À LA POURSUITE D’UN PARADIS POSSIBLE
La fusion qui pousse les cœurs vers un élan panafricaniste n’a jamais été plus intense que quand elle s’exprime en deux domaines. La première source de cette osmose totale a disparu. La seconde revient de manière cyclique, à un rythme quadriennal. L’Apartheid vaincu, le Mondial de foot reste en effet le défi autour duquel le vent unitaire le plus puissant traverse le continent.
Ce soir, il y aura un élan fusionnel avec le Cameroun. Une sorte de convergence qui soutient le défi collectif. On se serre les coudes pour porter ensemble l’aspiration d’un continent que tant de handicaps laissent à la périphérie d’une histoire en train de s’écrire au quotidien. Dans la quête d’affirmation, toutes les grandes conquêtes africaines sont belles, surtout quand leur éclat irradie à travers le monde.
L’entrée en lice du Cameroun fait rêver d’un paradis tant recherché. On ne l’a jamais vu, mais on le sait proche. Dépasser les quarts de finale, gravir les marches jusqu’à tutoyer le ciel du Mondial, ne relève pas d’une frontière au-delà de tout possible.
Des trois équipes africaines qui ont atteint cet horizon qui s’ouvre sur les demi-finales, aucune n’est tombée devant des limites insurmontables. Les faiblesses fatales relevaient du mental. C’est au moment où les envies devaient être plus fortes et les ambitions plus vives, que les influx s’éteignaient. C’est comme si un conditionnement de l’esprit traçait une limite au bonheur pour les équipes africaines.
En 1990, un Cameroun mieux appliqué et plus mature aurait pu s’offrir une Angleterre dépassée et dégoûtée par un match dont il ne comprenait plus rien. En 2002, un Sénégal plus réaliste, plus discipliné dans son jeu et davantage affûté dans la gestion d’une compétition du plus haut niveau, aurait laissé les regrets à la Turquie. En 2010, il suffisait que le penalty de Gyan, dans les arrêts de jeu, suive une trajectoire inférieure de 5 cm pour que la face du monde en fût changée.
Il y a longtemps que le mur des complexes est tombé pour le football africain. Il reste le champ du possible à investir. La manière de le faire n’est plus un mystère, car la culture du haut niveau se mondialise pour épouser des standards plus ou moins uniformes. Le potentiel pour s’y engager s’est développé, car les meilleurs footballeurs africains boivent désormais à la source des plus grands championnats au monde, dans les clubs les plus performants au sein ligues professionnelles.
Ce qui peut faire la différence, pour les équipes africaines, se joue à l’expérience. Que ce soit dans la maîtrise de l’environnement de la haute compétition ou dans la perfection en matière de logistique et d’intendance, les critères de réussite au Mondial ne souffrent pas de l’improvisation. Tout aussi important est le management des hommes quand les ego sont parfois si démesurés qu’ils portent atteinte à l’équilibre des groupes.
Le reste appartient à un coaching basé sur la confiance, pour dessiner le chemin et gérer les étapes de la compétition avec des perspectives qui portent loin.
On doute cependant que cet état d’esprit habite des «sorciers blancs» dont l’ambition est de quitter la compétition sans essuyer de plâtre, habité par le principal souci de ne pas écorner une carrière dont ils calibrent la valeur marchande sur une capacité à limiter les «dégâts» à la face du monde. Ce ne sont pas les défaites qui les gênent, c’est le ridicule qui les dérange.
Pour sortir de l’ornière du Mondial, il faut de l’audace et de la confiance en soi. La puissance que dégage le Nigeria peut soutenir toutes les batailles. Le talent et la fraîcheur qui habitent le Ghana peuvent gouverner des montures appelées à aller loin. De même, après trois Coupes du monde d’affilée, et malgré le cycle finissant dans lequel s’engage son équipe, l’expérience qui habite la Côte d’Ivoire est de nature à compenser ce qui peut lui manquer en termes de fraîcheur.
Ce sont les trois plus grosses certitudes africaines pour ce Mondial. Le Cameroun est invité à les tester aujourd’hui.