SONKO RESIDE DESORMAIS A LA PRISON DE SEBIKOTANE
Le doyen des juges d’instruction a respecté les réquisitions du parquet — qui le liaient de toutes façons — en décernant le mandat de dépôt à Ousmane Sonko qui a passé, hier, sa première nuit à la prison de Sébikotane.
Le doyen des juges d’instruction du tribunal de grande instance hors classe de Dakar, Oumar Maham Diallo, a placé, hier, le leader du parti PASTEF-Les Patriotes Ousmane Sonko sous mandat de dépôt. Il est poursuivi pour appels à l’insurrection, association de malfaiteurs, atteinte à la sûreté de l’Etat, complot contre l’autorité de l’Etat, actes et manœuvres de nature à compromettre la sécurité publique et à créer des troubles politiques graves, association de malfaiteurs en lien avec une entreprise terroriste et vol à l’arraché. Un huitième délit, celui de diffusion de fausses nouvelles, a été ajouté à ces incriminations.
Le doyen des juges d’instruction a respecté les réquisitions du parquet — qui le liaient de toutes façons — en décernant le mandat de dépôt à Ousmane Sonko qui a passé, hier, sa première nuit à la prison de Sébikotane. Après que le procureur de la République Abdou Karim Diop a retenu 7 chefs d’accusation à l’encontre du leader du parti PASTEF le vendredi dernier, Oumar Maham Diallo, comme s’y attendaient du reste les avocats du leader de Pastef, a placé Ousmane Sonko sous mandat de dépôt pour les délits et crimes visés par le procureur de la République. A en croire ses conseils, Ousmane Sonko n’a pas répondu aux questions du juge lors de son audition. Des avocats qui ont fait des observations pour montrer au juge que le réquisitoire du procureur n’a apporté aucun fait ou aucune preuve de l’existence de toutes les charges articulées dans le réquisitoire. « Ce qu’on peut retenir de notre audience avec le juge d’instruction c’est qu’une fois de plus, la loi du Talion est appliquée. C’est le diktat de Macky Sall qui a dicté sa volonté au procureur et au juge. Tous les points de droit qu’ils ont abordés, on les a démontés de bout en bout. L’article 139, qui permet au juge d’instruction qui est indépendant de ne pas suivre le réquisitoire s’il n’est pas dûment motivé, il n’a pas osé l’appliquer. Voilà un juge qui a raté une belle occasion de sa carrière en laissant notre client Ousmane Sonko libre », a réagi Me Ousseynou Fall.
Selon les conseils d’Ousmane Sonko, les sept chefs d’accusation que le procureur de la République a retenus ne pouvaient en aucun cas justifier le mandat de dépôt et la détention de leur client dans la mesure où des dossiers d’actes de terrorisme, de diffusion de fausses nouvelles et d’appel à l’insurrection étaient en instruction en 2021 et 2022. Par conséquent, compte tenu de la non-disponibilité de ces dossiers, on ne pouvait pas le mettre à nouveau dans ce dossier. Le destin inavoué et avoué de Macky Sall c’est d’écarter Ousmane Sonko de la présidentielle de 2024. C’est une commande politique qui a été faite par Macky Sall. Les conseils de la défense parlent de vice de procédure en soutenant que leur client a été chargé des faits pour lesquels il n’a pas été entendu sur procès-verbal. « Mais le plus ridicule, c’est qu’on est parti d’un soi-disant flagrant délit de vol d’un portable pour l’interroger sur cela et au finish les officiers de police judiciaire, se sont permis de rentrer dans une littérature où il y a un kyrielle de propos qu’ils ont, eux-mêmes, qualifiés de leur propre chef avant de déférer Ousmane Sonko devant le procureur de la République. Tout cela s’est passé un jour non-ouvrable. Une grande première dans notre pays, une grande première dans notre démocratie. On va suivre la procédure pour que notre client soit entendu sur le fond. S’il faut le juger qu’on le juge ou alors que le juge prenne une ordonnance de non-lieu. Pour le dossier de Sweet Beauté, l’arrestation a anéanti la décision de condamnation par contumace », a soutenu pour sa part Me Babacar Ndiaye.
Le pool d’avocats indexe le diktat et le complot de l’Etat
Réagissant sur les conséquences de la décision de placer Ousmane Sonko sous mandat de dépôt qui a été prise par le doyen des juges, Me Massokhna Kane a exprimé son indignation et son dégout face à ce qu’il a qualifié de « farce politico- judiciaire ».
Poursuivant, Me Ciré Clédor Ly, le coordonnateur de ce pool d’avocats, a soutenu que la communauté nationale et internationale a assisté à une mise en scène de l’Etat avec des forces de défense et de sécurité qui ont encore une fois exercé des violences et détruit des biens du leader de l’opposition avant qu’il ne soit kidnappé et amené un jour non ouvrable au tribunal où on peut observer que tout est électrifié. Cette électrification en réalité, c’était pour Ousmane Sonko. C’est un dessein qui a été formé, qui a été réfléchi, planifié et qui a été exécuté. « C’est vraiment triste dans la mesure où nous ne nous sommes pas retrouvés avec mêmes des indices, il s’agit d’un dossier vide, désertique dans lequel il y a des propos qui sont alignés, imputés à Ousmane et qui ont été caractérisés par la police que le procureur a repris. Je ne peux parler du secret d’instruction mais il faut retenir que les faits pour lesquels il a été arrêté étaient des faits de flagrance qui ont été transformés en des crimes et sans qu’il y ait une seule preuve, un seul indice. Nous avons été très déçus et notre sentiment est que le droit n’a pas été appliqué. On ne peut pas prendre des infractions que l’on aligne, on vise un article, on se fonde sur cet article alors que le contrôle ne permet pas de faire ressortir un seul indice sur les articles qui sont été visés », a regretté le coordinateur du pool d’avocats de Ousmane Sonko.
Selon lui, la défense s’attendait que le juge d’instruction reprenne son indépendance, qu’il revendique son indépendance. Rappelant qu’en matière criminelle, la détention provisoire est illimitée, il indique qu’Ousmane Sonko peut être retenu en prison jusqu’à après l’élection présidentielle avant d’être jugé.