BYE BYE DÉMOCRATIE ?
EXCLUSIF SENEPLUS - La gestion vertueuse de notre République n’est pas la préoccupation du président Macky Sall qui fragilise ainsi nos ressources et notre pays
Pour tout observateur honnête, ce qui se passe actuellement au Sénégal est plus qu’interpellant.
Voilà un pays où de nombreux scandales de mauvaise gestion, de détournements de fonds publics et de prévarication se sont succédé ces dernières années sans donner lieu à une seule condamnation ou à un seul procès (sauf pour les opposants !). Visiblement, la gestion vertueuse de notre République (au sens premier du terme) n’est pas la préoccupation du président Macky Sall qui fragilise ainsi nos ressources et notre pays.
Parallèlement, les forces de défense et de sécurité ainsi que les tribunaux sont largement impliqués dans des pratiques visant à restreindre les libertés (d’expression, d’information, de circulation, etc.) garanties par notre Constitution et nos lois, entrainant au passage la perte de plusieurs précieuses vies humaines. Il n’est pas du tout excessif de dire que nous nous installons de plus en plus dans une forme d’autocratie, parce que les gens sont emprisonnées pour des discours parfois moins virulents et subversifs que les discours que tenait le Macky Sall-opposant.
En soi, cette situation est extrêmement révoltante. Mais ce qui est le plus choquant et inacceptable, c’est que tout un appareil étatique décide d’aller dans le sens de ce que désire Macky Sall.
Quand des personnes sont tuées dans le cadre de manifestations, des suites judiciaires doivent avoir lieu suite à ces assassinats, si nous vivions dans une démocratie.
Quand des autorités sont épinglées par les rapports des corps de contrôle pour mauvaise gestion ou détournement des fonds publics, aucun coude, fût-il présidentiel, ne devrait pouvoir empêcher qu’il y ait des suites judiciaires à ces affaires, si nous vivions dans une démocratie.
Il s’agit de gestion des fonds publics et le président lui-même doit rendre compte, le cas échéant, de sa gestion des fonds publics dans une démocratie.
Alors pourquoi est-il possible de vivre ces situations dans notre pays ? Qu’est-ce qui fait que l’administration ne tient pas son rôle en agissant dans le cadre strict de la légalité et en refusant de suivre les politiciens quand ils sortent de ce cadre ? Qu’est ce qui fait que nos procureurs soient plus des exécutants des desiderata du prince que des représentants et défenseurs de la société ? Pourquoi compromettre tout un parcours de vie (études, carrière, ...) en servant sur une base illégale un homme au lieu de servir son pays ?
Certains ont peut-être une réponse mais ceux qui n’en ont pas, comme moi, sont dans l’incompréhension et dans l’inquiétude, dans la mesure où ces pratiques visiblement acceptées voire soutenues mettent en péril tout notre système démocratique. Il existe certainement des dispositions légales sanctionnant les magistrats, hauts fonctionnaires et fonctionnaires qui agissent hors de la légalité. Mais à quoi servent-elles si on ne peut pas les appliquer à ces hors-la-loi ?
A mon sens, et si cela n’est pas encore le cas, il faudrait que de telles fautes soient imprescriptibles car elles sapent les fondements de notre système politique et mettent en péril notre pays. La paix et la sérénité nécessaires aux activités économiques ne peuvent prospérer dans un climat d'injustice.
Il est plus qu’urgent d’améliorer nos lois de façon à, d’une part, renforcer l’indépendance des magistrats et la neutralité de l’administration et, d’autre part, de punir de façon extrêmement sévère (détention et confiscation de biens) les magistrats et hauts fonctionnaires auteurs d’abus ou de manquements graves dans l’exercice de leurs fonctions. La société civile et tous les partis politiques soucieux de consolider le socle de notre fragile démocratie doivent s’engager dans cette réforme.
La configuration actuelle de l’Assemblée nationale (coalition au pouvoir et opposition à quasi égalité de sièges) et la prochaine élection présidentielle sont une opportunité. La proposition de réforme pourrait être mise à l’agenda de l’Assemblée nationale et les partis politiques devront clairement se positionner par rapport à elle et la voter. Si le vote échoue, le peuple sénégalais saura situer les responsabilités de cet échec et votera en conséquence lors de l’élection présidentielle de 2024.
Si cela n’est pas fait, il ne nous resterait plus qu’à dire, dans très peu de temps : bye bye démocratie !