PS ET AFP, VERS UNE RECOMPOSITION AVEC MACKY SALL
CONTRE-PERFORMANCE
Les résultats mi-figue mi-raisin enregistrés par le Parti socialiste et l’Alliance des forces de progrès aux locales de dimanche, brouillés par une tactique d’alliances, n’en préfigurent pas moins une recomposition de leurs alliances avec le chef de l’Etat.
Bien qu’il soit difficile de déterminer le poids électoral exact de chaque parti politique à partir des élections locales du 29 juin dernier, du fait des coalitions, on peut tout de même se faire une petite idée sur la performance des alliés du président de la République, dont le Parti socialiste (PS) et l’Alliance des forces de progrès (AFP).
Ces deux piliers de la mouvance présidentielle semblent avoir enregistré un net recul, comparé aux scrutins locaux de 2009 pour lesquels ils avaient été alliés dans la coalition Benno Siggil Senegaal.
Si le parti dirigé par Moustapha Niasse avait à l’époque sous son contrôle 40 collectivités locales (régions, communes, communes d’arrondissement, communautés rurales), on est loin du compte pour les élections locales de 2014. Du moins pour l’instant.
A Dakar, les “progressistes”, sous la bannière de Taxawu Dakar, font aussi bien qu’en 2009, en remportant 3 communes (Hann-Bel Air, Sicap-Liberté, Hlm). Mais la défaite de son porte-parole, le maire sortant Malick Diop, à Point E-Fann-Amitié, est un coup dur.
A Guédiawaye, l’AFP, privé du numéro 2 du parti, Malick Gackou il s’est désisté en faveur de Aliou Sall ne remporte que 3 localités (Ndiarème Limamoulaye, Sam notaire, Wakhinane) et conserve Ngoudiane avec le président de la communauté rurale, Mbaye Dione.
Dans le Saloum, l’AFP pourrait récolter 3 collectivités locales à Foundiougne et 6 à Nioro. Une performance que Mbaye Dione juge “satisfaisante” du fait, dit-il, des désaccords notés dans le jeu des alliances. “En 2009, explique le maire de Ngoudiane, nous étions partis sous la bannière de Benno Siggil Senegaal. Cette année, nous sommes partis en rangs dispersés dans certaines localités. Ce qui explique cette situation”.
Cet argument est défendu par Mbodji Diouf, membre du Bureau politique du PS, pour expliquer le résultat relativement faible de son parti à ces locales. Contrairement à 2009 où la plupart des grandes villes du Sénégal (Dakar, Diourbel, Kaffrine, Podor, Mbour, Kaolack, Louga, Guédiawaye) étaient tombées dans l’escarcelle des socialistes, les résultats de 2014 sont loin d’être favorables.
Mis à part le département de Dakar où la coalition Taxawu Dakar, dirigée par Khalifa Sall, a raflé 15 communes d’arrondissement sur les 18 – même si tous les candidats ne sont pas socialistes -, Kaffrine, Podor, Mbour, le PS serait en passe de subir une véritable débâcle au plan national.
Il va perdre Louga où la présidente du mouvement national des femmes du PS et ministre de l’Elevage Aminata Mbengue Ndiaye a été balayée par le candidat de l’APR, Moustapha Diop.
A Diourbel, le maire sortant, Jacques Baudin, a laissé le champ libre à ses adversaires, en ne se représentant pas. Conséquence : la commune pourrait être dirigée par Malick Fall, ex-responsable de l’AFP et leader d’un mouvement citoyen, victorieux.
“Lâchée” par son parti, la mairesse sortante de Podor, Aissata Tall Sall, se donnerait une belle bouffée d’air si la commission de recensement des votes confirme son mince avantage sur Racine Sy, candidat de BBY.
“Compromis politique”
Pour remporter les élections, le parti au pouvoir aura tout misé. Conscient de ses limites, l’APR aura réussi à trouver un compromis politique avec l’AFP pour pouvoir diriger certaines collectivités locales jugées stratégiques.
A Pikine comme à Diourbel, les maires sortants Pape Sagna Mbaye et Madieyna Diouf se sont retirés de la course au profit, diton, des partisans de l’APR. Ce qui a fait dire à certains qu’il s’agit de “deal” entre l’AFP et l’APR. Ce que réfute El Hadji Malick Guèye, des Jeunesses progressistes.
“Il n’y a pas deal. Nous avons joué sur deux tableaux : la loyauté et la préservation des intérêts du parti”, dit le conseiller technique du président de l’Assemblée nationale, Moustapha Niasse. “Nous avons une orientation précise, ajoute M. Guèye. On ne peut pas accepter que le président (Macky Sall) perde partout. C’est pourquoi nous avons pris la décision de ne pas présenter de candidat dans ces localités là”.
Un compromis que le PS n’a pas accepté et qui a laissé les “alliances se nouer en fonction des spécificités de chaque localité”, explique Mbodji Diouf. Ce qui ne sera pas certainement sans conséquence au niveau de l’attelage gouvernemental où le PS dispose de trois ministres. A ce niveau, Mbodji Diouf se veut serein.
“Je pense que si le président Macky Sall doit en tirer la conséquence, ce sera au niveau interne puisqu’il en avait fait la promesse à ses responsables qui perdraient les élections”. Comme une sorte d’avertissement, Macky Sall est invité à “apaiser la tension politique.” Car, “un PS dans l’opposition ne ferait pas l’affaire” du pouvoir.
SAINT-LOUIS RÉSULTATS DES MUNICIPALES
Braya et le PDS menacent de prendre la rue
Les résultats des municipales de Saint-Louis qui donneraient Mansour Faye de Benno Bokk Yaakaar vainqueur sont contestés avec véhémence par Ameth Fall Braya du PDS. Ce dernier, lors d’un point de presse organisé hier, a réaffirmé être le vainqueur de ces joutes et a même précisé que son avance est de 828 suffrages.
Alors que les résultats officiels sont attendus ce matin, les lieutenants de Mansour Faye aussi réclament les clés de la mairie avec une avance de plus de 800 voix sur le candidat de la coalition And défar Ndar ak Sopi.
Prêt à “défendre” sa victoire, Braya organise ce mercredi au quartier de Guet-Ndar une “grande mobilisation” des libéraux et leurs alliés. “Aujourd’hui à notre grande surprise, alors que nous sommes concentrés sur les PV pour avoir les résultats provisoires, d’autres coalitions s’évertuaient à sortir des résultats avec des chiffres erronés”, s’est indigné le libéral en chef à Saint-Louis.
Allusion à un document attribué à BBY et qui octroie à la coalition du pouvoir 12 846 voix contre 12 022 pour And dékal Ndar ak Sopi. Pour Braya, “ces chiffres ne sont pas bons et ce ne sont pas les bons résultats. Aujourd’hui, toutes les localités sont édifiées. Il ne reste que la capitale... C’est très grave, ce que nous vivons. C’est seulement à Saint-Louis où les choses trainent encore alors que tout est clair dans les autres villes du pays”, s’est-il désolé.
“Nous avons fait des élections paisibles et vous vous êtes rendu compte que j’ai reçu les félicitations d’Alioune Badara Cissé et d’Abba Mbaye qui détenaient les mêmes PV que nous. C’est pourquoi je lance un appel à la coalition BBY, notamment à Mansour Faye, pour lui dire de respecter les règles du jeu démocratique”, a-t-il dit.
Aujourd’hui, tout Saint-Louis est dans l’attente de la publication des résultats provisoires par la commission départementale de recensement des votes. Mais il demeure certain que dans les rangs du PDS, on se prépare à descendre dans la rue. Le “grand rassemblement” prévu et annoncé risque de dégénérer, les forces de l’ordre ayant déjà quadrillé certains lieux. D’ailleurs, la forte présence des éléments du GMI témoigne des craintes nourries par les autorités.
DÉPARTEMENTALES
BBY prend Saint-Louis, Ross-Béthio et Richard-Toll
Si les tendances ont tardé à se dessiner au profit de Benno dans la commune de SaintLouis, elles ont été claires et bénéfiques pour elle dans le département. Le socialiste Me Moustapha Mbaye est ainsi plébiscité au poste de futur président du conseil départemental, aidé par ses résultats dans la communauté rurale de Gandon.
Dans ce patelin, un autre socialiste, Modi Diop, a été battu par “la dame de fer de Toubé”, Khoudia Mbaye, ministre de l’Urbanisme et de l’Habitat. La numéro 2 de la Ligue démocratique (LD) va ainsi devenir la première femme maire de cette nouvelle commune issue de l’acte 3 de la décentralisation.
La coalition BBY a remporté 4 des 5 collectivités locales du département de Saint-Louis, celle de Mpal ayant été remportée par Bokk Gis-Gis. A Ross-Béthio, Amadou Bécaye Diop, directeur des Equipements scolaires, est devenu le maire tandis qu’à Richard-Toll, le député de l’APR Amadou Mame Diop a battu la liste du PDS.
PIKINE-GUEDIAWAYE
L’APR pâtit de ses maillons faibles
Dans la banlieue dakaroise, nombreux sont les députés et parfois directeurs généraux appartenant au pouvoir qui ont été laminés par des libéraux tout heureux de revenir aux affaires. Mais la coalition Benno Bokk Yaakaar s’en est bien tirée dans l’ensemble.
Même si les commissions de recensement au niveau des départements de Pikine et de Guédiawaye n’ont pas encore livré leurs verdicts finaux des élections locales de dimanche passé, les premières tendances disponibles dans plusieurs centres de vote test promettent la victoire aux libéraux du Parti démocratique sénégalais (PDS), dans les six communes suivantes : Djiddah Thiaroye Kao (DTK), Pikine-Nord (PN), Guinaw Rails Sud (GRS), Mbao et Malika. Dans la commune de Yeumbeul Sud, l’apériste Cheikh Tidiane Gadio et le libéral Bara Gaye revendiquent chacun la victoire.
A Guédiawaye, sur les 5 communes (Wakhinane-Nimzatt, Sam-Notaire, Médina-Gounass, Golf-Sud et Ndiarème-Limamoulaye (NLL)) du département, une seule, NLL, échappe à l’escarcelle de la coalition Benno Bokk Yaakaar (BBY). Au profit d’une autre coalition regroupant le PDS, Rewmi et des membres de la société civile et/ou mouvements citoyens.
Cependant, dans le département de Pikine, nombreux sont les responsables occupant des postes stratégiques qui ont été laminés dans leurs localités respectives. A leur tête, Abdou Karim Sall, le tout nouveau directeur général de l’ARTP, coordinateur des cadres républicains de Pikine. C’est dans son fief de Mbao qu’il a été battu par l’opposition avec à sa tête le PDS.
Dans la commune de DTK, le député Thilo Sar et Oumar Sow (même si ce dernier n’était pas investi) PCA du CEREEQ, n’ont vu que du feu face à la coalition de l’opposition dirigée par le libéral Dr Cheikh Dieng. Itou à Dalifort où le deuxième questeur à l’Assemblée nationale, tête de liste locale de la coalition BBY, n’a pas fait le poids devant le socialiste et maire sortant, le député Idrissa Diallo.
Du côté de Pikine-Nord, c’est l’ancien député maire du PDS Amadou Diarra qui fait un véritable retour en force avec une razzia face au député Salimata Koréra de l’APR.
Dans le département de Guédiawaye, la seule commune tombée entre les mains de l’opposition est celle de Ndiarème-Limamoulaye. Il doit s’en vouloir, la tête de liste majoritaire qui n’est personne d’autre que le directeur général de l’Ecole nationale d’administration (ENA), Cheikh Awa Balla Fall.
Et comme s’il avait senti sa défaite, il a déclaré vendredi dernier au cours d’un point de presse que le poste qu’il occupe n’est pas politique. A signaler que dans cette localité, une frange de l’Alliance pour la République avait justement appelé à un vote-sanction pour décrier les investitures.
Par ailleurs, et toujours à Guédiawaye, deux députés issus de Bès Du Niakk, ont tous deux mordu la poussière. Il s’agit de Cheikh Oumar Sy et Awa Mbodj. Ils étaient sur deux listes concurrentes pour briguer la mairie de Golf Sud.
BAMBEY
Le PDS rafle 40 des 60 sièges du conseil départemental
Aida Mbodj reste la maîtresse incontestée de Bambey, les résultats aux élections locale de ce dimanche l’ont confirmé. Sur les 60 sièges que compte le Conseil départemental, la coalition qu’elle dirige avec Rewmi en a obtenu 40. Quant à la liste dirigée par le ministre de l’Environnement Mor Ngom, elle n’obtient que 11 sièges. Celle du ministre de l’Hydraulique Pape Diouf se retrouve encore plus bas avec 5 sièges. Le reste des strapontins se partage entre la coalition Juubo (2 siège), le Model et le Bloc 3D (1 siège chacun).
Dans la commune, le Pds et ses alliés contrôleront 33 des 46 sièges du Conseil municipal, tandis que Benno Bokk Yaakaar devra se contenter de 8 sièges et seulement 5 pour Benno Défar Bambey de Pape Abdou Khadre Mbodj, le frère de Aïda. A noter que le Pds dépose aujourd’hui un recours devant le tribunal pour se faire attribuer la victoire dans la commune de Thiakhar, ce qui amplifierait sa victoire.
Aïda Mbodj a dénoncé les énormes moyens déployés par les ministres dans le département pour finalement ne récolter que des défaites. Allusion à Mor Ngom et Pape Diouf. “C’est regrettable de constater que trois semaines durant, il y a eu tout un ministère qui était bloqué parce que tout simplement le ministre en question était en tourné chez lui”, s’est-elle insurgé. Ledit ministre “a dépêché tous les véhicules de son ministère à Bambey et en définitive il a été battu à plate couture.” Selon elle, Macky Sall doit tirer les enseignements des résultats de ce scrutin. La preuve que “ses lieutenants ne prennent pas en charge les préoccupations du peuple sénégalais.”