MA MALADIE, MES TROIS MARIAGES, MES DEUX DIVORCES…
Palabres avec … Juliette AITA BA, journaliste et présentatrice
3 -2-0 ! Ces trois chiffres cachent une réalité plus que douloureuse chez la journaliste-présentatrice Juliette Bâ qui a eu trois (3) mariages dont deux (2) divorces et zéro (0) enfant. Personnalité publique et professionnelle jusqu’à la profondeur de la voix, elle souffre de la maladie de l’endométriose. Une pathologie rare, gênante, douloureuse et très stressante qui touche l’intimité de la femme et installe le couple dans des difficultés financières, des problèmes d’instabilité, d’épanouissement, de bien-être et où on espère rarement l’arrivée d’un bébé. C’est l’histoire de cette charmante dame de 43 ans qui, malgré quatre opérations chirurgicales et quatre fécondations In vitro, « ça ne roule toujours pas » dans son intimité et sa vie de couple. Mais « ça roule » tout de même sur Tv5 Monde, du nom de l’émission qu’elle anime à Tv5 Monde et « Génies en herbe » sur Rti (Radio-télévision-Ivoirienne). Très joviale et toujours souriante, Juliette fait pourtant face depuis 30 années à des douleurs atroces, des errances médicales et une lutte continue contre l’infertilité. A un certain temps, dit-elle, le mot endométriose lui faisait un pincement au cœur, mais aujourd’hui, elle a réussi à accepter sa maladie pour un meilleur épanouissement. D’où la création des espaces d’échanges sur l’endométriose comme l’ENDO MIEUX-ÊTRE et l’ANEDO-MIEUX-ÊTRE pour amener les filles et les femmes à mieux comprendre et mieux vivre leur maladie.
Juliette, vous êtes connue des Sénégalais. Peut -on cependant en savoir plus sur votre trajectoire ?
J’ai 43 ans. Je suis journaliste de formation, animatrice télé et radio. Je suis également coach de mieux-être certifié en rééquilibrage alimentaire et en perte de poids et professeur de Yoga. J’ai longtemps travaillé pour les médias au Sénégal. J’ai commencé à Sud Fm radio de 1995 à 2002 comme animatrice de la matinale « Kinkelibah », puis j’ai intégré la rédaction comme journaliste- reporter pour présenter les éditions du matin et du soir. Ensuite, je suis allée travailler un peu à Tract, -un quotidien sénégalais-, où j’écrivais des papiers sous le Pseudo de Doc Gényco avant d’aller en France pour une année et revenir au Sénégal pour avoir été sollicitée par la 2Stv où j’ai présenté le premier magazine sportif, « Sports 2S » présentée par une femme avant d’être nommée directrice de la rédaction. Donc j’ai monté la rédaction de 2stv en 2004. Quelques temps après, je suis allée à Nostalgie Dakar. C’était en 2006. J y ’animais deux émissions de Radio : « En Filigrane » et Calianté », puis à la Rts où j’ai présenté le journal de 13 heures et le matinal « Kinkélibah » en 2008. Trois ans après, en 2011, j’ ai intégré Africa7 où je présentais « 7 matin » avant d’aller en Côte d’Ivoire en 2014 où j’ai présenté d’abord « Super Morning » sur Nostalgie Abidjan en 2015 et « Génie en herbe » que je continue d’ailleurs de présenter de même qu’une autre émission sur Tv5 monde d’Auto et de découverte qui s’appelle « ça Roule ». Et à côté de ça, j’ai passé entre autre, un diplôme de professeur de Yoga en 2010. Depuis lors, j’accompagne les gens dans le mieux-être sur tout ce qui est gestion du stress, perte du poids, yoga, relaxation, rééquilibrage alimentaire, trouble digestif et j’ai aussi un programme spécial pour toute les personnes qui souffrent d’endométriose et d’adénomyose basés sur des méthodes naturelles pour les aider à faire face aux traitements qui sont très lourds.
Le terme endométriose, rien qu’à l’entendre, que ressentez-vous sur le plan psychologique ?
Quand j’entends le terme endométriose psychologiquement, c’est de quoi il s’agit. Il y a quelques années, cela me faisait toujours un pincement au cœur parce que cela symbolisait le mal-être, toute la souffrance et toute la détresse dans laquelle je pouvais me trouver. Aujourd’hui, quand j’entends ce terme médical, je pense à ce tout ce que j’ai pu accomplir, à tout ce que j’ai pu vivre. Il faut dire que cette maladie m’a ouvert des portes du Yoga, lutter contre la souffrance silencieuse pour pouvoir tenir bon, malgré les saignements, les douleurs. J’ai toujours eu des règles douloureuses. Dès mes premières règles à l’âge de 14 ans, j’ai eu des douleurs atroces. C’était en 1990. Cela fait à peu près 30 ans que je vis avec cette maladie.
On a appris que vous avez connu trois mariages, deux divorces et que vous n’avez jamais eu d’enfant malgré votre désir d’en avoir. Comment vivez-vous cette situation ?
Trois mariages, deux divorces et zéro bébé. Je pense que j’ai souffert parce que j’avais une maladie, des douleurs, des saignements, j’étais en détresse physique et psychologique. Je pense que mes ex -maris ont souffert aussi. Parce que quand tu te maries avec une femme que tu rencontres, que tu courtises avec qui tu as envie de faire un bout de chemin, tu n’es pas prêt à aller affronter cette maladie-là. Au début, je ne savais pas que j’avais une endométriose. Quand je sentais des douleurs, lors de la survenue des règles, je prenais des pilules qui apaisaient la douleur. Mais je l’ai découvert quand j’ai voulu faire un enfant. J’ai arrêté la pilule et c’est en ce moment-là que l’endométriose a flambé. J’ai eu de plus en plus de douleurs, de saignements et je ne devenais pas enceinte. Il a fallu que je consulte… Et voilà, au bout de 7 à 8 années de douleurs, on a enfin trouvé ce qui s’est passé, on a découvert l’endométriose. Face à ces douleurs, ces saignements, la maladie et l’infertilité, au bout d’un moment le Monsieur se bat en courant. Il s’en va… C’est compliqué pour lui de gérer cela parce qu’il ne s’y est pas préparé. C’est quelque chose de tabou qui n’est pas évident à gérer. Surtout on ne sait pas où l’on va. A un moment, il y a un essoufflement qui est compréhensible et la personne va voir ailleurs en espérant trouver une femme moins compliquée à gérer. Toujours sur la vie de couple, il y a aussi une incidence sur la libido, sur la vie sexuelle, la vie intime du couple. Avoir des rapports sexuels douloureux et qu’en même temps on saigne, c’est presque impossible. Et puis aussi, il y a l’infertilité à gérer : le fait que ce bébé ne vient pas. Et on sait en Afrique comment cela se passe.
Pour l’arrivée d’un bébé Avez-vous essayé des traitements voire la fécondation In Vitro ?
J’ai subi quatre interventions chirurgicales, deux cœlioscopies (avec trois petits trous, deux pour les instruments chirurgicaux et un pour la caméra microscopique » et deux laparotomies (une vision comme pour une césarienne). Ce sont des techniques chirurgicales. Il y a aussi le decapeptyl pour la ménopause chimique. J’ai fait aussi quatre fécondations in vitro mais cela n’a pas marché. Tout cela pour dire que l’intervention chirurgicale ne garantit pas la guérison puisque la maladie est récidive et puis la fécondation in vitro ne garantit pas aussi l’arrivée d’un bébé. Il n’y a pas 100% de réussite. Au contraire c’est 20% et c’est très peu.
Apparemment la maladie installe la fille ou disons le couple dans la précarité vue le coût très onéreux de la prise en charge ?
Côté finance, cela dépend du traitement que vous suivez.
Au début, quand vous être sous pilule en continue, ce n’est pas forcément des traitements très lourds en finance. En revanche, une intervention chirurgicale coûte très chère quand cela n’est pas pris en charge par votre travail. Et puis, le traitement est beaucoup plus lourd comme des ménopauses chimiques, une injection qui va durer trois mois et qui coûte environ 400 000 francs. Donc il faut les avoir. Aujourd’hui, je n’ai plus de traitement. Je me soigne avec des plantes, une alimentation saine et équilibrée, avec le Yoga, les cataplasmes, les ventouses. Je me soigne pratiquement qu’avec des méthodes naturelles. Il y a des choses qui coûtent chères comme les compléments alimentaires et certaines tisanes. Tout est relatif. Cela dépend de votre choix. Toujours pour les dépenses, quand on prend des médicaments, cela reste un coût. Tous les mois, il faut acheter des anti-inflammatoires, des antalgiques, anti spasmodiques, et parfois il faut être hospitalisée. Tout cela c’est des frais médicaux.
Une maladie qui touche l’intimité avec des saignements et des douleurs qui indisposent la personne tous les mois. Comment avez-vous réussi, pendant 30 ans, à allier la vie-privée et à la vie professionnelle pour bien tenir le coup?
Je pense que côté vie privée et vie professionnelle, les astuces pour bien tenir le coup, je pense que la première, c’est l’acceptation de la maladie. Il faut savoir ce qu’on a et ne pas souffrir. Car souffrir comme ça sans savoir ce que l’on a, c’est la pire chose qui peut arriver à une femme. Il faut aller consulter un médecin. Ce que je trouve important. Et une fois le diagnostic posé, il faut accepter que ce soit une endométriose et il faut se renseigner pour être suivie par un bon médecin qui s’y connait en endométriose. Il faut avoir le bon protocole, que ce soit l’intervention chirurgicale, la mise en ménopause artificielle ou le suivi de traitement artificiel. Parfois, il faut se faire aider et être sûre que c’est le traitement qui vous convient. C’est cela qui vous permettra de diminuer les douleurs, les saignements et d’avoir au maximum une bonne qualité de vie. Pour le côté professionnel, quand on saigne, il faut gérer, essayer d’avoir des collègues en qui vous avez confiance pour les mettre au courant. Il ne faut pas le cacher en fait. Il faut le dire au moins deux à trois personnes dont votre responsable pour que quand vous vous absentiez, qu’il comprenne que ce n’est pas parce que vous vous amusez. Mais que vous êtes malade et vous ne pouvez pas venir travailler. Quand vous demandez des toilettes spéciales, il faut qu’on vous les donne parce qu’on ne peut pas aller dans des toilettes mixtes quand on saigne beaucoup, où cela pue, où on pisse où il y a partout du monde. Il faut un minimum d’intimité, de confort, de propreté parce que ce n’est pas une situation très agréable.
En parallèle à votre métier de journaliste, vous êtres très active sur les réseaux sociaux notamment sur vos pages qui traitent des questions d’endométriose. Pourquoi justement la création de ces espaces ?
J’ai créé une chaine Youtube en 2013 qui s’appelle « Mademoiselle Endo, vivre avec l’endométriose » parce que je me rendais compte qu’il n’y avait pas grand-chose sur l’endométriose sur les réseaux sociaux et que j’avais aussi envie de partager mon expérience. Ensuite j’ai créé le groupe facebook « Endométriose, Adénomyose Afrique ». L’Adénomyose c’est quand on a de l’endométriose dans le muscle utérin et c’est encore plus grave que l’endométriose. Parce qu’en plus des règles, on saigne en dehors des règles. Entre deux ou trois semaines, tous les mois. Donc c’est un groupe de paroles, de soutien, d’échanges. J’ai créé aussi le groupe « Infertilité et désir d’enfant » parce que c’est directement une des conséquences de l’endométriose le plus souvent. Et puis j’ai créé ce groupe « Endo-mieux-être et Adeno-Mieuxêtre »qui permet aux filles qui sont intéressées par un traitement naturel de pouvoir bénéficier de nos coaching mieux-être où je les accompagne pour qu’elles aient une qualité de vie plus intéressante, plus adéquate, et plus confortable. Je travaille avec le Yoga, la relaxation, les plantes, les tisanes, les massages, les ovules d’argile, de manger sainement, une alimentation anti inflammatoire, beaucoup de choses que j’ai mis en place. Ce groupe, parce que les traitements sont très lourds, va permettre aux filles d’avoir une alternance naturelle.