ESPACE PUBLIC POUR TOUTES
Qu’est-ce que cela dit de nous en tant qu’hommes quand, à quelques jours du match retour des barrages du Mondial 2022 entre nos Lions et les Pharaons, nos concitoyennes se dissuadent d’assister à cet événement de peur d'y être sexuellement agressées ?
Nous signataires de cette tribune, nous adressons, en tant qu’hommes sénégalais, aux hommes de notre pays.
Nos concitoyennes, à force de mobilisations depuis des décennies, des mouvements pour l’émancipation des femmes portés par nos aînées aux associations féministes de nos consoeurs actuelles, tentent d'attirer notre attention sur les questions des violences faites aux femmes. Leur détermination et leurs actions qui n’ont jamais faibli, ont certes porté des fruits, tels que la récente crimininalisation du viol et de la pédophilie, mais force est de constater que nous n’avons pas écouté, nous n'avons pas entendu. Nous avons été sourds à leurs revendications et l’actualité récente se rappelle à nous avec son lot de cruautés envers les femmes.
Du féminicide abominable de Seynabou Ka Diallo, étudiante à l’Université Gaston Berger, aux harceleurs et agresseurs sexuels dans les transports en commun en passant par toutes ces interactions non-consenties, donc ces agressions que l'on impose aux femmes dans l’espace public, l’urgence d’un sursaut en conscience et actes est plus que nécessaire de notre part. Il est d’autant plus urgent que même la célébration de notre première coupe d’Afrique de football a été salie par les agressions sexuelles subies par plusieurs femmes. Même dans un moment de communion de toute la nation, un moment qui ne devait laisser en mémoire que les images de la liesse d’un peuple uni dans la célébration d’un accomplissement exceptionnel, certaines de nos concitoyennes ne garderont qu'un souvenir : celui de la négation de leur humanité, de leur intégrité physique et morale, de leur viol.
Le ressort de notre prise de conscience ne doit se trouver ni dans le fait qu’elles soient
nos mères, nos sœurs ou nos filles, ni dans un quelconque élan paternaliste. Il est de
notre devoir de nous assurer de la jouissance pleine et entière de leur droit à occuper l’espace public comme tout un chacun. Nous sommes devant une rupture d’égalité manifeste entre les hommes et les femmes, ce qui va à l’encontre des principe fondateurs de cette nation.
Qu’est-ce que cela dit de nous en tant qu’hommes quand, à quelques jours du match retour des barrages de la Coupe du monde 2022 entre nos Lions et les Pharaons d’Egypte, nos concitoyennes prennent les réseaux sociaux pour partager leurs inquiétudes et se dissuader d’assister à cet événement de peur des agressions sexuelles qu’elles pourraient y subir ?
Il est de notre devoir de faire tout notre possible afin de prévenir de tels comportements, d'agir quand nous en sommes témoins et surtout de veiller à ce qu’aucune complaisance ni complicité ne reste impunie. La sécurité de nos concitoyennes n’incombe pas qu’aux autorités publiques mais également à tout un chacun car c’est cela que faire communauté. C’est de nous assurer que chacun de nous soit, en actes, en paroles et en conscience, le garant du respect plein et entier du droit des femmes à l’égalité. Il nous revient donc de nous savoir concernés en premier lieu par ce sujet et ne pouvant être neutres face à l’injustice, nous nous devons d’agir.
Bien évidemment il va nous falloir aller plus loin dans cette réflexion si nous voulons éradiquer une bonne fois pour toute les violences faites aux femmes. Aller plus loin, c'est commencer dans nos maisons où beaucoup de choses sont tues par un “sutura” qui n’est que le voile de la complicité. Aller plus loin, c'est agir sur nos fréquentations où les abus sont noyés dans un “masla” qui n’est que complaisance. Aller plus loin, c'est intervenir dans l’espace public où la complicité de nos regards détournés par le “màndu” assure la perpétuation de l’ignominie.
En nous adressant à chacun d'entre vous, nous ne serons ni pionniers ni éclaireurs, nous ne faisons que vous répéter ce que les femmes elles-mêmes nous disent depuis longtemps. Nous réitérons l’absolue nécessité de les écouter dans leurs constats et préconisations pour mettre fin à ce fléau. Nous en appelons donc à l'engagement ferme
et sans équivoque des leaders d’opinion, journalistes, des activistes, des citoyens à porter par tous les moyens cette démarche.
Et si pour cette fois-ci nos concitoyennes pouvaient se rendre au match sans craindre ni abus sexuel ni viol car chacun d’entre nous s’engagera pour faire en sorte que #EspacePublicPourToutes soit une réalité ?
Signataires :
Amadou Korka Sow, Consultant IT
Saliou Seck, Juriste, Musicien
Lamine Ndoye, Entrepreneur
Momar Sall, Actuaire
Pape Sène, Journaliste
Abdou Touré, Scout, Humanitaire
Papa Djigane Cissé, Juriste - Business Developer
Papa Ismaïla Dieng, Journaliste - Formateur
Cheikh Fall Fondateur Africtivistes
Alaaji Abdulaay, Blogueur
Mohamed Thiam, Consultant IT
Alassane Diedhiou, Développeur Web
Ousmane Gueye, Membre de FRAPP et Chargé de communication chez Blank
Hady Kodoye Anne, Porte parole Solidarité Sans Frontières Canada, Software
Specialist
Mouhamed Moustapha Sene, Ingénieur en Génie Électrique
Amadou Tidiane Ba, Mécanicien Industriel
Sai Seck, Étudiant en psychologie
Ousmane Aly Diallo, Chercheur, Amnesty International
Samba Dialimpa Badji, Journalist AfricaCheck, @bbcafrique
Mame Mor Sène, Assureur
Moussa Ngom, Journaliste et Coordonnateur de La Maison Des Reporters
Simel Sarr, Consultant en Communication
Abdoulaye Dièye, Entrepreneur
Pape Amar, IT System Engineer
Charles Diouf, Enseignant
Dr Mouhamadou El Hady Ba, Fastef UCAD
Youssoupha Féhé Sarr, Rappeur
Maodo Ndiaye, Juriste
Abdou Wahab Ben Geloune
Pape Ibrahima Seye, Enseignant Chercheur
Boubacar Seck, Architecte, Écrivain
Doudou Thiam, Recruteur, Chef d’entreprise
Brice Koué, Content Manager / Enseignant / HeForShe
Serge Hope, Informaticien
Maguette Niang, Médecin
Madiodio Gaye, Software Developer
Ansoumane Camara
Moustapha Lo, Enseignant-Chercheur
Alioune Dioume, Cadreur
Souleymane Diagne, Ingénieur du Son
Cheikh Badiane, Gérant de Station-Service
Amadou Dia, Avocat