LA DÉFENSE BOYCOTTE L’AUDIENCE ET RÉCUSE LE JUGE AMADOU BAL
Refus de la Cour suprême de surseoir à statuer sur le dossier Karim et Cie

Devant le refus du juge de renvoyer l’examen de leur recours ou de surseoir à statuer, les avocats de Karim Wade et ceux de Bibo Bourgi ont opté pour le boycott de l’audience de la Cour suprême. L’audience s’est bel et bien tenue, mais la défense récuse le juge Amadou Bal. L’affaire a été mise en délibéré jusqu’au 20 août prochain.
Le bras de fer était attendu. Il a bien eu lieu. La tension est vite montée dès le début de l’audience de l’examen, hier, des sept recours aux fins d’annulation de l’arrêt rendu le 23 mars dernier, par la Cour de répression de l’enrichissement illicite (Crei). La Chambre criminelle de la Cour Suprême a été saisie d’un pourvoi en cassation de cet arrêt condamnant Karim Wade à 6 ans de prison ferme et à une amende de 138 milliards 239 millions 086 mille 396 FCfa.
L’affaire a été mise en délibéré jusqu’au 20 août prochain, à la suite d’un débat ponctué par des demandes de renvoi, de sursis à statuer et de récusation du juge Amadou Bal. D’emblée, les avocats de l’ancien ministre ont récusé l’assesseur du premier président de la Cour suprême, Amadou Bal, qu’ils qualifient de «partial» pour avoir occupé les fonctions de Directeur de cabinet du ministre de la Justice d’alors, Aminata Touré.
Me Ciré Clédor Ly et Cie ont demandé la récusation du juge qui, disent-ils, «avait coordonné la traque des biens mal acquis et plus particulièrement les poursuites contre Karim Wade» sous la tutelle de Mimi Touré. «Il (Amadou Bal) a reçu régulièrement les comptes rendus du Parquet spécial», rappelle Me Ly.
La défense boycotte l’audience
Toutefois, le président de la Cour suprême a pris acte de la demande de récusation des avocats de Karim Wade. Même si la Cour a estimé que «le dossier était en état, elle a cependant rejetté la demande de renvoi des avocats de la défense».
Sur le sursis à statuer, le président Mamadou Badio Camara a précisé que la Cour suprême, saisi d’un recours, ne peut pas surseoir à statuer pour permettre à la Cour commune de justice et d’arbitrage (Ccja) de l’Ohada de se prononcer.
Cette décision de la Cour a provoqué le boycott des conseils de Karim Wade et ceux de Ibrahim Aboukhalil Bourgi dit Bibo qui se sont retirés en cours d’audience, au motif qu’«ils ne sont plus dans un procès juste et équitable». «La loi organique sur la Cour suprême prévoit que lorsqu’un pourvoi vous est signifié vous avez un délai de deux mois pour répondre.
Le pourvoi de Karim Wade nous a été signifié le 15 juillet et le délai expire le 17 septembre. C’est là un délai minimal pour le respect des procédures», plaide Me Leyti Ndiaye, l’avocat de Bibo. Il réclame, en conséquence, des «garanties minimales» pour un procès «juste et équitable».
L’enjeu du temps mort demandé par la défense
En fait, ce pourvoi en cassation devant la Ccja est d’un enjeu énorme quant au volet international du dossier de Karim Wade. Me Leyti Ndiaye et Cie espéraient une décision favorable de la Cour d’Abidjan, avant le verdict de la Cour suprême. C’était l’occasion rêvée pour faire «pression sur la Cour suprême».
Mais le Ministère public a semblé comprendre la stratégie des avocats de Wade-fils et Cie, qui ont demandé, en vain, un «temps mort».
C’est que le dénouement de l’affaire Karim Wade à l’échelle internationale pourrait influer sur la décision de la Cour suprême. Me Ndiaye a estimé, par ailleurs que la Cour suprême devrait surseoir à statuer, au motif que «l’arrêt de la Crei a été frappé d’un pourvoi en cassation devant la Cour commune de justice et d’arbitrage (Ccja) de l’Ohada».
«L’article 14 du traité de l’Ohada stipule que lorsque que la Ccja est saisie, la juridiction nationale qui est saisie du même pourvoi doit surseoir à statuer». Les conseils de Bibo Bourgi estiment notamment que le juge suprême, par application des dispositions de la loi organique, devrait surseoir à statuer de manière à permettre à la Cour d’Abidjan de se prononcer.
Le Parquet général requiert une administration séquestre et la confiscation de 1/5 des biens des mis en cause
Les plaidoiries de Me Leyti Ndiaye et Cie ont été balayées d’un revers à la main par l’avocat général, près la Cour suprême. Ousmane Diagne est parvenu à faire retenir le dossier. Il s’est opposé au renvoi ainsi qu’à la demande de surseoir à statuer.
Le magistrat a précisé que le juge de la Cour suprême, saisi d’un recours, ne peut pas surseoir à statuer pour permettre à une Cour de justice de l’Ohada de se prononcer.
Dans son réquisitoire, le Parquet général est revenu sur les mesures de confiscation et de mise sous administration provisoire des biens de Karim Wade et ses présumés complices. Il a demandé la désignation d’une administration séquestre et la confiscation de 1/5 des biens des mis en cause, au lieu d’une confiscation totale.