LES PREMIERS RATS QUITTENT LE NAVIRE
Depuis la désignation d'Amadou Ba comme candidat, les défections se multiplient au sein du camp du pouvoir. Certains y voient le signe d'un naufrage électoral annoncé, d'autres évoquent des frustrations liées aux nouvelles orientations du Premier ministre
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En septembre dernier, le président de la République sortant Macky Sall a confié le gouvernail du navire battant pavillon « Bby » à son Premier ministre Amadou Ba pour le conduire à bon port, c’est-à-dire à la présidentielle 2024. Malgré l’expertise managériale du nouveau capitaine, qui est chevronné et rassembleur, des rats quittent le navire les uns après les autres depuis sa désignation ! Des rats et pas des moindres puisqu’il s’agit de gros rats (ministres, anciens ministres, députés, directeurs de société, conseillers spéciaux et autres hauts cadres de l’Apr) comme s’ils avaient flairé un naufrage électoral. Pendant ce temps, les rats artistes, rats chanteurs et rats flagorneurs, qui durant 12 ans de traversée ont joué à fond la musique « Macky Dolima », se la « jouent » douce aujourd’hui le temps d’être orientés par la boussole financière.
Après 12 ans de traversée festive à bord du navire gouvernemental battant pavillon « Bby », le capitaine Macky Sall a finalement échoué dans sa tentative de prendre un troisième cap vers la présidentielle de 2024. Cette décision de « non-troisième » mandat a poussé le président de la République sortant Macky Sall à confier le gouvernail de son gigantesque, juteux et à l’équipage pléthorique à son chef du gouvernement Amadou Ba. A bien des égards, il est le mieux placé comme coach et capitaine pour maintenir le navire dans une mer très agitée afin de le conduire à bon port. C’est-à-dire les rivages de la présidentielle de février 2024. Malgré l’ouverture, l’assurance technique et l’expertise managériale du capitaine Amadou Ba, les rats quittent le navire ! Dans le lot des premiers départs, ceux qui espéraient être ministre ou Premier ministre dans son nouveau gouvernement. Un cadre en service au ministère du Commerce et de la Consommation, dirigé par Abdou Karim Fofana, dit s’attendre à d’autres défections compte tenu du mauvais système de gouvernance et de la politisation de l’administration centrale par les partis. Une politisation qui fait l’objet d’un débat permanent au sein de la fonction publique. « Et à chaque alternance du pouvoir, le débat s’amplifie au grand dam des conseillers techniques et hauts cadres qui ne seront jamais promus ministres alors qu’ils sont les chevilles ouvrières des départements ministériels. La preuve par le ministère du Commerce où le ministre a tout chamboulé pour des raisons politiques. Il ne s’occupe pas du ministère, plutôt il met en avant son statut de porte-parole pour avoir plus de visibilité politique. Ce qui justifie les nombreux échecs de la politique sociale de baisse des prix des denrées alimentaires. Car le prix d’aucun produit n’a connu une baisse, au contraire tout a augmenté » se désole ce fonctionnaire. Avant de s’emporter : « Malheureusement, pour être ministre au Sénégal, il faut faire de la politique politicienne ou s’activer dans des manœuvres médiatiques sur fond de grande gueule ! Je connais de hauts responsables politiques, hauts cadres de l’administration centrale et membres de Benno Bokk Yakaar (Bby) qui vont attendre la validation des candidatures par le Conseil constitutionnel pour mieux choisir et quitter la baraque » annonce-t-il mystérieusement.
Notre interlocuteur a sans doute dû oublier que d’autres « gros rats » s’adonnent aux jeux de trous en cas de deuxième tour au regard de la position des candidats. Ainsi, ils vont se tailler des croupières, et jouer aux faiseurs de roi, en se rangeant derrière le candidat le mieux placé.
Intelligents et bons nageurs, selon les experts navigateurs, les rats pressentent les catastrophes et se jettent à l’eau avant que le bateau ne coule. Une expression employée pour désigner les lâches et les traitres qui abandonnent leurs compagnons dans des moments difficiles. Justement, le navire « Bby » conduit par un équipage « Apr » semble être dans cette situation de détresse. Les gros rats y occupant des fonctions de ministres, députés, directeurs de société, conseillers spéciaux et autres hauts cadres de l’Administration sont les premiers à le quitter après s’être très bien servis et enrichis durant la longue traversée de 12 ans. Sans oublier l’orchestre des rats constitué d’artistes, de chanteurs et flagorneurs qui, durant toute cette période, ont joué à fond l’air du « Macky Dolima » et se la « jouent » douce aujourd’hui le temps d’être orientés à nouveau par la boussole financière des candidats en lice. Pourtant, le mariage en croisière était pour le meilleur lorsque le président Macky Sall prêtait serment pour devenir le quatrième président de la République du Sénégal indépendant. Une installation à la magistrature suprême à la suite du passage d’un ouragan électoral ayant coulé le navire du Parti démocratique sénégalais (Pds).
Au souvenir, le paquebot « Sopi » !
Un paquebot majestueux dont tous les météorologues et autres prévisionnistes politiques avaient juré qu’il allait résister pendant « 50 ans » à tous les vents, marées, ouragans et cyclones. Un bateau insubmersible, en somme. Autrement dit, ces devins avaient prédit que le régime du président Abdoulaye Wade allait battre le record du Parti socialiste (Ps) de Senghor et de Diouf en termes de longévité au pouvoir. Grâce à ces prédictions de longévité politique, les vastes prairies bleues wadiennes avaient attiré tout ce que le Sénégal compte comme leaders politiques, transhumants, marabouts de rang intermédiaire, hommes d’affaires, et autres forces opportunistes de la Nation.
Cette thèse de la longévité, bien qu’absurde, avait fini par convaincre l’univers des politologues sénégalais que le calcul politique n’est jamais une science exacte. Pour preuve, au lendemain du naufrage avec corps et bagages du navire « Sopi », la majorité écrasante des cadavres libéraux avait ressuscité dans les prairies beige-marron de l’Apr où ils ont trouvé encore toutes sortes de variétés d’herbes, en espèces et en nature : fonds politiques, passeports diplomatiques, lettres de recommandation, postes à « promouvoir », « diakhal », impunité judiciaire, marchés de gré à gré etc…Mais surtout, surtout, titres fonciers et autres baux pour accaparer le peu de terrains qui restent encore dans la région de Dakar.
A côté des transhumants officiels, il y avait aussi des truands à col blanc qui se refugiaient dans les étables de la présidence de la République pour se protéger des foudres du nouveau président de la République Macky Sall. Dommage que ce sont les mêmes responsables politiques, hommes d’affaires et hauts dignitaires de « Bby/Apr » au ventre infecté et ballonné de deniers publics qui quittent le navire, les uns après les autres, au lendemain de la désignation d’Amadou Ba comme dauphin suivie de la formation d’un nouveau et dernier gouvernement. Un gouvernement de campagne électorale, bien sûr. Ont-ils senti le vent tourner ? En tout cas, tous ces gens font comme si le navire « Amadou II » allait couler au soir du 24 février prochain !