CES MILLE ET UN MAUX QUI ETOUFFENT KOLDA
ENCLAVEMENT, MAUVAIS ETAT DES ROUTES, DIFFICILE ACCES AU CREDIT, MYSTICISME…

Malgré son érection en région il y a plus de trois décennies, Kolda tarde à s’envoler véritablement et se morfond dans son statut de région parmi les plus pauvres au Sénégal. Elle est dans un dénuement total, ne possède pas d’usine capable d’accueillir une jeunesse totalement désoeuvrée. Ses routes sont en mauvais état. Ce qui ne contribue guère à la sortir de son enclavement. Alors qu’elle est dépourvue d’infrastructures sociales de base, Kolda est contrainte de traîner la mauvaise réputation de dévoreuse de maires. Le mysticisme est passé par là. «L’AS» vous amène à la découverte d’une région où tout est priorité.
LE MAL-ETRE DE LA JEUNESSE KOLDOISE : une jeunesse «bridée» par le sous-développement
La ville de Kolda compte 82 650 habitants, selon le rapport de l’Agence nationale de la Statistique et de la Démographie de 2013. Elle a une population relativement jeune. Mais si dans beaucoup de parties du monde la jeunesse rime avec espoir et un avenir radieux à l’horizon, les jeunes de la capitale du Fouladou n’ont comme débouchés que l’armée ou l’enseignement, à défaut de la célèbre moto de transport communément appelée «Djakarta». Ces propos sont de Malamine Cissé, président du conseil départemental des jeunes qui regroupe toutes les associations de jeunes de la région.
D’après lui, le véritable problème des jeunes Koldois est l’accès à l’emploi et à une formation adéquate, pour pouvoir s’insérer dans le tissu économique de la région qui regorge de potentialités. Pour Seydou Wane du Congad, les travaux d’infrastructures dans la région ont révélé la faiblesse des ressources humaines dans le département. «Il y a très peu de jeunes qui ont été employés dans les chantiers car les compétences qui y étaient requises réclamaient un certain niveau de qualification. Et nos jeunes qui sont souvent initiés à l’enseignement général n’étaient pas aptes à remplir ce travail d’ouvrier spécialisé. Il faut mettre en adéquation l’environnement économique avec la formation des jeunes Koldois», ajoute-til. 16 heures au quartier Sikilo, le soleil brûle les principales artères.
Devant une maison, une bande de jeunes se prélasse. Pour Mame Balla Kane, la lutte contre le sousemploi ne doit pas être l’affaire des seules autorités, mais aussi celle des jeunes qui doivent se prendre en main. «Nous voulons créer une association dénommée «Kolda ma fierté» pour mettre fin à la situation de chômage. Nous voulons aussi les sensibiliser sur les risques liés à la conduite des motos Djakarta qui poussent beaucoup d’élèves à abandonner leurs études», déclare-t-il avec véhémence. Et son ami Amadou Aidara de renchérir en déplorant le fait qu’aucune politique n’ait été mise en place pour favoriser l’entrepreneuriat des jeunes, avec un meilleur accès au crédit pour qu’ils puissent développer leurs activités. «Les garanties exigées par les banques pour démarrer une activité sont trop exorbitantes. Ce qui décourage souvent les jeunes qui veulent se lancer dans un projet de développement », se plaint-il.
D’après Daouda Sidibé, premier adjoint au maire, la ville envisage de mettre en place un fonds de Crédit Mutuel Municipal (Cmc) dédié aux jeunes et aux femmes afin de les aider à monter leurs projets. C’est un engagement ferme de la nouvelle équipe municipale afin de développer les potentialités de la commune dit-il. Pour une région agricole et sylvo-pastorale comme Kolda, la création d’instituts et d’universités agricoles permettra de fixer cette jeunesse qui, à défaut d’une alternative au chômage chronique, prendra le chemin de l’exil, avertit un responsable politique.
KOLDA : BILAN DU CONSEIL DES MINISTRES DECENTRALISÉ D’AVRIL 2013 : quand les graines de promesses tardent à germer
Les engagements pris par le gouvernement de Macky Sall il y a deux ans, lors du conseil des ministres décentralisé de Kolda, tardent à se réaliser aux yeux des populations du Fouladou. Elles espèrent que la mise en pratique de ce programme triennal permettra de développer les énormes potentialités de la région
200 milliards FCfa ! Si ce chiffre ne dit rien à la plupart des Sénégalais, en revanche il résonne comme l’espoir déçu d’un décollage annoncé pour beaucoup de Koldois. En effet, lors du conseil des ministres délocalisé du 17 avril 2013, le gouvernement avait promis un programme d’investissements de 200 milliards pour toute la région. Mais près de deux ans après, cette promesse qui a suscité d’énormes espoirs est restée lettre morte. Les Koldois sont las d’attendre la concrétisation de cette mesure, selon Malamine Cissé, président du Conseil départemental de la jeunesse.
A l’en croire, la mobilisation autour de la tournée économique du chef de l’Etat n’en valait pas la peine, puisque la ville n’a obtenu que l’inauguration du pont qui faisait partie du package du programme américain Millenium Challenge Account et du programme Kolda ville d’indépendance de 2009. Ce sentiment est partagé par l’ensemble des Koldois.
FABOULY GAYE DEPLORE UN DEFAUT DE COMMUNICATION
Premier adjoint au maire, Daouda Sidibé estime que les gens vont vite en besogne car ils pensent que cette somme va être décaissée d’un seul coup, alors qu’il s’agit de l’ensemble du budget pour le développement de toute la région. «La plupart des travaux d’infrastructures d’envergure comme la route nationale 6 (Ziguinchor, Tanaf, Kolda Vélingara) et le pont Abdoul Diallo ont démarré sous Macky Sall. Même si les financements datent de l’ancien régime, leurs réalisations sont à comptabiliser dans le bilan du Président Macky Sall qui a lancé ces ouvrages pour le bien des populations de Kolda», indique-t-il. Pour expliquer cette déception des populations du Fouladou, Fabouly Gaye, ancien Président du conseil régional de Kolda, déplore un défaut de communication dans cette affaire. «On a fait croire aux gens qu’on va déverser toute cette manne, alors qu’on devait leur faire comprendre qu’il s’agit d’investissements pour développer la région. Et pour éviter toute confusion, l’Etat doit faire savoir aux populations qu’il s’agit d’un programme triennal », dit-il. Toujours selon le responsable libéral, cette situation montre les difficultés des Koldois à saisir les différents projets prévus à l’issue de ce conseil des ministres. «Des projets comme le lycée technique, le stade régional de Kolda, les deux ponts de Sarre Kemo et de l’Ilel ont été versés dans le programme triennal, alors qu’ils étaient tous en voie d’achèvement. Donc, l’Etat gagnerait à éclairer les Koldois sur les vrais projets ficelés dans ce programme pour la localité».
Pour Seydou Wane, chef de la cellule locale du Conseil des Organisations non gouvernementales d’Appui au Développement (Congad), toute initiative des autorités visant à améliorer la situation économique est à saluer. «Si les nouvelles autorités, à travers ce plan, veulent s’inscrire dans une nouvelle dynamique de développer le département, il faudrait l’encourager. En outre, chaque fois que les autorités du pays sont venues ici, on a noté des avancées dans beaucoup de domaines», soutient-il. Et enfin pour Fabouly Gaye, compte tenu des énormes potentialités dont regorge la région de Kolda, il est plus qu’urgent de mettre en place de vrais investissements pour permettre à la population de sortir de l’ornière.
CARNET DE ROUTE SUR LA RN º 6. : 256 km dans l’enfer du sud
La route Tambacounda-Vélingara-Kolda, en réfection depuis deux ans, est un vrai supplice pour les habitants de la Casamance. Avec une chaussée délabrée, des déviations et pistes non balisées, cette voie d’accès devient un véritable calvaire pour les hommes et les machines.
Pour rallier Kolda en provenance de Tambacounda, nous empruntons la Rn6. Le ronflement du moteur de la Toyota trouble la quiétude de la flore et de la faune qui s’éveillent aux abords de la route nationale (Rn6). Les quelques rares camions s’échappent devant nous à vive allure, à destination de Mandat Douane.
La douceur de la campagne cède peu à peu la place aux va-etvient des femmes qui s’affairent devant leurs concessions. A Mandat Douane, une petite cabane en dur sert de poste de contrôle aux gabelous. Des gros porteurs attendent sur le bas côté. La chaussée défoncée ne présente que quelques portions de bitume. La chair rouge de cet itinéraire laisse apparaître de gros trous et autres multiples cratères. Cette route à l’allure d’un vrai fromage gruyère met au supplice les voitures et leurs passagers. A certains endroits, d’épais troncs et de gros engins obstruent poussant les automobilistes à emprunter les nombreuses déviations en rase campagne. «La chaussée est en travaux », nous révèle un compagnon de voyage visiblement habitué de ce parcours. Un panneau blanc avec l’inscription «allumez les phares» annonce la couleur. La poussière enveloppe la voiture et ne laisse poindre que quelques lueurs qui apparaissent sous le manteau ocre. La poussière s’infiltre à l’intérieur de l’habitacle, poussant les voyageurs à s’abriter derrière des ouvertures et autres serviettes. Aux portions peu roulantes, la voiture s’engage sur les pistes rurales non balisées. Les nombreux cahots du véhicule mettent à mal les corps et les machines. Aux abords de Vélingara, la chaussée en meilleur état laisse un moment de répit aux passagers. Après un passage à la station-service, le véhicule continue sa randonnée mécanique et le calvaire redémarre.
Le chauffeur, comme dans un rallye, tente de maîtriser la voiture ballottée par les nombreuses cavités et autres trous. A une allure réduite, la voiture roule vers Kolda. Les premiers rayons de ce début de matinée dorent la végétation luxuriante qui s’étend des deux côtés de la route. De temps en temps, ils éclairent quelques camions garés au bord de la route victimes d’ennuis mécaniques. Les organismes sont mis à rude épreuve. De rares engins de terrassement çà et là tentent de redonner une seconde vie à la route en mauvais état. Au loin, des bâtiments, émergent de la poussière. Il s’agit du Lycée Technique de Kolda qui laisse échapper son effectif pour les besoins de la recréation. Fin du périple pour les explorateurs de la route nationale Nº6 que nous sommes. Des silhouettes saupoudrées descendent de la voiture, enfin délivrées de l’enfer du sud.
MYSTICISME A KOLDA : quand la politique se heurte aux croyances populaires
La superstition a fini de faire du fauteuil de maire de Kolda une vraie malédiction pour son occupant. Mais pour certains responsables de la ville, c’est une tentative de détourner les jeunes de la chose publique.
Les légendes ont souvent fait la notoriété de beaucoup d’endroits du globe. Mais à Kolda, à défaut d’un animal ou d’un être exceptionnel. Le chat noir n’est autre que le fauteuil du premier magistrat de la ville. Selon la rumeur, tous les occupants de ce poste finissent de manière tragique ou risquent d’être gravement malades. «Je ne crois pas à ce genre de choses. Nous ne sommes pas dans cela. Nous n’accordons aucune importance à ce genre d’histoires», fulmine d’entrée Daouda Sidibé, premier adjoint au maire de Kolda. Les déboires des anciens maires Bécaye Diop, Makhtar Kébé, Demba Koita, Yéro Kandé et Dicory Diop, qui ont tous été éprouvés par le sort, suscitent diverses interrogations dans ce terroir attaché aux traditions. Mais d’un autre côté, la pression sociale, l’âge avancé, les nombreuses charges politiques, la fatigue peuvent être autant de facteurs dégradants pour la santé de tout un chacun, affirme Seydou Wane du Congad. D’après lui, beaucoup de maires souffraient de maladies chroniques avant d’occuper le fauteuil de maire. «L’ancien maire Makhtar Kébé était hypertendu, donc les nombreuses sollicitations liées à ses fonctions n’ont pas arrangé les choses», a-t-il révélé.
Quant à Fabouly Gaye, il voit dans cette rumeur une tentative de la vieille garde politique d’éloigner les jeunes de la chose publique. «Je vois dans cette histoire une tentative de manipulation d’un certain groupe qui veut faire de la mairie sa chasse gardée. Je ne pense pas qu’il y ait une quelconque malédiction», clame-t-il. Les anciens maires de la ville étaient de vrais politiques et se préoccupaient peu de leur santé, ce qui leur a causé souvent des problèmes. Mais pour Tapa Dia qui se dit témoin privilégié du magistère de ces maires, un mystère entoure leur maladie. «Dicory Diop a été emporté par une hémorroïde incurable. Yéro Kandé, le député, a perdu la vue à l'Assemblée nationale, un jour, alors qu'il était en pleine session au Parlement...», témoigne le vieil homme dans les colonnes de «L’Observateur».
CETTE CROYANCE MYSTIQUE EST FORT ANCREE DANS LE FOULADOU
Et selon un notable du quartier Bouna, cette croyance mystique est fort ancrée dans le Fouladou. C’est ainsi que dans les années 90, il y avait un député très craint par ses adversaires politiques. Car on disait ses parents très versés dans ces pratiques occultes. Selon la légende, il était en possession d’une corne magique qu’il lui suffisait de pointer sur un adversaire pour s’en défaire. Et à la fin, personne n’osait lui disputer son fief électoral, dit le vieil homme. Toutefois, pour monsieur Gaye l’arrivée d’une nouvelle génération d’hommes politiques à Kolda, en la personne du maire actuel Abdoulaye Baldé, montre que les jeunes ont tordu le cou à ce vieux serpent de mer réduit au stade de rumeur
COMMERCE À KOLDA : une activité plombée par l’enclavement
Profitant de la tournée économique du président de la République à Kolda, les commerçants de la localité ont réclamé une meilleure prise en compte de leurs difficultés. Lesquelles difficultés ont pour nom l’enclavement de la zone et les conditions difficiles d’accès au crédit. C’est un préalable pour pouvoir enfin exploiter les énormes potentialités du département.
11 heures : dans la poussière la rue principale en chantier, qui mène au centre-ville de Kolda, un groupe de passants se dirige vers le marché central, au coeur de la ville de Kolda. Près de la mairie, les automobilistes et les motocyclistes manifestent leur impatience à coups de Klaxons. Les passants se faufilent entre les étals et les nombreuses échoppes qui bordent le marché central. Les enseignes des magasins de commerce et des banques et sociétés d’assurance surplombent la rue principale. Le soleil darde ses rayons ardents sur les étals où trônent fièrement les ballots de friperie, des accessoires de mode et matériels électroniques. L’odeur piquante des poissons séchés et des nombreux fruits et légumes donne au marché une atmosphère particulière.
Véritable poumon de la ville, le marché vit et vibre au rythme de la santé économique de la capitale du Fouladou. Ainsi si le marché tousse, c’est toute la ville qui est malade. «A part le transport par motos jakarta, aucun secteur économique n’est prospère à Kolda», dit le cordonnier Ibrahima Diallo qui tente de
redonner une seconde vie à une vieille chaussure. Selon les commerçants, les maux qui plombent leurs activités sont l’enclavement, le faible pouvoir d’achat des populations, le manque d’unités de conservation des produits et de financements. Son ami Alioune Diouf, gérant d’un magasin d’accessoires de lits, lui emboîte le pas. «On passe des jours à attendre des livraisons via la Gambie ou Tambacounda, car toutes les voies d’accès à la ville sont exécrables. Même si la route de Vélingara à Kolda est en réfection, le département manque de voies d’échanges, ce qui entrave réellement notre activité. En outre, avec la crise le faible pouvoir d’achat de la population se répercute sur notre activité, avec un chiffre d’affaires
carrément en baisse depuis quelque temps», se désole-t-il.
12 heures : les voitures et autres motos continuent leur sérénade mécanique sur cette artère. Les quelques bicyclettes, comme des funambules, se faufilent entre les voitures, au risque de renverser les clients distraits. Aux clameurs des microphones, se mêlent les cris des marchands qui cherchent d’accrocher les passants. Devant son magasin de vente d’oignons, Khadim Guèye est plongé dans la lecture de poèmes de Khadimou Rassoul. Derrière son comptoir, il dresse la situation de son commerce. «Je les fais venir des villages environnants de Kolda avant de les revendre à 300 francs le kilogramme. Mais malheureusement, les clients font défaut en ce moment. On peut dire que les prix sont abordables ici à Kolda. Malgré la forte chaleur de Kolda, nous n’avons pas d’unités de conservation des légumes et de fruits. S’ils sont avariés, nous sommes obligés de les jeter à la poubelle. Ce qui constitue souvent un énorme manque à gagner», déplore-t-il. Avant d’ajouter que si la situation persiste, il compte déplacer son commerce vers d’autres cieux plus cléments. Fatima Mballo, gérante d’un magasin de denrées alimentaires, embouche la même trompette pour dénoncer la léthargie des autorités locales et nationales face à la morosité du commerce à Kolda. «Nous faisons face à d’énormes difficultés à cause de l’enclavement qui limite notre rayon d’action. L’accès au crédit est aussi problématique. Les garanties qu’exigent les banques sont trop contraignantes pour nous permettre de développer notre commerce. Nous voulons seulement un meilleur accompagnement des pouvoirs publics pour nous permettre de mieux mettre en valeur les énormes potentialités de la localité», plaide-t-elle.
Pour Abdou Diouf, président du marché, cette situation doit être mise en rapport avec la conjoncture mondiale marquée par la crise économique. «La situation est difficile pour tout le monde et dans toute activité économique on passe par de très mauvais moments. Même si les difficultés de financement et l’accès difficile certaines zones constituent un problème, ils ne sont pas insurmontables pour des hommes d’affaires entreprenants», déclare-t-il avant de rappeler que «la seule chose qu’il faut demander aux autorités, c’est de résorber le déficit de cantines qui entrave la bonne marche de ses activités. De l’avis de Fabouly Gaye, ancien Président du Conseil Régional (Pcr) de Kolda, les commerçants de Kolda doivent essayer de diversifier leurs offres. «Ils ne doivent pas se contenter de stocker et de revendre. La région regorge d’énormes potentialités qui peuvent être transformées et exploitées. Donc, ils doivent faire preuve d’ingéniosité pour se prémunir des aléas de la conjoncture économique », dit-il. Mais pour le premier adjoint au maire, Daouda Sidibé, des efforts sont en train d’être accomplis par la nouvelle équipe municipale pour améliorer la situation du commerce à Kolda. «Nous avons engagé les travaux de finition du nouveau marché de Kolda et d’un centre commercial qui vont assurer aux commerçants d’un outil de travail de qualité. Ces nouveaux ouvrages vont permettre aux opérateurs économiques de bénéficier d’un cadre adéquat pour développer le commerce dans la ville», rassure-t-il.
TROIS QUESTIONS A FABOULY GAYE, RESPONSABLE PDS : «Kolda est un îlot de richesses qui accueille une population pauvre»
Au regard des énormes potentialités de la région de Kolda, le responsable politique libéral Fabouly Gaye attend de l’Etat la mise en place d’une vraie politique de développement agro-pastoral de la zone.
Malgré les nombreuses potentialités dont il regorge, Kolda n’arrive pas à asseoir les bases de son développement. Selon vous, où se situe le problème ?
«Les ressources naturelles de Kolda sont mal exploitées. Leur valorisation laisse souvent à désirer car les plus-values ne restent pas à Kolda. Les fruits bruts que nous envoyons à Dakar nous reviennent sous la forme de jus de fruits. Il y a un manque criant de ressources humaines pour les mettre en valeur. A cela s’ajoutent les problèmes de l’enclavement avec des routes en mauvais état ou insuffisantes. En fin de compte, on peut dire que Kolda est une terre de paradoxe. Parce que Kolda est un îlot de richesses qui abrite une population pauvre.
Les différentes rencontres comme le conseil interministériel d’avril 2013 et la tournée économique de cette année ne sont-elles pas un début de solution pour la région ?
A mon avis, Il aurait dû attendre la fin de tous les travaux avec la réalisation des routes Kolda- Tanaf et Madina –Mbanda, pour se pencher entièrement sur le sort de Kolda. Il est bon de lancer des travaux d’infrastructures. Mais il serait mieux aussi de mettre l’accent sur des filières d’activités économiques
porteuses de croissance comme le riz avec la vallée de l’Anambé qui pourra ravitailler tout le Sénégal en riz, puisque les militaires à eux seuls ont récolté 162 tonnes. Aussi, la création de zones prioritaires d’investissements dotées d’équipements agricoles conséquents est nécessaire pour sortir Kolda de la pauvreté et de la misère.
Le chef de l’Etat a pourtant visité l’ Anambé et a promis de développer la filière riz. N’est-ce pas un pas dans la bonne direction ?
Pour développer ce secteur d’activité qui est le riz, il faudrait des mesures courageuses comme la fermeture des frontières. Car on a beau vouloir privilégier les variétés locales, si la concurrence asiatique persiste, son essor sera toujours entravé. J’attends de l’Etat une vraie politique de valorisation de la production locale, qui pourra même être étendue à l’oignon, à la transformation des produits locaux. Je suis sûr qu’avec ses nombreuses richesses agricoles, Kolda a un grand rôle à jouer dans ce programme d’autosuffisance alimentaire si toutes les énergies sont mobilisées dans ce sens.