"NOTRE PARTI, C'EST DAKAR"
Première femme à être maire de Dakar, Soham El Wardini, fidèle de Khalifa Sall, l'édile révoqué de la capitale, se veut pragmatique en attendant les municipales de la fin de l'année prochaine - ENTRETIEN
Samedi 29 septembre, Soham El Wardini a succédé à son mentor Khalifa Sall à la suite de la révocation de celui-ci par décret présidentiel en août. Pour la nouvelle maire de Dakar, la priorité est de poser des actes forts et visibles de la population pour l'année de mandat qu'elle doit finir. Sur ses défis, ses projets et son état d'esprit, Soham El Wardini s'est confiée au Point Afrique.
Le Point Afrique : En devenant maire de Dakar ce samedi 29 septembre, vous êtes devenue la première femme élue à ce poste. Quel est votre sentiment ?
Soham El Wardini : Avant toute chose, il s'agit d'un sentiment de fierté. Je suis honorée d'avoir été élue et d'être la première femme maire de la capitale du Sénégal. J'espère que mon élection permettra d'encourager les femmes sénégalaises qui souhaitent s'engager en politique. Il faut montrer que c'est un avantage d'avoir une femme à la tête d'une ville. En Afrique, lorsqu'on a un problème, ce sont les femmes que l'on consulte en premier. Dans un sens, on gère une mairie comme on gère un foyer. Ça ne veut pas dire que l'on ne fait que du social, mais il ne faut pas minimiser la part de social dans une collectivité locale. Et pour ces questions-là, être une femme est un avantage. C'est pourquoi le premier projet que je souhaite mener mobilisera les Dakaroises, qu'elles soient issues de la classe politique ou de milieux associatifs. Avec elles, je souhaite lutter pour la salubrité de Dakar. La femme est épouse, mère et éducatrice, donc la mieux placée pour sensibiliser sur la question de la propreté de la ville.
Vous répétez que votre mandat s'inscrira dans la continuité de celle de Khalifa Sall. Quels sont les projets que vous comptez mener au terme de cette année de mandat qui reste ?
Il y a de nombreux projets en cours, mais ceux de l'éclairage public et du pavage de la ville figurent parmi les prioritaires. Ça ne veut pas dire que toutes les surfaces ou toutes les bandes de terre de Dakar pourront être pavées, surtout en un an, mais on fera notre possible. De la même manière, nous souhaitons éclairer Dakar, mais la ville n'est compétente que pour ce qui concerne l'éclairage des grandes artères. Les petites rues relèvent de la compétence des communes.
Qu'en est-il de vos propres projets ?
Le temps qui m'est imparti est très court et je considère que la question de la salubrité de Dakar peut être efficiente dans la marge de manœuvre qui est la mienne dans l'année qui reste. Cela permettra de réaliser quelque chose de visible d'ici à la fin du mandat. Il s'agira avant toute chose de mener d'importantes actions de sensibilisation. Quant aux grandes lignes du projet, il est trop tôt pour les détailler. Il faudra les définir en concertation avec les maires des 19 communes de la ville et inscrire nos actions dans l'orientation budgétaire qui sera décidée au mois de novembre.
Lors du premier mandat de Khalifa Sall, une commission de mobilité et de salubrité se réunissait chaque semaine, mais lorsque l'État a retiré la gestion des ordures ménagères à la ville de Dakar en 2015, nous n'avons plus eu les moyens de poursuivre nos actions. Je souhaite réhabiliter ces opérations de nettoyage ou de désencombrement, par exemple en enlevant les marchands installés sur la voie publique. Je suis consciente que nous ne pouvons pas demander à l'État de nous rendre les fonds, mais nous pouvons essayer de nouer des partenariats avec l'Unité de coordination de la gestion des déchets solides (UCG) qui dépend de l'État.
Vous poursuivez le mandat du maire sortant Khalifa Sall sous la bannière de Taxawu Dakar, considérez-vous être à la tête d'une mairie d'opposition ?
Khalifa Sall avait l'habitude de dire qu'à la mairie de Dakar « nous ne faisons pas de politique ». Nous avons été élus par les populations de Dakar et travaillons pour Dakar. Dans cette perspective, je ne peux pas considérer qu'il s'agisse d'une mairie d'opposition. Notre parti, c'est Dakar. D'ailleurs, ce sont des conseillers municipaux de toutes obédiences politiques qui m'ont élue.
Continuerez-vous de rendre visite à Khalifa Sall en prison ? Vous qui dites vouloir « finir son mandat », vous attendez-vous à des consignes de sa part ?
[Elle rit] Je ne pense pas qu'il y aura de consignes. Lui-même m'a dit : « C'est ton mandat, tu y mettras ta touche féminine. » Mais je lui serai toujours loyale et fidèle. Khalifa Sall et moi, c'est une longue histoire qui a commencé en 2009, et je veux m'inscrire dans la continuité de son action. Car son action a conquis les Dakarois qui lui ont renouvelé leur confiance pour un second mandat en 2014.
Avant sa révocation, Khalifa Sall était le secrétaire général de l'Association internationale des maires francophones (AIMF). Est-ce un flambeau que vous comptez reprendre ?
Il est trop tôt pour envisager ce que je vais faire sur ce sujet. Je n'ai été élue que pour un mandat d'un an, « secrétaire général » sera sans doute une fonction un peu lourde pour le temps imparti. Il faut considérer s'il est raisonnable de penser au secrétariat général ou à un autre poste comme la vice-présidence.