L'équipe de foot d'Irak en difficulté face au Libéria... et aux bombes
<p>A la 60ème minute du match amical de foot entre l'Irak et le Libéria lundi, le deuxième à se jouer à Bagdad en trois ans, les fans irakiens croisaient les doigts pour que leur équipe évite la défaite. Mais ces espoirs sont devenus secondaires lorsque la violence a une fois de plus frappé la capitale.</p><p>Deux voitures piégées ont explosé à 20 minutes d'intervalle, à quelques encablures du stade, dans une concession de voitures d'occasion à Habibiyah, et l'écho des explosions a résonné dans le stade tout proche, au moment où l'Irak, mené 1-0, tentait de remonter au score.</p><p>La seconde explosion, qui semblait encore plus proche que la première, a déclenché parmi les milliers de spectateurs des incantations à la gloire de Dieu en général scandées lors d'enterrements ou de l'annonce d'un décès.</p><p>Pendant que certains fans tentaient de grimper tout en haut des gradins pour apercevoir les lieux des attentats, le match a continué sur le terrain.</p><p>Dépit et résignation</p><p>Après le coup de sifflet final de l'arbitre, avec un résultat de 1-0 pour le Libéria, le dépit de la défaite irakienne s'est mêlé à la résignation face à la poursuite des violences à Bagdad, où une quinzaine d'attentats coordonnés ont tué 55 personnes lundi.</p><p>"Au milieu de ces explosions, on continue à vivre nos vies" soupire Ghazwan, quittant le stade de Shaab, tandis que la fumée recouvre les environs.</p><p>"Nous n'avons pas peur de ces explosions, mais de cette équipe absolument nulle", lance-t-il.</p><p>Tandis que les spectateurs se dispersent, insultant les joueurs irakiens et leur entraîneur, ce fan de 35 ans s'arrête, lançant à l'adresse des victimes des attentats de lundi "que Dieu ait pitié des martyrs".</p><p>A ce moment là, un autre fan passe, hurlant : "des explosions sur nos routes et notre équipe qui perd sur le terrain. Que peut-il y avoir de pire que cela?"</p><p>Les concessions visées non loin de là, dans la zone d'Habibiyah, sont entourées de soldats et de policiers, tentant tous de convaincre les badauds attroupés de se disperser, craignant une nouvelle attaque sur les mêmes lieux, ce qui arrive souvent lors des attentats en Irak.</p><p>Aucun groupe n'a revendiqué le carnage, mais les insurgés sunnites liés à Al-Qaïda mènent régulièrement des séries d'attentats coordonnés à Bagdad, visant notamment la communauté chiite ou encore les forces de sécurité et institutions gouvernementales, pour tenter d'attiser les tensions et de miner la confiance dans les autorités.</p><p>Anwar, propriétaire d'une des concessions, ne cesse de répéter en inspectant les dégâts de la première explosion: "Dieu merci nous sommes saufs".</p><p>Le football, une issue à toute crise</p><p>Les assaillants "ont profité de notre amour du football" pour introduire une voiture piégée dans la concession pendant le match, raconte le quinquagénaire.</p><p>Non loin de là, sur le site de la seconde explosion, Rabiyah, 27 ans, raconte s'être jeté au sol lorsque l'explosion a retenti alors qu'il se trouvait dans son véhicule.</p><p>"J'ai eu tellement peur que j'ai ouvert la porte et j'ai couru", dit-il, debout au milieu de voitures à vendre, dont il ne reste que des épaves calcinées.</p><p>Un autre homme, qui semble en état de choc, est assis, le bras appuyé sur un châssis noirci. Lorsque son téléphone sonne, il le tend à son voisin: "Je crois que j'ai perdu l'audition avec l'explosion. Réponds et dis leur que ça va."</p><p>Au stade, les joueurs libériens avaient dès avant le match évoqué leur peur de jouer à Bagdad. "En tant qu'êtres humains, nous avons peur de venir ici, mais le football est pour nous une issue à toute crise", a déclaré le porte-parole de l'équipe, Henri Flomo.</p><p>"Au Libéria, nous avons eu une crise pendant 14 ans, mais nous en sommes sortis et aujourd'hui nous sommes unis. Nous sommes sûrs que les Irakiens peuvent y parvenir", a-t-il ajouté évoquant la guerre civile dans son pays dans les années 90.</p>