"UNE PORTE OUVERTE AU VAGABONDAGE SEXUEL"
Mame Matar Gueye, de l'ONG Jamra sur la légalisation de l'avortement
La demande formulée, le week-end dernier, lors d'un atelier, par l'Association des femmes médecins du Sénégal (Afems), en faveur de la légalisation de l'avortement en cas de viols ou d'incestes, n'a pas l'assentiment de l'Ong Jamra. Son porte-parole, Mame Matar Guèye, clame ainsi qu'il ne saurait être question qu'une frange extrêmement minoritaire veuille imposer son point de vue à l'écrasante majorité des Sénégalais.
"Ces femmes médecins savent pertinemment que relativement à la problématique de l'avortement clandestin consécutif à un viol ou un inceste, qu'il s'agit d'une quantité méprisable de personnes qui défend cette thèse. Alors, nous, nous ne souhaitons pas qu'on saisisse cette opportunité de manière que certains puissent en profiter pour faire de cet avortement une chose légale, alors que ce n'est rien d'autre qu'une forme de négation du droit à la vie", a martelé M. Guèye.
"L'avortement est une forme de négation du droit à la vie"
"Une interruption volontaire de grossesse, alors que la vie de la mère n'est aucunement en danger, nous considérons que c'est une forme d'infanticide qui ne dit pas son nom. Nous sommes dans un pays à 95% de musulmans et nos frères chrétiens qui représentent 3% aussi, leur texte sacré de référence rejette cette interruption volontaire de grossesses", a-t-il ajouté.
Selon lui, "le législateur s'est fondé sur ces textes pour structurer dans le Code pénal dont l'article 306, comme l'établit les textes coraniques et bibliques, n'admettent l'avortement que si c'est la seule solution pour sauver la vie de la mère. Il n'y a pas d'autre dérogation admise par la religion. Et l'article 306 ne dit pas autre chose. Mieux, cette disposition a été reprise par le code de déontologie des médecins. Ils ne peuvent donc introduire d'autres dérogations. Mais il ne faut pas faire d'une situation extrêmement minoritaire une généralité pour l'imposer dans une disposition générale de la loi".
Toutefois, en ce qui concerne la situation de ces femmes victimes de viols ou d'incestes, il se veut compatissant. "Nous sommes sensibles à la situation de ces femmes victimes de viol ou d'inceste, elles vivent des drames poignants, cela va de soi. Mais il ne faudrait pas qu'on passe par cette voie qui est une porte ouverte au vagabondage sexuelle. Ce n'est pas parce que ces femmes ont cité des chiffres faramineux sur l'avortement clandestin qu'il doit être légalisé et médicalisé", a-t-il souligné.
Jamra en tournée ce vendredi
Pour trouver une solution à ce problème, Mame Matar Guèye propose à l'Etat de créer un Comité consultatif d'éthique où siégeraient des scientifiques, des médecins, des religieux, des femmes leaders, pour examiner les problèmes au cas par cas. Mais pour ce qui est de la législation, il est formel. "Il ne saurait être question dans ce pays qu'est le Sénégal de légiférer pour légaliser l'avortement, quel qu'en soit le motif. Et nous nous battrons contre ça".
Du reste, Mame Matar Guèye annonce que Jamra "va repartir en guerre. Dès ce vendredi, après la ‘Khoutba' de l'imam Massamba Diop, nous repartirons en campagne de sensibilisation contre la légalisation de l'avortement. Nous avons déjà pris rendez-vous à Touba avec Serigne Sidi Mactar Mbacké, Khalife général des mourides. Après, nous irons à Tivaouane, à Ndiassane, à Médina Baye, à Yoff et dans tous les foyers religieux de ce pays pour les informer, comme nous l'avions fait l'année dernière déjà. Parce que toutes les familles religieuses au Sénégal que nous avons consultées sont contre la légalisation de l'avortement".
Pour Mame Matar Guèye, "la bataille est à mener. Car elle vaut la peine d'être menée. Parce que toutes ces associations qui veulent nous imposer l'avortement sont financées par des bailleurs étrangers dont le dessein est de nous arrimer aux valeurs occidentales qui ne correspondent ni à nos valeurs, ni à nos croyances religieuses. C'est des gens qui veulent détruire nos valeurs".
"Comme il revient à la charge, on va reprendre le combat"
"Légaliser l'avortement, c'est une porte ouverte au vagabondage sexuel. C'est une façon d'inciter nos enfants et notre jeunesse à la débauche. Une manière de dire aux filles si vous tombez enceinte, il n'y a pas de problème, vous pouvez aller à l'hôpital pour vous faire avorter. Et ça, jamais nous ne l'accepterons dans notre pays. On avait cru qu'ils avaient compris le message il y a un an et qu'ils avaient renoncé. Donc, on avait baissé les armes. Mais comme il revient à la charge, on va rependre le combat dès ce vendredi pour mettre définitivement fin à tout cela cette fois-ci", a-t-il prévenu.