans la presse. Il n’est pas mon client, je ne le connais ni d’Adam ni d’Eve. Il va s’immiscer dans une affaire qui n’est pas finie, qui est au tribunal. L’affaire repasse le 14 ou le 15 mai pour que le juge valide cet héritage. Comment peut-on distribuer de l’argent à des héritiers, pour une affaire qui est au tribunal pour laquelle, le tribunal n’a pas donné de dernière décision ?
Je suis un avocat, je ne suis pas irresponsable, je ne vais pas distribuer de l’argent à des gens dont je ne suis pas sûre que le juge dira qu’ils ont droit à cet argent. Pour le reste, j’ai décidé d’aller en diffamation contre Ignace Coly et contre tous ceux là qui lui ont fait parler. Parce que j’imagine qu’il y a des gens derrière lui. Il ne s’est pas immiscé un matin dans une affaire qui est au tribunal.
Le plus extraordinaire, c’est que les documents qu’il a donnés au journal l’Observateur, ce sont des documents qui émanent de mon cabinet. Ce sont mes lettres de compte rendu adressées à mes clients pour leur faire le point. Mais il omet de dire que l’affaire n’est pas finie. Il fait comme si moi j’ai pris de l’argent appartenant à des héritiers et que je me suis assise dessus et que j’ai refusé de distribuer. Il ment à dessein, parce qu’il veut s’attaquer à moi. Il va jusqu’à dire que c’est lui qui a mis les dossiers à mon cabinet. Archi faux. Je ne l’ai jamais vu, il n’a jamais mis les pieds à mon cabinet, il ne m’a jamais adressée ce dossier.
Ce dossier a été confié par quelqu’un qui représente les héritiers et qui m’a dit sur l’honneur qu’il ne connaît pas Monsieur Coly. Alors, je ne suis pas avocat pour rien. J’ai six mois pour le mettre en diffamation. Comme maintenant, j’ai fort à faire à Podor (rire), je vais d’abord terminer mon combat et je vais attaquer après Monsieur Coly et tous les gens au service desquels il se trouve, et je mettrai cette affaire au tribunal pour me défendre, parce que tout est clair et transparent, on a voulu s’attaquer à mon honneur, à mon intégrité dans un espace temporel bien déterminé. Pour quelle raison ? Je le devine aisément, mais je me défendrai et je sais le faire.