LA CLÉ DE LA STABILITÉ SÉNÉGALAISE
Alors que l'insécurité gangrène le Sahel, comment le Sénégal y échappe-t-il ? Selon l'universitaire Papa Fara Diallo, son secret résiderait dans une politique de dialogue avec ses voisins immédiats
La politique de bon voisinage développée par le Sénégal depuis plusieurs années impacte sur la stabilité du pays et explique qu’il soit épargné jusque-là par les ”menaces” liées à la criminalité transfrontalière, estime l’universitaire Papa Fara Diallo.
“Le Sénégal, dans sa politique étrangère, a toujours développé une diplomatie de bon voisinage. Le Sénégal est réputé être un pays stable”, a dit cet enseignant en science politique à l’université Gaston Berger (UGB) de Saint-Louis.
“Si on a cette stabilité, c’est parce qu’on n’a pas de problème avec nos voisins. Donc, on peut avoir une bonne politique de gouvernance sécuritaire, transfrontalière avec nos voisins”, a déclaré Papa Fara Diallo, dans un entretien avec l’APS.
De l’avis du maître de conférences titulaire en Science politique, le Sénégal a une bonne politique avec ses voisins.
La criminalité transfrontalière et les menaces liées au terrorisme sont “très présentes dans le Sahel mais pour le moment, le Sénégal est épargné. Si on a ça, c’est parce qu’on a une bonne politique de bon voisinage”, a-t-il analysé.
Le Sénégal ne veut plus avoir de problèmes avec ses voisins immédiats, comme lors de la crise de 1989 avec la Mauritanie, qui a failli se transformer en “guerre ouverte” entre les deux pays, a souligné Papa Fara Diallo, maître conférences en science politique.
Le Sénégal doit aussi faire avec les “turbulences” dans sa partie sud, frontalière de la Gambie et de la Guinée-Bissau, avec notamment la question de la rébellion en Casamance. D’où la nécessité de faire en sorte que “les menaces transfrontalières ne puissent pas véritablement avoir un impact au Sénégal”.
Il s’y ajoute qu’avec la Mauritanie, où le président Bassirou Diomaye Faye a effectué jeudi sa première visite hors du territoire sénégalais depuis son installation, “on a un contrat d’unitisation pour l’exploitation du pétrole et du gaz, notamment le projet Grand Tortue Ahmeyim (GTA) que nous partageons 50/50 avec la Mauritanie”.
“Donc, c’est un pays voisin contigu au Sénégal mais qui est un allié stratégique pour l’exploitation du gaz et du pétrole offshore”, a fait observer l’universitaire sénégalais, selon lequel le projet GTA est “le plus important et le plus avancé du Sénégal”, en matière d’hydrocarbures.
Un autre élément à prendre en compte dans l’analyse de cette visite concerne les accords de pêche, a relevé Papa Fara Diallo, en rappelant qu’en 2020, “plus de huit pêcheurs” de Guet-Ndar avaient été tués par les garde-côtes mauritaniens parce qu’ils avaient “violé l’espace maritime d’un pays souverain”.
La Mauritanie applique le repos biologique, qui favorise le renouvellement de la ressource halieutique, “contrairement peut-être au Sénégal”, où la surpêche fait que la ressource “devient de plus en plus rare”.
“On a donné beaucoup de licences de pêche à des bateaux étrangers qui viennent pêcher chez nous. Les pêcheurs sénégalais ont vu leurs débarquements journaliers drastiquement baisser depuis 2014. Donc, ils vont suivre le poisson jusqu’en Mauritanie parce que la Mauritanie applique le repos biologique”, dit-il.
Le Sénégal a aussi besoin de négocier avec la Mauritanie sur les accords de pêche, notamment pour les licences, poursuit-il, pour parler de l’importance de la première sortie officielle du président Faye.