LES DERNIERS DÉFIS DU PRÉSIDENT
Pour la première fois depuis 2000, les Sénégalais ont attendu quatre jours pour connaitre les résultats provisoires, les sondages que tous les candidats font faire devraient être enfin autorisés, comme dans les grandes démocraties
La confirmation de la victoire de Macky Sall par le Conseil Constitutionnel, la semaine prochaine, ne devrait être qu’une formalité. Avec les 58,27 % annoncés hier par Demba Kandji, président de la Commission nationale de recensement des votes, le candidat de la coalition Benno Bokk Yaakaar passe largement au premier tour avec plus de 2.554.605 votants, sur un total de 4.383.879 suffrages valablement exprimés.
Soit 58.27% ou presque trois fois le taux obtenu par Idrissa Seck, arrivé 2ème. Depuis janvier 2018, les sondages, qu’il est grand temps de légaliser, le donnaient vainqueur au premier tour de l’élection présidentielle. À cent jours du scrutin, nous annoncions qu’il gagnerait avec 54%. C’est sans surprise donc que nous accueillons les résultats provisoires proclamés hier jeudi 28 février. La surprise est plutôt venue du candidat Ousmane Sonko qui rafle la région de Ziguinchor et se retrouve 3ème avec 687.065 voix, soit en deux ans, plus du double de son score aux législatives.
Si ce bel envol de 15,67% des suffrages se poursuit, il sera roi ou faiseur de roi en 2024 ou 2029, quand il sera dans la force de l’âge, et moins enflammé et péremptoire. Les résultats de Sonko sont d’autant plus élogieux qu’il n’a bénéficié que du soutien de Pierre Goudiaby Atepa et de Boubacar Camara. Toutle contraire de Idrissa Seck qui a embarqué de grands ténors et de grands noms dans sa coalition (Khalifa Sall, Pape Diop, Malick Gakou, Abdoul Mbaye, Hadjibou Soumaré, Bougane Guèye, Hélène Tine, etc.) et qui est arrivé 2ème avec près de 900.000 voix ; triplant ainsi, avec ses 20%, son pourcentage de 2012.
. Tous ces résultats ont été obtenus grâce à la tenue d’un scrutin calme et transparent, quoi que puissent en dire les quatre candidats perdants. Il est devenu impossible de pervertir le vote au Sénégal. Si l’opposition doit se mordre les doigts, c’est d’avoir manqué d’engagement en amont du scrutin lors des inscriptions, lors du retrait des cartes d’électeur, sur la mise à disposition à temps du fichier électoral et sur le parrainage. Elle n’a pas pu ni su imposer un rapport de forces favorable.
Et pourtant Me Mame Adama Guèye avait flairé le coup, mais il n’a été suivi que sur le tard. C’est dire que malgré la bonne organisation de la présidentielle, bien des choses restent à parfaire pour vivre des lendemains électoraux sans contestation. Les sondages que tous les candidats font faire devraient être enfin autorisés, comme dans les grandes démocraties. Notre expérience électorale est tellement grande qu’on devrait arriver à donner les résultats provisoires moins de deux heures après le scrutin. Comme en France.
Les bureaux-tests et les technologies de l’information et de la communication devraient y aider. Le Président Macky Sall, qui entame son deuxième et dernier mandat, ne devrait jamais écouter des thuriféraires qui le verraient bien prolonger son bail avec un 3ème mandat. Il devrait plutôt prendre cette question à bras-le-corps et discuter sérieusement avec l’opposition sur le perfectionnement du processus électoral. Les temps ont changé.
La population est majoritairement jeune et plus éveillée. Et bien des jeunes sont avec Ousmane Sonko; la région de Ziguinchor aussi n’est pas avec lui, tout comme Mbacké-Touba, bastion des mourides. Toutes choses qui devraient le pousser à plus de sagesse et à ne jamais songer à briguer un troisième mandat, du fait d’une interprétation tendancieuse de la Constitution.
Tirant les leçons du dimanche 24 février, Macky Sall doit faire en sorte que ce second mandat l’élève au-dessus de la mêlée et de tous les partis, y compris le sien, l’Alliance pour la République(Apr). Pour bien préparer sa sortie, après avoir bouclé les travaux du si cher Train Express Régional (TER) et d’autres infrastructures.
Avec un regard «attendrissant» pour le Fouta et la région de Tambacounda. La route Ndioum- Ourossogui-Bakel-Kidira est dans un état chaotique. Les travaux de réfection mériteraient d’être accélérés pour soulager les lointaines populations de cette partie du pays. Une des rares à ne pas compter d’université.
La région naturelle de Casamance gagnerait à avoir une ligne de chemin de fer Tambacounda-Ziguinchor pour mieux sortir du désenclavement. Tout comme le Dakar-Bamako devrait connaître une véritable renaissance. Autre grand défi de Macky II, l’emploi des jeunes diplômés et non diplômés. L’implantation d’unités agro-industrielles dans les régions serait une excellente chose. De Richard Toll à Bakel, il n’y a que la CSS comme véritable pourvoyeuse de main-d’œuvre.
Avant de réaliser ces grands défis, il serait salutaire pour le président de la République Macky Sall de gracier voire amnistier Khalifa Sall et ses compagnons, et nouer un dialogue sincère et inclusif avec l’opposition. Une magnanimité qui ne peut qu’être bénéfique pour la paix civile.