5 ANS POUR TENIR LES PROMESSES
Les élections législatives, commencées dans le tumulte, ont pris fin le dimanche dernier dans le calme et la tranquillité. Pastef, avec Ousmane Sonko, a raflé une très grande portion de députés, ne laissant que la portion congrue à ses adversaires.
Les élections législatives, commencées dans le tumulte, ont pris fin le dimanche dernier dans le calme et la tranquillité. Pastef, avec Ousmane Sonko, a raflé une très grande portion de députés, ne laissant que la portion congrue à ses adversaires. Une chose dont il faut également se féliciter, c’est que depuis 2000, les quelques légères incohérences que l’on note au cours des scrutins, n’ont jamais plus produit de contestation profonde, tendant à remettre en cause la sincérité du vote. C’est dire que les Sénégalais dans leur majorité, ont atteint une grande maturité, et surtout, font leur choix en toute connaissance de cause.
Et surtout, les Sénégalais apprennent tous les jours à faire confiance à notre système démocratique. Si des leaders politiques contestent parfois de manière véhémente la victoire de leurs adversaires, ils se rendent souvent, très rapidement compte, que le Peuple souverain n’a pas l’intention de les suivre sur ce terrain. Car en vérité, ledit Peuple attend dorénavant leurs prouesses sur d’autres terrains. De manière concrète, après son triomphe du week-end, le Peuple attend de Ousmane Sonko, qu’il utilise les clés qui lui ont été confiées, pour ouvrir les bonnes portes.
On a suffisamment dit que le changement tant attendu depuis 8 mois, se fait toujours attendre. Les électeurs ont voulu exprimer leur confiance en ceux qu’ils croient à même de les sortir de la situation pénible dans laquelle le pays se trouve. Depuis plus d’un an, la situation économique se dégrade ; mais l’arrivée au pouvoir de Bassirou Diomaye Faye semble avoir exacerbé la situation.
Les dirigeants actuels avaient voulu faire croire aux citoyens que Macky Sall et ses orientations politiques étaient responsables du marasme dans lequel se trouvait le pays. Ils n’ont pas voulu croire que, malgré les détournements et la prévarication, la somme de 1000 milliards de francs Cfa que Macky Sall avait injectée dans la résistance aux effets économiques du Covid-19, avait permis au pays de mieux résister que beaucoup d’autres dans le monde. Même les travaux d’infrastructures entrepris durant le magistère de l’ancien Président, ont été dépeints par ses détracteurs comme étant des moyens faciles de détournement de fonds publics. Tout cela a eu pour conséquence, selon eux, un chômage quasi-endémique, et un nombre de plus en plus croissant de tentatives de migration à travers des pirogues se dirigeant vers les îles espagnoles des Canaries, perçues comme le nouvel eldorado.
Leur déclaration la plus déterminante, a été qu’il suffisait qu’ils arrivent au pouvoir pour que les choses commencent à changer, et que la situation du pays s’améliore. Les Sénégalais les ont d’abord attendus sur les prix de certains produits alimentaires, et sur le loyer, comme ils ont promis. Les promesses n’ont pas été faciles à tenir. Non seulement les produits alimentaires n’ont pas baissé autant que l’espéraient les consommateurs, mais surtout, les baisses de prix n’ont pas duré et quasiment tous les produits de consommation courante ont repris l’ascenseur.
L’Etat a voulu forcer les choses et contraint les distributeurs à bloquer les coûts, ce qui a eu pour conséquence, la raréfaction de certains produits. Certains producteurs eux, ont commencé à tirer la langue, tellement ils vivent difficilement la pression que leur impose l’Etat de vendre quasiment à perte. Les meuniers, les sucriers, ainsi que d’autres transformateurs, étouffent autant de ne pouvoir répercuter la vérité des prix sur leurs productions, alors que l’Etat ne leur offre aucune compensation. En début d’année, les minotiers avaient été mis en demeure de baisser le prix de la farine à 15 200, au lieu de 19 200 francs Cfa, pour éviter une augmentation du prix du pain. Forcés de se soumettre, ces industriels constatent que la levée des droits de douane couvre à peine leurs charges.
Mais eux au moins, ils n’en sont pas encore arrivés à licencier du personnel, comme le secteur des Btp. Les entreprises du secteur ont les premiers senti le souffle des mesures de suspension des constructions décidées par l’Etat. A ce jour, plusieurs chantiers sont à l’arrêt, parce que le gouvernement vérifie encore la validité de certains titres de propriété sur certains sites sur le territoire national. Par ailleurs, ceux qui avaient contracté avec l’Etat sous l’ancien régime, ne parviennent toujours pas à rentrer dans leurs fonds. Les organisations patronales parlent de plus de 300 milliards de Cfa dus aux entreprises du secteur. D’autres, en privé, parlent de près de 500 milliards, et certains ont mis leurs travailleurs en chômage technique. Les perspectives dans le secteur sont sombres.
C’est dans ces circonstances que Madiambal Diagne, ancien Administrateur général du Groupe Avenir communication, révèle que le Sénégal s’est retrouvé en défaut de paiement de la dette extérieure, le 15 novembre dernier. M. Diagne ajoute dans son post sur Twitter, que le ministre des Finances a pu payer une partie des 130 milliards et négocier un différé pour un mois. Une situation tellement inédite qu’elle envoie un message inquiétant. Depuis son indépendance, le Sénégal a toujours veillé à respecter deux choses, en matière de finances publiques, le paiement de la dette extérieure, et le versement des salaires dans la Fonction publique. Si l’on en arrive à avoir des problèmes à honorer l’une de ces échéances, quelle garantie avons-nous de pouvoir respecter l’autre ? Cette situation se présente au moment où les pouvoirs publics ont des difficultés à faire face à d’autres échéances. Malgré une abondante pluviométrie, la campagne agricole ne se présente pas sous de bons auspices. L’arachide que l’on voulait interdire à l’exportation, va finalement pouvoir être vendue à l’extérieur, faute d’ être transformée sur place. La production de riz ne sera pas non plus aussi importante que l’on a pensé, au moment où les horticulteurs de la Vallée se demandent si le moment est encore opportun pour se lancer dans des investissements importants.
Dans tout cet environnement économique et social, les partenaires techniques et financiers veulent y voir clair, alors que la Vision 2050, qui cherche à se démarquer du Pse, tarde encore à se mettre en œuvre. Le Fmi attend l’audit des finances publiques lancé par la Cour des comptes, pour étudier un nouveau programme avec l’Etat. Le secteur des hydrocarbures, échaudé par les audits sur les contrats passés sous Macky Sall, a arrêté ses machines. Même Woodside n’est pas sûr de poursuivre son exploitation de Sangomar.
Sonko a souligné que le Peuple sénégalais sera le premier bénéficiaire des richesses de son sol et de son sous-sol, et même de son littoral marin. Le gouvernement et ses thuriféraires tentent de transformer en victoire la décision de la Commission européenne de ne pas renégocier un autre contrat sur les licences de pêche. Le temps dira qui aura eu raison. En attendant, les citoyens sénégalais, frappés par le chômage et la précarité, n’ont pas beaucoup de temps à attendre. Et le Premier ministre le sait. Il n’a que 5 ans pour tenir ses promesses.