MULTIPLE PHOTOSPOUR UNE RÉPONSE COMMUNAUTAIRE AU COVID19
Il nous revient de comprendre les challenges que notre mode de vie et notre situation socio-économique nous pose comme autant de défis, et adapter notre réponse pour la prévention de la contagion
Dans la situation de pandémie du Coronavirus, le Sénégal doit trouver des moyens rapides, efficace et en phase avec les ressources nationales pour faire face à l’épidémie de Coronavirus. Il nous revient de comprendre les challenges que notre mode de vie et notre situation socio-économique nous pose comme autant de défis, et adapter notre réponse pour la prévention de la contagion.
Malgré les efforts de sensibilisation, les mesures sanitaires et sécuritaires considérables, entreprises par le gouvernement, le niveau de mobilisation de la population n’est pas encore à la hauteur des risques sanitaires et des enjeux économiques.
C’est pourquoi en prolongement du train de mesures arrêtées par les autorités et dans le même esprit, je viens contribuer à l’action menée par le comité COVID 19, en proposant les mesures suivantes, car elles sont à mon avis totalement exécutables sur l’ensemble du territoire national – plus de 80% - et ce, quel que soit le niveau de revenus des habitants.
L’exécution de ces mesures doit être d’abord et avant tout communautaire et devrait être soutenue par la loi, pour amener la population à s’approprier définitivement ces changements, qui appellent adhésion et participation des citoyens, suscitant une réponse massive, populaire et efficace pour freiner l'évolution de l'épidémie et maintenir un niveau d'activité économique raisonnable.
Comment convaincre les populations, qu’elles doivent adopter des règles qui ne sont en rien des contraintes mais des nécessités, lesquelles deviendront du fait de leurs applications systématiques, des gestes naturellement intégrés au quotidien des sénégalais.
- 1-Le port du masque alternatif lavable en tissu doit être rendu obligatoire sur la voie publique et au travail sur l’ensemble du territoire. (Cette mesure peut être réalisable en une quinzaine de jours)
- 2-Nous devons rendre obligatoire la présence d’un lave-mains devant chaque maison et chaque entreprise et ce sur tout le territoire national. En poussant chacun à trouver une solution adaptée à ses ressources.
- 3-Nous devons isoler les anciens et les personnes à risque. Ce qui est déjà partiellement le cas dans la plupart des maisons et renforcer la sécurité sanitaire de leurs personnes contact.
- 4- Nous devons lancer des campagnes massives de changement de comportement pour soutenir toutes les décisions prises ci-dessus et expliquer celles prises précédemment comme la distanciation sociale, le couvre-feu, la toux dans le coude et le lavage des mains, ainsi que les comportements à risques à abandonner en urgence comme notre tendance à cracher et à partager des verres d’eau ou de thé.
Quels sont les leviers que collectivement et rapidement nous devons actionner ?
D’abord initier en urgence la production en masse du masque alternatif lavable communautaire de protection mutuelle
En ce qui concerne les masques, nous avons la chance infinie d’avoir dans tous les quartiers de toutes les villes du pays des tailleurs qui sont des virtuoses de l’aiguille ! L’association des Couturiers, Créateurs et Tailleurs du Sénégal (CCAS) compte 300 000 membres…
Si chacun de ces tailleurs peut se mettre à fabriquer des masques de protection à vendre aux populations … Nous pourrions trouver une réponse locale pour ralentir la transmission surtout pour les populations qui doivent continuer à avoir une activité quotidienne.
L’idée c’est de fournir 2 masques au moins par personne pour pouvoir les laver d’un jour sur deux avec de l’eau javellisée et du savon.
Des patrons sont disponibles sur internet dont celui recommandé par l’AFNOR (Agence Française de Normalisation) et peuvent être distribués aux tailleurs, lesquels formés, peuvent atteindre facilement une production de 100 masques par jour, en ayant rationalisé le patronage, la coupe, les coutures des plis et les élastiques.
Concrètement, 300 000 tailleurs produisant 100 unités par jour proposeraient 30 millions de masques lavables à terme ! Et la généralisation progressive du port de ces masques aura un effet entraînant, lorsque l’on sait que nos comportements sont souvent grégaires.
Et sauce sur le couscous, c’est un « win win win win » qui permet en plus d’utiliser les forces économiques du pays concentrées au cœur des quartiers et qui vont pouvoir avoir de nouveaux pour éviter la précarité, qui aurait pu être leur sort en l’absence des fêtes de Pâques et de la Korité compromises.
15 jours suffisent pour que cette dynamique « imprime » les esprits et s’impose à force de pédagogie et de bon sens partagé dans toutes nos langues, en favorisant l’exemplarité, vu que pour nettoyer correctement un escalier, il convient de le faire en allant du haut vers le bas. Le rythme de cette dynamique obéira à plusieurs phases, d’un exemplaire nécessité.
-Phase 1 : Tous les fonctionnaires auront l’obligation de porter un masque dans l’exercice de leurs fonctions.
-Phase 2 : Toutes les entreprises doivent rendre le port du masque obligatoire sur leurs lieux de travail.
-Phase 3 : Le port du masque doit être obligatoire dans l’espace public.
-Phase 4 : L’absence de masque peut être sanctionnée, allant progressivement du rappel à l’urgence sanitaire à une amende dissuasive, la rareté des masques n’étant plus une excuse.
Quels sont les bénéfices directs ?
Cette mesure ne coûterait rien à l’Etat et la communication pourra inciter des gestes de solidarité de citoyens à citoyens pour la distribution de masques à l’usage du grand public, et l’Etat pourra ainsi se concentrer sur le renforcement des capacités hospitalières et le suivi des malades.
Il convient de noter que le CDC américain vient de recommander l’usage de masques artisanaux le 4 avril 2020 tout en rappelant que les masques chirurgicaux doivent être réservés aux personnels soignants.
Ensuite favoriser la mise en place systématique de lave-mains communautaires.
De la même façon nous devons encourager les citoyens à mettre devant leur porte d’entrée un système de lavage de main avec du savon. Aussi bien pour les maisons privées que pour les entreprises dans les zones urbaines où la majeure partie de nos concitoyens vont devoir continuer à aller et venir dans la rue.
Les réponses sont déjà nombreuses et créatives et très peu chères, et permettront à tous de se laver les mains très régulièrement partout et tout le temps avec de l’eau légèrement javellisée et du savon.
Ce dispositif permet de se laver les mains systématiquement avant de rentrer dans une entreprise ou dans une maison quand on vient de l’extérieur. La répétition devient habitude. En plus, en responsabilisant les citoyens et en leur donnant le sentiment qu’ils sont acteurs de la protection communautaire, ils intégreront ces gestes de solidarité responsable, de manière généreuse : « Je te donne les moyens de te laver les mains quand tu passes devant chez moi et si tu fais de même, quand d’autres passeront devant chez toi, ils pourront également se laver les mains. »
Etant donné la prise en charge par l’état des factures d’eau pour la tranche sociale la plus populaire pour les 3 prochains mois, cette mesure devrait pouvoir être acceptée par la population, générant naturellement une émulation saine entre voisins. Les ASC, les Badienou Gokh et autres ressources communautaires devront être mises à contribution.
Il faudra enfin décider de l’isolation des personnes à risque au sein des maisons.
Au Sénégal, il est très courant de voir plusieurs générations cohabiter dans la même maison. Ce qui représente un risque accru face à cette épidémie.
Par contre, nous devons noter que dans la majorité des cas, ces anciens, jouissent généralement d’une chambre isolée, qu’ils mangent seuls et qu’en tout cas, on les traite déjà avec beaucoup d’égards et avec une communication particulière qui permettra de transformer la porte de leur chambre en sas de sécurité, qui oblige de porter le masque et de se laver les mains quand on leur apporte à manger.
Il faudra surtout dérouler des campagnes massives de changements de comportements.
Il est souhaitable pour renforcer le respect des gestes barrières déjà mis en place, mais pas forcément compris, mettre en place une communication de masse pour induire un nécessaire changement de comportements, en utilisant tous les canaux qui permettent de vulgariser les gestes de précaution et d’imposer naturellement à la population et d’une manière claire, la nécessite et l’utilité de ces gestes barrières. Il sera judicieux de diffuser dans l’opinion le caractère démocratique du Covid-19, en ce sens que tout le monde peut le contracter, et que la grande majorité en guérit si le processus de soins est rapidement enclenché. Pour cette raison il est urgent de convaincre les concitoyens que le Covid-19 n’est pas une maladie honteuse et qu’être dépisté « positif » et se soumettre aux soins d’observance comme de rémission est une opportunité pour la personne infectée comme pour son entourage de ne pas en subir les désagréments voire les complications. Avoir une attitude responsable face à des symptômes inquiétants sera de haute portée citoyenne.
En qualité de Directrice de l’agence EXP, entourée de partenaires engagés et forts de multiples expériences de marketing social, je suis convaincue que le Sénégal se sortira de cette crise sanitaire, parce que sa population « fera nation », et qu’aucun des talents qui fourmillent d’idées dans ce singulier pays, ne sera de trop, pour vaincre le Covid-19, mais surtout pour essaimer dans nos villes et nos campagnes des comportements novateurs et salvateurs.
« Soyons Solidaires, changeons ensemble nos habitudes, et nous vaincrons le coronavirus ! »
Marianne Marguerite Bathily est spécialiste de la communication pour le changement des comportements et en Marketing social dans l’Afrique de l’Ouest francophone. Elle dirige EXP, une agence de Marketing et d’activation Terrain basée au Sénégal et travaillant aussi en Côte d’Ivoire et en Guinée Conakry depuis 20 ans.