LA QUADRATURE COMMUNISTE DU BLOCAGE DES PRIX
Il faut laisser les prix libres chez les commerçants propriétaires de leurs propres échoppes. Puis, créer des magasins étatiques de référence avec des prix bas homologués et où on trouverait les denrées de première nécessité subventionnées
L’Etat du Sénégal, devant la flambée des prix des denrées de première nécessité née de la crise urkraino-russe et du blocage de l’export du blé et autres céréales, a pris comme première mesure en juin dernier d’augmenter de 100 FCFA le prix de l’essence super. Sans toucher au prix du gazoil. C’est là une mesure structurelle et structurante qu’il faut saluer, qui épargne les bourses des ménages les moins nantis et protège le transport en commun de personnes et de marchandises, qui est une donnée essentielle pour maintenir droite la colonne vertébrale de l’économie nationale.
La crise des prix persistant, le gouvernement sénégalais a jugé bon de fixer des prix bloqués pour un certain nombre de denrées et de baisser d’autorité aussi les prix des loyers (jusqu’à 20% de baisse pour les loyers en dessous de 300 000 FCFA mensuels). Alors que tout le monde s’accorde à dire que la baisse obligatoire des loyers en 2014 a été de nul effet, cette fois, le gouvernement se faire fort de la rendre efficace et pérenne, notamment par la mise en place d’une commission de régulation qui entendra des litiges plutôt que le tribunal et conduira les conciliations. Pour être sûr d’être obéi, il faut ordonner le possible…
Car, dès l’entrée en vigueur de ces prix bloqués, on constate que les commerçants rechignent à les appliquer. D’où rafles de marchandises par la gendarmerie. Mazette ! Eh bien, je pense que les prix des commerçants devraient être libres. Il faut leur laisser la latitude de faire de leur prix éventuellement bas et de leurs ventes en soldes un argument commercial et non une obligation administrative. Au Sénégal, nous sommes dans une économie libérale et dans un pays membre de l’OMC. La liberté des prix se doit d’être la règle. On vend bien une bouteille de soda cola à 200 frs à la boutique du Diallo de quartier, à 600 frs au resto-chawarma du coin, à 1000 frs dans les bars maquisards et à 5 000 frs au comptoir du Dizzie Bar du King Fahd Palace. Ça n’en reste pas moins la même bouteille de boisson cola.
La solution n’est pas dans la glaciation des prix par oukaze gouvernemental chez ceux qui exercent une profession libérale, les commerçants. C’est aussi une mesure socialement inéquitable, car elle met les marchandises au même prix pour les riches et les pauvres, qui déjà payent le même taux de TVA dessus, 18%.
La cherté du coût de la vie donc ? Oui, bien sûr, il faudrait agir contre elle. Mais non, pas ainsi. Ce qu’il faudrait faire, c’est d’un côté : laisser les prix libres chez les commerçants propriétaires de leurs propres échoppes. Puis, créer des magasins étatiques de référence avec des prix bas homologués et où on trouverait les denrées de première nécessité à prix bas car subventionnés, et où accèderaient les personnes détentrices de cartes officielles attestant de leurs bas revenus. Comme les magasins SONADIS du temps du régime Diouf commençant, au début des années 80, qui ont hélas périclité pour mauvaise gestion. De ce point de vue, les cash tranfers que sont les bourses familiales de 25 000 frs par trimestre qui touchent 316 000 ménages sénégalais pauvres depuis 2014, sont, à cet égard, une bonne mesure, en direction de qui doit en bénéficier et non de tout le monde, sans distinction de revenus. Car, non, nous ne sommes pas à Cuba ou dans un autre pays communiste abusivement dit « République (populaire) », il faut aussi arrêter de fantasmer sur le retour de bataillons de contrôleurs des prix qui sillonneraient les marchés, et qui ne seront jamais assez nombreux et dont les armées hypothétique constitueraient une bureaucratie aussi budgétivore que les prix hauts dénoncés pour les denrées. Les dangers ultimes du blocage des prix, c’est la chasse aux sorcières contre les commerçants, le refus de vente, le marché noir, la rétention des stocks…
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