AUX ORIGINES DU «ATTAYA»
Plus de 2/3 de la population mondiale consomme du thé. Le rituel de consommation varie cependant en fonction des pays et de la culture.
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Le thé est la boisson la plus consommée au monde après l’eau. Au Sénégal, cette petite tasse remplie de thé vert surplombé de mousse blanche est si prisée qu’il est difficile d’imaginer qu’il fut un temps où cette boisson n’était pas consommée dans ce pays. Retour sur les circonstances de la naissance de l’attaya sénégalais. Ces circonstances impliquent un cadeau diplomatique, de l’espionnage industriel et des apprenants du Coran.
Plus de 2/3 de la population mondiale consomme du thé. Le rituel de consommation varie cependant en fonction des pays et de la culture. Au Japon par exemple, la cérémonie du thé a lieu dans un local spécialement aménagé avec un maitre du thé et des ustensiles à l’aspect esthétique. Les invités se purifient avant d’y accéder et la dégustation se fait dans un calme qui favorise la méditation. Au Sénégal, le moment «attaya» représente une occasion de socialiser. C’est une activité qui peut réunir familles ou amis et susciter causeries et débats. En général, c’est au plus jeune que revient la responsabilité de préparer le thé pour les ainés en signe de respect. Le thé est bouilli, mélangé avec du sucre, de la menthe, ... et servi à trois reprises : Un lèweul fort et amer, un deuxième équilibré entre l’amer et le doux et un troisième très sucré. Un processus qui est exactement à l’opposé du thé à la menthe marocain. Dans ce pays, le thé est infusé plutôt que bouilli de telle sorte que la première tasse est douce et sucrée, la deuxième équilibrée et la troisième plus amère. De plus, le thé y est servi à l’invité en signe d’hospitalité et d’honneur.
Une histoire de cadeau diplomatique et d’espionnage industriel
Le moment attaya est si imbriqué dans la culture sénégalaise qu’on en oublierait presque que l’ingrédient principal de cette boisson est d’origine étrangère et que son introduction au Sénégal est relativement récente comparé aux autres pays. Le thé est arrivé au Sénégal de la même façon que l’islam avait été introduite : par la Mauritanie influencée par le Maroc. Alors que le thé était consommé en Chine depuis des millénaires, il n’arrive au Maroc que vers 1700. Ce sont les Britanniques qui en offrent au Sultan Moulay Ismail en guise de cadeau diplomatique. Comme plusieurs autres pays, l’Angleterre avait adopté cette boisson originaire de Chine et qui rapportait à ce pays une importante manne financière. Dans le but d’enlever ce monopole aux Chinois, les Britanniques ont eu recours à des espions qui ont volé des plants de théiers ainsi que la technique de culture et de transformation du thé. Ils ont introduit la culture du thé en Inde qui était une de leurs colonies disposant de conditions climatiques proches de celles de la Chine voisine. C’est ainsi que l’Angleterre s’est lancée dans le commerce du thé qu’il redistribuait principalement en Europe.
Comment le thé est arrivé au Sénégal
En 1954, la guerre de Crimée gène les exportations britanniques et les oblige à trouver de nouveaux marchés. C’est à ce moment-là qu’ils se souviennent du Maroc qui avait apprécié leur cadeau diplomatique et qui a l’avantage de disposer de ports pouvant facilement accommoder les navires marchands. Le thé était tellement rare au Royaume chérifien qu’il était un luxe seulement accessible à la haute société. Avec le nouvel afflux massif de thé, l’accès au produit se démocratise au point d’atteindre la Mauritanie voisine. Au même moment, ce pays accueille un important nombre de Sénégalais venus y apprendre le Coran et qui ramenait du thé au pays. C’est ainsi que le thé est arrivé au Sénégal. D’ailleurs le mot «attaya» vient de «tay» utilisé au Maghreb pour désigner ce produit. D’après l’Ocde, en 2022, le Sénégal a importé du thé pour un montant de plus de 25 milliards de FCFA principalement de la Chine. Le Sénégal occupe la 34ème place du classement mondial des pays qui importent le plus ce produit. En Afrique, le Kenya est le seul grand producteur de thé. Le monopole de la production est largement dominé par les pays de l’Asie de l’Est (Chine, Inde, Sri Lanka, etc.).
MODE D’EMPLOI BOIRE DU THE, MAIS COMMENT ?
Avant de devenir une boisson consommée mondialement, le thé était utilisé en Chine comme un médicament prescrit en cas de maux d’estomacs, de troubles de la vision, de maladies de la peau, etc. Il était alors mélangé avec des oignons, du gingembre, du citron et du sel. Si le thé que l’on boit aujourd’hui a une odeur et un goût plus agréables, il n’en a pas pour autant perdu ses propriétés médicinales et curatives. Des études scientifiques ont montré que le thé contient des polyphénols et d’autres composants qui peuvent réduire le risque de développer des maladies chroniques telles que le cancer, les maladies cardiovasculaires, l’arthrite et le diabète. Il est utile de savoir comment consommer cette boisson pour en tirer le plus d’avantages.
Bouilli ou infusé ?
La méthode de préparation a des conséquences sur les vertus. Le thé infusé est moins exposé à la chaleur que le thé bouilli. Avec l’infusion, on a une chaleur limitée et moins persistante qui aide à préserver les vitamines et à libérer des arômes plus subtils. Bouillir le thé tue les vitamines et altère les arômes mais permet d’avoir un liquide plus concentré, plus fort avec des propriétés antibactériennes. Cela permet aussi d’extraire plus de composants comme les anti-oxydants et certains polyphénols bénéfiques à la santé.
Avant ou après le repas ?
Cela dépend de l’objectif poursuivi. Si la personne souhaite perdre du poids ou faciliter sa digestion, boire du thé après le repas peut aider. Pris avant le repas, le thé réduit la sensation de faim, ce qui fait que la personne va manger moins. Propice quand on est en régime. Toutefois, pris juste avant ou juste après le repas, le thé peut empêcher l’absorption de certains nutriments contenus dans le repas. Ceci est spécialement vrai pour le fer. Les personnes anémiées ou souhaitant pleinement tirer profit d’un repas riche pour prendre du poids ou palier certaines carences doivent éviter le thé juste avant ou juste après le repas.
Enfin, thé ou café ?
Le thé et le café contiennent tous les deux de la caféine. Cette substance donne de l’énergie, favorise la concentration et peut réduire les risques de dépression. Toutefois, une trop grande quantité de caféine peut causer de l’agitation, de l’anxiété, de l’addiction et de l’insomnie. Comme le thé contient moins de caféine que le café, ces risques sont réduits chez les buveurs de thé. Aussi, alors que le café procure une soudaine poussée d’énergie, le thé prend plus de temps à agir mais aide à rester alerte plus longtemps. Enfin, le café et le thé sont tous les deux riches en antioxydants qui nettoient le corps de ses impuretés et réduisent les risques de cancers et maladies cardiaques.