QUELLE HONTE !
En voulant massifier l’Apr, Macky Sall commet les mêmes erreurs que ses prédécesseurs. La transhumance est la face hideuse de la politique et les citoyens manifestent leur aversion contre ce reniement

«Je demeure convaincu que l’engagement politique peut s’accommoder de l’éthique, de la morale et de la loyauté.»
Macky Sall
Les Sénégalais, en portant Macky Sall à la magistrature suprême, le 25 mars 2012, avec plus de 65% des suffrages, s’attendaient à des ruptures fondamentales, par rapport à ce qui se faisait. Mais, force est de constater que le successeur d’Abdoulaye Wade semble faire dans la continuité.
Dans les discussions de la vie courante, plusieurs individus présentent de nombreux politiciens comme des politicards et donc des hommes dénués de toute éthique morale. Plusieurs de ces politicards se plaisent à affirmer qu’en politique tout est permis, feignant d’ignorer que tout n’est pas utile. Cette affirmation n’est que pur mensonge et justification de comportements immoraux bafouant toute éthique.
L’éthique en politique est une donnée indispensable pour la réussite, sur le long terme, des politiciens et de leurs partis. Les impatients et tous ceux qui ont choisi la réussite personnelle à l’exclusion de tout autre et particulièrement de celle de leurs partis et de leur pays, choisissent le raccourci de la transhumance, de l’enrichissement facile et rapide grâce aux surfacturations et autres gains obtenus par l’occupation de hauts postes de l’administration publique. Cette voie de l’immoralité, du non-respect du minimum d’éthique, n’est guère pérenne et ne conduit pas à la réussite politique.
S’il est vrai que le traître peut prospérer, ce n’est évidemment que pour un bref moment ; de plus, son nom dans l’histoire s’écrit de la plus mauvaise des manières.
Sur le plan politique, le sujet de conversation le plus prosaïque actuellement est la transhumance politique. Loin d'être une bonne stratégie politique, ce phénomène, qui reste la distraction favorite de certains politiciens, est d'envergure, mais honteux.
Portée au périgée, la jeune démocratie sénégalaise souffre aujourd'hui d'un terrible mal : la transhumance politique. Certes, la majeure partie de la classe politique sénégalaise, hormis ses perversions, a nettement révélé ses limites. Mais la transhumance politique demeure un véritable goulot d'étranglement à l'évolution de la jeune démocratie sénégalaise.
La transhumance, du latin trans (de l’autre côté) et humus (la terre, le pays), est la migration périodique d’une part du bétail (bovidés, équidés et ovins) de la plaine vers la montagne ou de la montagne vers la plaine, d’autre part des abeilles d’une région florale à une autre, et ce en fonction des conditions climatiques et de l'alternance des saisons.
Au Sénégal, lorsqu'on parle de transhumance, la définition est tout autre. Cela évoque immédiatement le passage d'un politicien d'un parti à un autre, d'une idéologie à une autre. Le bétail transhumant est toujours guidé par un berger, les hommes qui transhument le sont par leur moralité.
La transhumance politique apparaît donc comme étant une action opportuniste des hommes politiques à la recherche d'une nouvelle élite. En effet, en contrepartie de son adhésion et de son soutien, le transhumant garde ses privilèges et/ou échappe à une condamnation certaine pour faute de gestion ; c'est souvent le cas des politiciens sénégalais qui, sentant la CREI à leurs trousses, font un revirement de 180 degrés. Les cas les plus hideux sont ceux d’Awa Ndiaye, Innocence Ntap Ndiaye et Sitor Ndour. Une véritable honte pour la démocratie sénégalaise.
Le plus pénible reste à venir : si la CREI maintient sa volonté de traquer les politiciens véreux et corrompus de ce pays, on assistera, sans nul doute, à une méga transhumance politique, celle que le Senegal n'a pas encore connue. Beaucoup de Sénégalais en sont déçus.
En voulant massifier son parti, l’Apr, Macky Sall commet les mêmes erreurs que ses prédécesseurs. La transhumance a la face hideuse du jeu politique et les citoyens manifestent chaque jour leur aversion contre ce phénomène de trahison et de reniement. Les transhumants amènent des problèmes dans un parti au pouvoir ; ils ne croient ni en son dirigeant qu’ils diabolisaient auparavant ni à la ligne de son parti ; ils ne veulent que des sinécures et créent dans le parti leurs propres tendances pour mener la guerre aux «pionniers».
Ce qui est triste, le parti se laisse envahir par des gens qui n’ont que leurs crocs pour se jeter sur le morceau de viande qui leur est jeté. Ils assombrissent le parti et renvoient le Sénégal au régime défait. Si Macky Sall savait…
S'il est vrai que chaque parti politique est une entité à part entière et forme l'opinion et ses militants par un encadrement doctrinal et idéologique, si c'est grâce à cette formation assurée par cette entité que seront connus les idées et le programme dont se réclament tel ou tel candidat qui sollicitent, de ce parti, son investiture à une charge politique, la transhumance politique doit être considérée comme la pire des trahisons.
En somme, c’est une belle expression péjorative pour désigner une catégorie de politiques peu scrupuleux. Ceux qui, n’ayant aucune opinion et cherchant à servir leurs desseins personnels, changent de partis du jour au lendemain. L'expression «transhumance politique», en tant que telle, les sanctionne déjà, parce que renvoyant terriblement à un troupeau, plus précisément à des animaux, qui ne se déplacent que pour rechercher des pâturages plus verts. Quelle honte ! Il faudrait qu'ils comprennent qu'en politique, la victoire ne vient pas par la masse, mais de l'effort des fidèles.
Vive le «Plan Transhumance» émergent !