LE SENEGAL AU GCEF : CONTINUER L’HISTOIRE
Depuis ce 1er mars, le Sénégal est membre observateur du Forum des pays exportateurs de gaz (Gcef). Ce cercle très fermé de vingt pays membres producteurs de gaz soutient les Etats parties à planifier et gérer de manière indépendante leurs ressources
Depuis ce 1er mars, le Sénégal est membre observateur du Forum des pays exportateurs de gaz (Gcef). Ce cercle très fermé de vingt pays membres producteurs de gaz soutient les Etats parties à planifier et gérer de manière indépendante leurs ressources en gaz naturel. Grâce à cette adhésion, le Sénégal pourra asseoir une politique plus transparente et efficace de ses ressources en vue de transformer structurellement notre économie. A travers la stratégie «Gas to Power», notre pays vise l’accès universel à l’électricité d’ici 2026 et la réduction des coûts de production en vue de son industrialisation.
Les ressources gazières découvertes depuis 2014 peuvent et vont changer qualitativement le destin de notre pays. Il s’agit de ressources récupérables estimées à 910 milliards de mètres cubes dont 50% des ressources du champ gazier Grand Tortue Ahmeyim que nous avons en partage avec notre voisine la Mauritanie, en plus des blocs propres de Yakaar-Téranga et Sangomar.
Les hydrocarbures ont fait passer de petites provinces bédouines dans le Golfe à des Etats économiquement prospères et politiquement puissants. Le Qatar aujourd’hui pèse et compte sur la scène internationale grâce à sa puissance financière issue notamment de son gaz. Ce petit pays, qui a la taille d’une grande métropole européenne, est désormais au cœur des dynamiques géopolitiques. L’exemple de Gaza est éloquent, car le Qatar est la seule entité à pouvoir faire le lien entre les belligérants, Israël et le Hamas, en plus des Etats au cœur de la crise, l’Egypte, la France, l’Allemagne ou les Etats-Unis. D’ailleurs, les seules trêves obtenues pour faire passer l’aide humanitaire et libérer des otages ont été négociées et signées à Doha.
Sur la scène internationale, et notamment au sein de la diplomatie multilatérale, chaque pays est censé représenter une voix. Mais il ne faut se faire aucune illusion ; le poids politique est souvent tributaire du poids économique. Donne-moi le poids de ton Pib et je te dirai quelle valeur a ton vote aux Nations unies pourrait-on arguer. C’est sous ce rapport que notre adhésion au Gcef est importante, car elle nous propulse encore plus sur le chemin de l’émergence, gage de prospérité inclusive et durable, mais aussi de poids et de représentativité sur le plan diplomatique. Un pays compte autant qu’il pèse.
J’ai déjà relevé dans ces colonnes les «bonnes notes diplomatiques de Macky Sall». Cette adhésion au Gcef en est une autre, tant elle caractérise un leadership, une vision et une ambition pour notre pays. Ceux-ci vont au-delà des mandats, des arguments juridiques, des péripéties constitutionnelles et du vacarme ambiant. Avoir l’ambition d’inscrire durablement notre pays sur la carte géopolitique mondiale relève de cette mystique républicaine qui promeut l’intérêt national au détriment des postures, de la politicaillerie et des bravades sur fond de manipulation. Cette ambition rend dérisoires voire pittoresques certaines images que relaient la presse et les réseaux sociaux, qui jamais ne permettent une élévation à la dignité et la décence que confère l’exercice de l’Etat.
Comme dans toutes les organisations internationales dont nous sommes membres, le Sénégal jouera un rôle majeur au sein du Gcef. Nous avons des ressources humaines compétentes et une tradition diplomatique forte.
Le Président Sall a eu raison de souligner que nous y défendrons «la juste rémunération de la ressource gazière dont la consommation mondiale a atteint environ 4089 milliards de mètres cubes en 2023 et une transition énergétique juste et équitable»
Le Sénégal, à l’instar des autres pays africains membres, promouvra une exploitation sans fard des ressources naturelles pour garantir l’industrialisation du continent et relever le défi de l’emploi, de l’inclusion sociale et de la souveraineté énergétique. Pour rappel, 600 millions d’Africains n’ont toujours pas accès à l’électricité, qui est un droit fondamental. Notre ambition de progrès se heurtera à la pression et au chantage des grandes puissances sur le climat. Et c’est là où le leadership politique et le sens de la responsabilité historique commanderont d’agir dans le sens des intérêts vitaux du Sénégal. Le Président Sall est sur le départ, en laissant un bilan économique et diplomatique exceptionnel, mais le Sénégal est appelé à continuer car nous ne sommes en ce moment que les légataires et les continuateurs d’une histoire longue et vieille héritée de nos pères fondateurs. Adhérer au Gcef est un grand pas franchi par le gouvernement. Il incombe à ceux qui arrivent d’en assurer la pérennité tout en défendant partout et quelles que soient les vicissitudes de la vie politique interne le prestige du Sénégal ainsi que la finesse et la puissance de son outil diplomatique.
En devenant membre observateur du Gcef, le Sénégal du Président Sall perpétue une tradition de présence là où les grandes questions du monde se discutent. C’est ça le Sénégal, différent de celui que veulent imposer les oisifs errants et les personnages grossiers, volubiles et vulgaires des plateaux télé et des réseaux sociaux
Le prochain régime devra poursuivre l’histoire afin que celle-ci soit toujours porteuse de grandes transformations. L’Etat est une continuité vers un horizon commun, celui de tous les possibles dans le respect des fondamentaux de l’Etat et de la République, et dans le souci d’être un phare de la lumière et du progrès social.
Grâce à nos ressources pétrolières et gazières, notre pays peut, en plus de son poids politique, devenir une puissance économique capable de peser davantage dans une géopolitique mondiale complexe, incertaine et porteuse des germes du meilleur, mais surtout du pire.