DECES DE L’ARTISTE PEINTRE ISMAÏLA MANGA
LE VILLAGE DES ARTS ENDEUILLE
L’artiste peintre Ismaila Manga, décédé ce vendredi 13 mars, repose désormais à Bignona où il a été inhumé. Pensionnaire du village des arts, il avait aussi passé plusieurs années au Canada. Le responsable de la galerie Senghor du village, Idrissa Diallo, en parle comme d’un homme qui avait un vrai discours sur sa démarche artistique et sur l’art de manière générale. Nous avons rencontré Ismaila Manga il y a deux mois. A l’époque, nous souhaitions raconter son histoire, mais c’est avec politesse qu’il nous dira «non», «je ne suis pas bien ». Et nous étions loin d’imaginer que nous devrions nous contenter de ce portrait posthume.
Le village des arts de Dakar est en deuil, suite au décès survenu ce vendredi 13 mars de l’un de ses résidents, Ismaila Manga. C’est à Bignona, au sud du pays, que l’artiste peintre a été inhumé. Le responsable de la galerie Léopold Sédar Senghor du village, Idrissa Diallo, nous expliquait au téléphone qu’il avait encore du mal à en parler, la voix étreinte par l’émotion, même s’il se souviendra toujours d’Ismaila Manga comme d’un « artiste dans l’âme ». Un homme qui comme il dit avait une vie intérieure tellement riche, qu’il n’avait pas le temps pour «les détails qui ne le concernaient pas».
C’était aussi quelqu’un de très «cultivé», sans doute parce qu’il « avait souvent le nez dans les bouquins». Il y a un peu moins de deux mois, nous l’avons d’ailleurs surpris dans la cour du village des arts, plongé dans une profonde lecture. A l’époque, nous ne souhaitions que raconter son histoire, mais c’est avec politesse et la mine un peu triste qu’il déclinera notre offre : «Je ne suis pas bien disait-il. Faites un tour dans le village, vous trouverez beaucoup d’autres artistes ! »
Il souffrait effectivement d’ «une» maladie qu’il traînait depuis quelque temps. Ismaila Manga faisait aussi partie des premiers artistes à avoir été sélectionnés pour embellir le Centre international de conférences Abdou Diouf de Diamniadio (Cicad). Et avec l’argent que lui avaient rapporté ses œuvres, il avait justement prévu de «prendre soin de sa santé». La mort ne lui en laissera pas le temps.
Dans sa vie d’artiste, le défunt pensionnaire du village des arts «avait renoncé, depuis une dizaine d’années, à mettre de la couleur sur ses toiles». Une métamorphose artistique qu’Idrissa Diallo explique en ces termes : «Ismaila utilisait de la mine de plomb et des métaux, et l’oxydation de ces métaux-là créait certains effets et une certaine couleur qui n’en était pas finalement, et qui donnait un coup de vieux à ses toiles. Je crois qu’il rajoutait aussi de l’eau de mer par-dessus».
On dit aussi de son travail ou de sa démarche artistique que celle-ci doit énormément à la mythologie. L’artiste était dans une «perpétuelle recherche », sorte d’éternelle quête de l’absolu ou d’une «spiritualité universelle (qui allait bien) au-delà de toute confession religieuse».
Ses toiles, elles non plus, ne sont jamais restées cloîtrées, puisqu’il exposera à titre individuel ou collectif, au Canada, en Allemagne, à Paris ou encore en Belgique. En Afrique, elles séjourneront au Maroc, en République démocratique du Congo (Rdc), et ici au Sénégal, bien entendu, entre la galerie nationale, le musée de l’Ifan, et la galerie Léopold Sédar Senghor du village des arts.
Né en 1957, il passera son enfance dans son village natal de Kamoya, situé entre Sédhiou et Marsassoum. Ismaila Manga fait ensuite ses premiers pas à l’Ecole nationale des arts (Ena) où il entre en 1977, et d’où il sort diplômé en 1982. Il passe aussi 13 longues années au Canada où il s’installera. 1996 sera l’année de la consécration, lorsqu’il expose à la Biennale d’art contemporain de Dakar. Notre sympathie va naturellement à sa famille et à tous les pensionnaires du village des arts.