ECHOS DE LA TANIERE - MAKHÈTE DIOP, ATTAQUANT AL DAFRA (EAU) - «Si je le voulais je serais en sélection A’»
Stades est allé à la rencontre de Makhète Diop, en vacances au Sénégal. L’attaquant d’Al Dafra, jamais appelé en sélection nationale en dépit de ses performances dans les championnats du Proche Orient, fait savoir qu’il aurait intégré l’équipe A’ du Sénégal. S’il le souhaitait. Entretien
Vous êtes 2ème meilleur buteur du championnat qatari, comment vos dirigeants ont accueilli une telle performance individuelle ?
Ils ont été très contents. J’évolue au club depuis trois ans. Chaque année, je les surprends par mes qualités intrinsèques. Je donne le meilleur de moi pour ne pas les décevoir. Ils m’encouragent et me félicitent pour tout ce que j’apporte au club. Il me reste deux ans de contrat mais ils m’ont d’ores et déjà proposé de le prolonger. J’ai répondu qu’on aura le temps d’y penser.
Avec ce statut de 2ème meilleur buteur, considérez-vous avoir réalisé une bonne saison ?
Je ne suis pas totalement satisfait du classement de mon club dont je suis l’unique attaquant réputé. D’ailleurs, beaucoup de gens s’étonnent que vu mon standing je n’intègre pas les clubs du podium, parce que nous, on jouait le maintien.
Jusque-là, vous avez fait la moitié de votre carrière au Moyen Orient. Songez-vous partir sous d’autres cieux, comme l’Europe ?
C’est vrai. Par rapport à la France, le championnat émirati n’est pas trop visible. Il ne faut pas oublier qu’entre la France et le Sénégal, il y a un pont lié à l’histoire. C’est normal que tout ce qui se passe chez eux soit suivi en direct chez nous. Concernant les Arabes, c’est tout autre. Ils ont de très bonnes infrastructures et de grands joueurs. Chaque année, des équipes européennes veulent me prendre. C’est le cas de Rennes. Il y a aussi Auxerre en D2 française, Molde en D1 de Norvège). Je réponds toujours que je suis sous contrat et mon club compte beaucoup sur moi. Mon transfert est également coûteux.
Pourquoi refusez-vous de partir pour avoir de la visibilité ?
C’est simple, je suis sous contrat, et ces clubs ne peuvent pas racheter mon contrat. Lorsque mes dirigeants m’ont interpellé sur mon départ, j’ai répondu «oui je veux partir». Alors, ils ont mis sur la table un montant que le premier club venu ne peut pas payer. Il y a aussi un autre aspect : les salaires proposés en France ne sont pas bons. S’y ajoutent les taxes et les impôts. Au finish, je préfère rester au Qatar. L’année dernière, un club de D2 en France m’a proposé un contrat, disant que le plus grand salaire en D2 c’est 15.000 euros (environ 10 millions FCFA). Et la moitié de cette somme va dans les impôts.
Ne pensez-vous pas que c’est cette situation qui gêne votre sélection en équipe nationale ?
Non, le sélectionneur national doit suivre tous les championnats du monde. Je ne dis pas «prenez-moi en équipe nationale», mais «déplacez-vous au moins pour superviser mes matchs». C’est la moindre des choses. C’est important de se déplacer pour voir tous les joueurs sénégalais dans le monde. Je n’ai pas encore entendu le coach dire qu’il est venu superviser un joueur au Qatar. Ce n’est pas normal. On dit que la lutte a tué le football, c’est parce que les joueurs n’ont pas de motivation. On ne prend plus les joueurs locaux. Pourtant, dans un passé récent, ils étaient présents. Nous regardons tous les championnats dans nos chambres, la moitié des joueurs sélectionnés sont des remplaçants en clubs. Je préfère prendre un joueur qui joue 90 minutes toutes les semaines que mettre un remplaçant qui jouent 15 minutes.
Franchement, pensez-vous avoir votre place en équipe nationale ?
Je ne vais jamais dire que j’ai ma place en équipe nationale. Qu’ils se déplacent pour me superviser, tout dépend d’eux. Aujourd’hui, on a Asamoah Gyan qui joue la Coupe du monde. Il y a des joueurs nigérians qui évoluent en France et qui ne sont pas au Mondial. Il y a au moins 5 joueurs nigérians qui évoluent dans les pays arabes et qui jouent la Coupe du monde. Qu’on arrête de nous sous-estimer.
Lorsqu’on a sélectionné Baye Oumar Niass, Diafra Sakho, estce que vous ne vous êtes pas dit «pourquoi pas moi ?»
Non, pas du tout. Et ce n’est pas mon genre. C’est leur chance et ils ont bien su l’exploiter. S’ils ont pris Diafra Sakho, c’est parce qu’à un moment, la presse a beaucoup parlé de lui.
On vous a aussi oublié en équipe A’. Aliou Cissé est même allé chercher des jeunes en National (D3 France)…
Aujourd’hui, si je voulais faire partie de l’équipe A’, j’y serais. C’est tout ce que j’ai à dire.
Parlons de la Coupe du monde. Quelles sont les équipes que vous supportez ?
Mon équipe préférée, c’est l’Allemagne, mais pour les favoris, je donne l’Espagne ou le Brésil.
Et pour les équipes africaines ?
L’équipe qui ira loin, c’est celle qui va se qualifier en 8èmes de finale. Et je pense à la Côte d’Ivoire et au Cameroun.
Vous choisissez la Côte d’Ivoire parce que l’on dit que vous ressemblez à Didier Drogba…
Non, Adebayor avait dit : «Ils vont danser, jouer, jubiler mais ils ne vont rien gagner».
Vous cautionnez ces propos d’Adebayor ?
Les Ivoiriens ont des joueurs de classe mondiale. À chaque compétition continentale, ils sont donnés favoris mais au final, ils ne remportent rien. C’est la triste réalité. Ils ont la meilleure attaque du monde, le meilleur milieu de terrain mais rien. Ils vont tomber dans les pièges qui tuent leur football. Ils vont gagner deux ou trois matchs avant de lâcher prise. Pourtant, je les aime bien, on me compare souvent à Didier Drogba. Je l’adore.
Et vos vacances ?
Je suis en famille à Rufisque. Je suis très occupé, les gens viennent me voir tout le temps. En réalité, ce ne sont pas des vacances car, il y a toujours du monde autour de moi. Il y a mon père qui est intendant dans l’équipe nationale, il est entraîneur de 1er degré. J’ai aussi à mes côtés Samba Cor Cissé, on parle de certains projets pour les jeunes à Rufisque.