VIDEOLES GRANDES AMBITIONS SOUVERAINISTES DE BASSIROU DIOMAYE FAYE
Abandon du franc CFA, renégociations commerciales dans le gaz et le pétrole, départ des troupes françaises du territoire... Le nouveau chef d'État pourrait déclencher une vague de réformes majeures dans les prochains mois
(SenePlus) - Dans un entretien accordé à RFI, Pape Ibrahima Kane, chercheur sénégalais, a décrypté les principales ambitions du nouveau président sénégalais Bassirou Diomaye Faye en matière de souveraineté économique, monétaire et diplomatique.
Tout d'abord, M. Kane souligne que « la première souveraineté » que vise M. Faye est « la souveraineté de l'État sur ses ressources naturelles », à savoir le gaz, le pétrole, les phosphates ou le zircon. Son projet électoral, qui mentionne à 18 reprises le mot « souveraineté », prévoit de « renégocier les contrats » signés avec les compagnies internationales comme BP ou Kosmos Energy dans le secteur énergétique.
Sur les contrats gaziers et pétroliers offshore déjà existants, le chercheur estime qu'il « n’y a pas l'information qui permet de vérifier » les affirmations du président sortant Macky Sall selon lesquelles « l'État sénégalais est déjà majoritaire ». Il souligne que de nouvelles négociations pourraient avoir lieu, notamment avec le voisin mauritanien avec lequel le Sénégal partage ces ressources.
Dans le secteur de la pêche, Pape Ibrahima Kane juge que le nouveau président a aussi « la possibilité de remettre en cause beaucoup de ces contrats » accordés à des entreprises étrangères par des Sénégalais qui les ont ensuite sous-loués. Il s'agirait de satisfaire les demandes des pêcheurs locaux qui déplorent la raréfaction des ressources halieutiques.
Sur le plan politique, l'ambition affichée de « sortir du néocolonialisme » pourrait se traduire par le départ des bases militaires françaises installées au Sénégal depuis l'indépendance en 1960, estime M. Kane. Il s'attend aussi à une renégociation des accords de défense liant le pays à la France.
Concernant la monnaie commune CFA, le chercheur note que M. Faye a adopté un discours « plus réaliste » en évoquant d'abord l'éco, future monnaie de la CEDEAO, avant d'envisager une monnaie nationale. Néanmoins, un changement au Sénégal fragiliserait davantage le franc CFA, dont la Côte d'Ivoire est désormais le principal soutien.
Sur la scène internationale, M. Kane juge improbable un « shift » vers la Russie, le Sénégal entretenant déjà d'« excellents rapports » économiques et une politique de non-alignement. En revanche, le nouveau président pourrait use de son influence auprès du Mali pour le ramener dans le giron de la CEDEAO.
En conclusion, Pape Ibrahima Kane estime que la conduite de la politique étrangère reviendra au président Faye, tandis qu'Ousmane Sonko, allié de poids dans sa victoire, pourrait se voir confier des responsabilités au niveau national.