BORIS N’EST PAS CHARLIE
Il proteste "énergiquement" contre l’attribution d’un prix à l’hebdomadaire satirique français lors du "Pen World Voices festival", ce mardi à New York

Boubacar Boris Diop n’est pas Charlie. Dans une lettre adressée à la directrice exécutive du Pen American Center, Suzanne Nossel, l’écrivain sénégalais le fait savoir. Invité au Pen Wolrd Voices Festival, prévu ce mardi à New York, Boris assure qu’il "participer(a) avec plaisir" à l’événement.
Cependant, s’empresse-t-il d’ajouter, il "protest(e) énergiquement" contre l’attribution, au cours de cette manifestation, d’un prix à Charlie Hebdo.
Dans la lettre que nous vous proposons ci-dessous in extenso, l’éditorialiste de www.SenePlus.Com explique sa position. Laquelle est partagée par plus de 200 auteurs, qui ont décidé de boycotter la cérémonie de remise de la distinction à l’hebdomadaire satirique français.
LA LETTRE DE BORIS
Boubacar Boris Diop
Ecrivain, Dakar (Senegal)
A
Madame Suzanne Nossel
Directrice exécutive du PEN American Center
New York (Usa)
Paris 30 avril 1994
Madame,
J'ai été invité, en tant qu'écrivain sénégalais, au PEN World Voices Festival de cette année 2015.
J'y participerai avec plaisir pour échanger pendant une semaine avec les autres auteurs présents à New York.
Mais comme vous le savez, la controverse fait rage en ce moment au sujet d'un prix que le PEN American Center envisage de remettre le mardi 5 mai 2015 à l'hebdomadaire français Charlie Hebdo. Six de mes collègues ont publiquement exprimé leur rejet d'une telle distinction et je tiens par la présente lettre à joindre ma voix à la leur pour protester énergiquement contre la décision du PEN American Center.
Je l'ai dit et écrit au lendemain des attentats contre Charlie Hebdo : les caricatures grossières et insultantes de ses dessinateurs sèment la haine dans les cœurs et causent plus de tort à la liberté d'expression sainement comprise qu'elles ne la servent. Ces excès ne justifient en aucun cas la froide élimination de dessinateurs par une bande de fanatiques mais je continue à ne pas me reconnaître dans le nihilisme à la fois puéril et dangereux de cet organe de presse.
Il est dès lors de mon devoir de vous dire, en votre qualité de Secrétaire exécutive du PEN American Center, que les journalistes de cet hebdomadaire ne sauraient être mes héros et que la soirée de gala qui leur sera consacrée n’a pas sa raison d’être.
Bien cordialement,
Boubacar Boris Diop (Sénégal)