ÉPINGLÉS PAR LES AUDITS, ILS MIGRENT VERS LE…MASAÏ MARA
D'anciens cadres du régime déchu, des hommes d'affaires et des politiciens aux parcours troubles se pressent aux portes du Pastef. Tel un aimant irrésistible, le parti de Diomaye-Sonko attire désormais ceux qui le combattaient férocement hier
Les uns sont des opportunistes ou des hommes d’affaires qui cherchent partout des privilèges et avantages personnels qu’offre le sommet de l’Etat. Les autres, d’anciens dignitaires, hauts fonctionnaires et autres politiciens aux mains sales épinglés par les audits des corps de contrôle de l’Etat. Un à un, ces drôles de politiciens migrent honteusement vers les prairies Diomaye-Sonko où pousse l’herbe d’Etat. Des paturages où l’eau, le pétrole et le gaz coulent aussi à flots ! Ce triste phénomène nous renvoie à la grande migration des zèbres, gnous et gazelles de la savane de Serengeti (Tanzanie). Traqués par les félins du Pool judiciaire financier (Pjf) et assoiffés par la perte du pouvoir, ils cherchent refuge dans les prairies luxuriantes du Masaï Mara.
Ils ont pour noms : Mame Boye Diao, Samba Ndiaye, Doura Baldé, Déthié Fall, Elhadj Malick Gaye et autres, car la liste est longue. Et elle sera encore beaucoup plus longue. Ces drôles de politiciens, hommes d’affaires, anciens dignitaires et hauts fonctionnaires ont choisi la bonne période des pluies électorales pour migrer vers les abondantes prairies de Pastef. Un environnement politique riche et prospère où pousse l’herbe d’Etat. Sans oublier l’eau, le pétrole et le gaz qui coulent à flots ! A l’image des oiseaux migrateurs, ces politiciens d’un genre particulier ont le sens incroyable de l’orientation financière et de l’impunité.
Et si le terme « transhumance » appartient au lexique pastoral, c’est parce qu’il est lié aux animaux. Car il désigne la migration des troupeaux de bétail d’un endroit à un autre à la recherche de pâturages offrant plus d’herbes et plus de chances de vie. Ou alors de survie ! En sciences politiques, enseignants et étudiants entendent par là c’est-à-dire « Transhumance », le comportement de l’homme politique qui quitte son parti ou son groupe pour rejoindre un autre pour des intérêts purement personnels. La preuve par l’immense parc sauvage de Serengeti situé en Tanzanie où se déroule la plus grande et spectaculaire migration animale au monde. En effet pour échapper à l’enfer des félins (lions et tigres), zèbres, buffles et antilopes font la périlleuse traversée de la rivière « Mara » infectée de crocodiles pour rallier les réserves naturelles du « Masaï Mara » (Kenya).
Au Sénégal, il s’agit des points d’eau du Pastef où d’anciens dignitaires assoiffés et affamés par la perte du pouvoir et épinglés parles audits des corps de contrôle de l’Etat commencent à rejoindre le Pastef.
Selon Dr Momar Thiam, expert en communication politique, il est vrai que Ousmane Sonko, hier opposant farouche au régime de Macky Sall, était un pourfendeur strict du phénomène de transhumance politique. « Devenu tout puissant Premier ministre et tête de liste de Pastef, il fait face à des ralliements et soutiens de tous bords. Et parmi ceux-là, il y a des personnalités de la majorité sortante. Ce qui contribue à s’interrogersur le rejet d’alors de la transhumance politique par le Pastef dans l’opposition. C’est peut-être problématique sur le principe, mais compréhensible dans sa dynamique actuelle compte tenu des enjeux de ces législatives » a-t-il expliqué. Spécialiste en communication politique, Dr Thiam semble relativiser le phénomène de la transhumance qui intervient dans un contexte électoral « Une période cruciale où le Pastef a besoin d’une bonne majorité écrasante à l’Assemblée nationale afin de dérouler son projet de gouvernement sans obstacle. Donc la formation Diomaye-Sonko ne peut se permettre de refuser des soutiens de tous bords, même ceux émanant d’anciens tenants du régime déchu. On est en politique, Ousmane Sonko et son bureau politique ne peuvent refuser des voix etse détourner de mains tendues. L’essentiel est de rassembler et de multiplier ses chances de victoire éclatante. Cela dit, c’est après les élections que toute cette problématique sur le principe de rejet de cette transhumance pourrait connaître une nouvelle tournure autour de deux questions essentielles. Quel sera l’apport de ces soutiens et ralliements et pour quels résultats attendus ? Ensuite, quel sort (politiquement parlant) leur sera réservé (gains politiques et disgrâce latente)? » s’interroge Dr Momar Thiam qui fut le premier conseiller politique du Président de la République Me Abdoulaye Wade.
Ces nomades aux « troupeaux » mal acquis…
Notre éminent professeur de communication semble oublier de préciser que le phénomène ne peut point être analysé du seul point de vue du rapport entre électeurs et élus. Parce que la transhumance politique est avant tout un désastre susceptible d’éroder tout le système démocratique en ce qu’elle dénature la tache initiale de l’élu et dénude la confiance de ses militants et sympathisants. En quittant honteusement les partis et coalitions de l’opposition pour le parti au pouvoir (Pastef), les équilibres politiques nécessaires pour le bon déroulement de la vie démocratique se trouvent ainsi sacrifiés en faveur de quelque acquis matériels et sociaux. Et surtout, surtout au détriment de la politique de la reddition des comptes où certains nomades aux « troupeaux » mal acquis cherchent à faire émousser l’arme du Pool judiciaire financier (Pjf).
Pour Serigne Fallou Dieng, Président du Cercle des intellectuels soufis du Sénégal, les Sénégalais attendent la reddition des comptes pour voir le sort réservé à ces transhumants aux mains sales. « Mais quoi qu’il en soit, la transhumance est un fléau politique des années fâcheuses dont les fruits n’ont jamais tenu la promesse d’un parti constant et dynamique. Avec Pastef, personne ne croyait à un retour en force de la transhumance. Ce n’est pas seulement la honte mais le reniement. C’est abjurer les principes d’antan et transiger avec les principes sacro-saints. Mais dans cette optique il me paraît nécessaire de dissocier la mise à contribution des compétences techniques et intellectuelles de la transhumance politique opportuniste. Plus clairement, c’est un terrain favorable pour le développement de la corruption et de l’immoralisme politique » se désole notre guide religieux et fervent défenseur d’Ousmane Sonko.
Oui à des technocrates !
Mouhamed Togola, membre très influent de Pastef/Washington Dc abonde dans le même sens que Serigne Fallou Dieng là où il invite à dissocier la mise à contribution des compétences techniques et intellectuelles de la transhumance politique opportuniste « D’abord, permettez moi de rappeler que le Pastef incarné par notre leader charismatique Ousmane Sonko est un phénomène qui dépasse les frontières sénégalaises. Même ici aux Etats Unis d’Amérique (Usa), les autorités politiques et professeurs-chercheurs en sciences politiques s’intéressent au Sénégal grâce à Ousmane Sonko. Donc en matière de détermination politique, de mobilisation de masse, de cotisation financière et de courage politique, les Patriotes d’Ousmane Sonko n’ont plus à rien à prouver. Dans tous les domaines, le Pastef a déjà fait ses preuves. Justement pour vous dire que ces transhumants ne peuvent rien apporter à Pastef. Je ne les considére pas comme des transhumants puisqu’ils sont venus après les investitures. En effet, je suis convaincu que le Président Diomaye et son premier ministre sachent qu’ils ont plus besoin de brillants cadres apolitiques voire des technocrates que des politiciens obsolètes » explique ce patriote joint au Maryland (Usa).
Alors que nous sommes encore à une semaine du scrutin, un vent de recrutement politique continue encore de souffler sur le paysage politique sénégalais. Il ne se passe pratiquement pas un jour sans qu’on n’apprenne des « défections » de militants de tel ou tel parti au profit de Pastef la principale formation politique au pouvoir. Mais pour de nombreux cadres de Pastef, c’est peine perdue puisque le Pastef tout seul peut soulever la montagne du 17 novembre prochain.