LES DERNIERS RÊVES ARTISTIQUES DE SOULEYMANE KEITA
Dakar, 24 juil (APS) - L’artiste-peintre Souleymane Keita, décédé samedi à l’âge de 67 ans, avait des projets, dont le premier, personnel, était la création à une cinquantaine de kilomètres de Dakar d’un espace culturel dans lequel il voulait rassembler ses œuvres exposées dans des galeries à travers le monde.
‘’Il est (…) venu le temps de mettre sur pied un espace culturel, entre quatre murs. J’ai plein d’œuvres d’art qui sont dans des galeries en France, aux Etats-Unis, je veux les rapatrier. C’est sur ça que je travaille’’, avait-il dit lors de l’émission ‘’Culture en fête’’, diffusée le 21 avril 2012 sur la radio privée Sud Fm.
Alors qu’il venait de recevoir le Grand Prix du chef de l’Etat pour l’ensemble de son œuvre, Souleymane Keita avait dit son ‘’devoir’’ d’assumer cette distinction en mettant en œuvre des projets personnels et en rappelant les préoccupations des artistes.
Souleymane Keita est considéré comme l'un des précurseurs de la création contemporaine au Sénégal. Il a étudié à l’Ecole nationale des Beaux-Arts de Dakar, sous la direction d’un autre peintre, Iba Ndiaye (1928-2008). C’est en 1969 qu’il a commencé à exposer ses œuvres aux quatre coins du monde.
Au sujet de la Biennale de l’art africain contemporain (Dak’Art), il avait rappelé que les artistes n’avaient pas encore eu tout ce qu’ils recherchaient à travers l’organisation de cette manifestation dans la capitale sénégalaise.
‘’Nous voulions que Dakar soit une plaque tournante pour le marché de l’art’’, rappelait-il, relevant que ‘’beaucoup de gens se battent pour récupérer cette biennale’’. ‘’Je ne citerai pas de personne ou de pays, mais si nous ne sommes pas vigilants, d’ici quelques temps, nous aurons des difficultés pour organiser la biennale’’, avait-il averti.
Il ajoutait : ‘’Ce serait dommage, parce que la pression va être trop forte et il va de plus en plus être question d’argent. Il faut qu’on travaille à pérenniser la biennale, parce que c’est très important pour la jeune génération. C’est une question de volonté politique. On ne peut forcer aucun Etat à le faire.’’
Pour Souleymane Keita, il est urgent de créer un musée d’art contemporain qui, selon lui, ‘’revêt une importance capitale’’. ‘’Cela peut, disait-il, inciter des personnes qui hésitaient à s’intéresser au domaine de l’art à avoir confiance et à investir dans le secteur.’’
Il était convaincu que, ‘’pour la reconnaissance des artistes locaux et du reste du continent, ça doit être quelque chose de nouveau, d’original et de simple’’ où pourraient être mises des œuvres d’artistes comme Iba Ndiaye, Ousmane Faye, Seydou Barry…
‘’Ça aurait été tellement intéressant d’avoir un endroit où on pourrait trouver les œuvres de ces artistes ainsi que des œuvres monographiques’’, soutenait Keita, estimant toutefois que le problème est politique’’.
Concernant l’Ecole des Beaux-Arts, il s’agit selon lui de savoir jusqu’à quel niveau l’Etat est prêt à hisser cette institution à un niveau lui permettant de remplir ses missions académiques.
‘’L’école n’est pas dans un bon état. Tous les deux ans, on entend dire qu’elle a été déplacée. Elle n’a pas un budget à la hauteur de ses missions’’, déplorait l’artiste, par ailleurs préoccupé par le développement d’un mécénat d’art.