L’ENFER DES FEMMES ENCEINTES EN TRAVAIL
ÉVACUATION SANITAIRE DANS LES ILES DU SALOUM

L’organisation non gouvernementale, « Save the Children », en partenariat avec l’association des journalistes en santé, population et développement (Ajspd) avait organisé une caravane de santé du 3 au 5 juin dans la région de Fatick. Cette initiative a permis de constater les problèmes de santé, auxquelles font face les femmes et les enfants dans le département de Foudiougne. S’il y’a une réalité qui frappe, c’est surtout le calvaire des femmes. Ces dernières, habitantes des îles du Saloum éprouvent des difficultés d’évacuation au moment des accouchements. Dans pareilles circonstances, elles sont obligées de passer plus de deux heures dans les pirogues pour sauver leur vie et celle du bébé.
Bassar et Diamniadio sont deux villages insulaires du district sanitaire de Foundiougne dans la région de Fatick. Une vue paradisiaque s’offre au visiteur, tout au long du voyage sur le fleuve Saloum. Arrivée sur les lieux, une autre réalité s’impose à la découverte de la santé des populations.
Ainsi, les villages de Bassar et de Diamniadio, disposant de postes de santé, polarisent d’autres villages. Dans ces localités des îles du Saloum, la différence découlant des réalités de la prise en charge de la santé des populations reste apparente.
Ces femmes, peinant au moment des accouchements, vivent le calvaire des évacuations sanitaires à destination de Foundiougne ou d’autres structures hospitalières de la région. Les villages de Bassar et Diamniadio font partie des 18 îles du département de Foundiougne. Un long fleuve sépare les deux villages de « la terre ferme ». « 100 km à vol d’oiseau sépare Bassar de Foundiougne.
Soit plus de deux heures de temps de voyage dans une rapide pirogue de 40 chevaux », a expliqué l’infirmier, Chef de poste de Bassar. Le trajet reste un véritable parcours de combattant, un enfer pour les femmes enceintes, en situation d’urgence et devant être évacuées.
« L’évacuation des malades en urgence, surtout pour les femmes qui doivent accoucher, pose un véritable problème. Le poste de santé de Bassar ne disposant d’aucune logistique pour le transport des malades, principalement à Foundiougne ou à l’hôpital de Kaolack.
La pirogue reste le seul moyen pour quitter les villages insulaires et rallier la terre ferme », confie l’infirmier, chef de poste (Icp) du village de Bassar, El Hadj Sarr. Et, la diligence de la population s’impose pour trouver cette pirogue qui doit servir d’ambulance. L’opération, est loin d’être un tour de magie pour la famille du malade qui doit supporter la prise en charge financière.
«Les frais d’évacuation sont à la charge de la famille du malade Et, il faut débourser au moins 30.000 Fcfa, soit 60 litres de carburants marins, en raison de 400 à 500 Fcfa, le litre. Sans compter les autres frais, liés à l’accouchement», expose l’ICP du poste de santé de Bassar. Même scénario pour les populations du village de Diamniadio. Trouvé sur les lieux, l’infirmier chef de poste, Ibrahima Sarr regrette l’indisponibilité d’une ambulance-pirogue pour assurer l’évacuation des malades. Surtout, les femmes enceintes dans de bonnes conditions.
«Nous n’avons aucune logistique pour l’évacuation des malades. Seuls, les villages de Niodior, Dionouwar et Bassoul ont des ambulances pirogues. On espère de « Save the Children », un appui pour une ambulance pirogue qui est indispensable», espère-t-il. Ces difficiles conditions d’évacuation des femmes enceintes ne participent pas à la réduction de la mortalité maternelle et infantile.
En effet, en cas d’urgence ou de complications, lors de la grossesse ou de l’accouchement, les femmes de ces villages insulaires courent le risque de perdre leur bébé. Certaines, y laissent leur vie.
«Ce qui m’a le plus frappé, c’est le cas d’une femme qui habite ici et qui portait une grossesse précieuse de cinq mois. Elle présentait des œdèmes et lorsqu’on l’a évacué à Kaolack avec tout le parcours pénible qu’elle a fait son bébé est finalement décédé », atteste l’ICP du poste de santé de Bassar.
PRISE EN CHARGE MEDICALE
PERSONNEL QUALIFIE INSUFFISANT, RETARD DANS LES CPN…
Les contraintes dans la prise ne charge de la santé des populations des îles du Saloum, diffèrent d’un poste de santé à une autre. Au poste de santé de Diamniadio qui polarise trois autres villages. Dans ce poste, 90% des consultations viennent du village de Diamniadio.
La sous fréquentation des autres villages s’explique par l’accès difficile à ce poste de santé. «Les populations préfèrent prendre la pirogue (courrier), pour aller se soigner à Foudiougne. Cette pirogue desserve quotidiennement Foundiougne avec 700 Fcfa. Les populations la préfèrent à l’achat de 3 700 Fcfa de carburant pour venir au poste de santé de Diamniadio », constate l’ICP.
A ces difficultés d’accès au poste de santé, s’ajoute l’insuffisance de personnel qualifié. Il n’y a qu’un seul personnel médical au poste de santé de Diamniado. Il s’agit de l’ICP, pas de sage femme. Cette situation pose de réels problèmes de santé de la reproduction. « Il n’y a pas de sage femme. Alors que la sage femme est plus qualifiée que l’infirmier pour les services de la maternité
On est obligé de recourir aux matrones qui assurent les services. Et dés fois, elles font face à des situations qui les dépassent. Surtout, quand je suis absent », signale l’ICP de Diamniadio, Ibrahima Sarr. Cette insuffisance de personnel qualifié est aussi notée au poste de santé du village de Bassar qui couvre 3 100 habitants, dont une fréquentation de 70% de la population.
Le plaidoyer de l’infirmier, chef de poste porte sur l’affectation d’un assistant. « En cas d’absence de la sage femme ou de l’infirmier, il n’y a aucun personnel qualifié pour les services de soins ou de maternité», plaide El Hadj Sarr, qui exige une séparation des locaux. Ici, la maternité et l’infirmerie se partagent le même local. Ce partage, relève-t-il, constitue aussi une entrave à l’offre de services. Et, la prise en charge de la santé de la mère et de l’enfant reste le principal problème des acteurs de la santé dans ces villages insulaires du Delta du Saloum. Dans ces localités, il a été constaté, une fréquentation tardive des femmes enceintes dans les structures de santé. Alors que 150 grossesses ou naissances sont attendues par an.
Arrivée tardive des femmes en consultation prénatale
«La réalité ici, c’est que les femmes arrivent tard en consultation prénatale. Elles cachent leur état. Ce qui fait qu’en cas de complications, elles ne sont pas très tôt suivies», regrette El Hadj Sarr, ICP de Bassar. Toutefois, les ICP de Diamniadio et de
Bassar se félicitent des avancées notées dans l’utilisation des méthodes de planification familiale. Un taux avoisinant 19% a été enregistré à Diamniadio. Des progrès réalisés avec la position ou le soutien des hommes. « Ici, les hommes ne constituent pas une barrière à la PF. Ils n’interdisent pas à leur femme la planification familiale », se félicite l’ICP du poste de santé de Bassar El Hadj Sarr.
Ailleurs, les villages insulaires du département de Foundiougne enregistrent des maladies diarrhéiques. Et, la cause de ces maladies les plus récurrentes dans cette zone, demeure le manque d’eau potable. « La population de manière générale, se ravitaille à l’eau de puits, impropre à la consommation. Leur forage étant en panne », faitil savoir. Les villages insulaires du département de Fatick, sont aussi le nid de maladies et d’infections pulmonaires.
En dehors de ces villages du Delta du Saloum, la caravane des l’association de l’association des journalistes en santé, population santé et Développement, en partenariat avec l’ONG « Save the Children», s’est rendue au district de santé de Djofyor et au centre de santé de Niakhar. Motif, s’enquérir de l’état de la prise en charge de la santé des populations dans ces localités de Fatick.