SRAJ : DES DÉFIS A RELEVER CHEZ LES JEUNES DE ZIGUINCHOR
Ziguinchor, 2 avr (APS) - L'accès des jeunes à l'information et aux services relevant de la santé reproductive demeure problématique dans la région de Ziguinchor (sud) dont la plupart des communes font face à de nombreux handicaps dans ce domaine, a constaté l'APS.
Ce constat a été fait par une équipe de journalistes sénégalais en déplacement dans cette région, pour des observations de terrain sur le thème de la Santé de la reproduction des adolescents et des jeunes (SRAJ) et de l'accès des jeunes aux services de planification.
Scolarisés, actifs ou en apprentissage d'un métier, les jeunes de Ziguinchor semblent avoir commun un même problème d'accès à l'information et aux services de santé adaptées à leur âge et à leurs besoins.
Interrogés dans leurs établissements, les rues de la capitale du sud, au marché devant leurs étals ou au cours d'entretiens dans les points de stationnement de motos-taxis, garçons et filles âgés de 13 à 18 ans ont confessé les mêmes difficultés.
Ils disent avoir du mal à accéder à des informations et des services conviviaux qui leur permettraient d'appréhender les problèmes liés à leur santé sexuelle et reproductive.
Des clubs d'éducation à la vie familiale (EVF) en léthargie dans les collèges d'enseignement, permettent de confirmer cela, de même que le manque de professeurs ou de maîtresses d'économie familiale, l'inexistence d'espaces-jeunes, entre autres situations.
Ziguinchor ne compte par ailleurs qu'un seul centre conseil adolescents (CCA), en "état de délabrement total", alors que les différentes structures de santé ne disposent pas d'espace dédié à l'accueil et la prise en charge de la santé reproductive des jeunes.
Dans la commune de Niaguiss, à 18 km de Ziguinchor, en passant par Fanda et Djifangor, le CEM de Agnack, par exemple, fait état de "difficultés énormes pour les jeunes élèves" en quête d'information sur leur santé sexuelle et sur les services disponibles pour se protéger des maladies sexuellement transmissibles.
"On ne sait pas où se tourner lorsqu'on a besoin de se confier ou d'avoir des informations sur les services disponibles en matière de santé reproductive", a confié Aliou Kama, élève en 3e et président du gouvernement scolaire.
Porte-parole du jour du groupe, il a expliqué que les informations disponibles pour les jeunes proviennent du professeur de Sciences de la vie et de la terre qui consacre des minutes de son cours à leur prodiguer des connaissances sur la santé reproductive.
Timides face au groupe de journalistes venus de Dakar accompagnés de quelques confrères de la région, ces élèves de 3e se sont confiés beaucoup plus facilement lors d'entretiens groupés qui ont suivis la rencontre avec le principal et quelques professeurs dans la bibliothèque de l'école.
Manque d’informations, non-accompagnement des parents sur les questions de sexualité et de santé reproductive, nombre élevé de grossesses précoces, autant de problèmes qui sont revenus constamment dans les échanges.
"Les parents sont les premiers responsables, puisque rares sont ceux qui discutent avec leurs enfants en âge de puberté sur les questions liées à la sexualité pour les protéger contre les grossesses précoces, source de déperdition scolaire", a soutenu Maimouna Coly.
Depuis le retrait d'un programme de l'USAID sur les violences basées sur le genre en 2009, toutes les activités de sensibilisation sur la santé sexuelle et reproductive ont cessé dans cet établissement.
Même situation au CEM Tété Diadhiou, à Escale, un quartier de Ziguinchor dont l'établissement compte un Club d'éducation à la vie familiale (EVF).
"Aujourd'hui, le rôle longtemps joué par ces clubs dans la conscientisation des jeunes et des adolescents, n'est plus le même du fait d'un manque de moyens pour dérouler les activités de sensibilisation et de mobilisation sociale", a expliqué Ady Diankha, coordonnateur régional des clubs EVF.
Les Leaders élèves-animateurs (LEA) formés à intervenir auprès de leurs pairs par les professeurs relais-techniques (PRT), essaient avec les moyens du bord de mener des activités d'information et de sensibilisation sur la santé sexuelle et reproductive.
Selon Rougyiatou Sarr, LEA dans le club EVF, élèves et professeurs sont obligés de cotiser "pour faire une mobilisation, louer un matériel de sonorisation, inviter un groupe de danse ou de théâtre afin de faire passer les messages de prévention"
Sans animation, les élèves ne répondent pas aux conférences, expositions ou autres activités de sensibilisation et d'information organisées par le club, a-t-elle renseigné.
Les élèves du CEM Baïla, situé dans la commune de Bignona, à une cinquantaine de kilomètres de Ziguinchor, disent également être confrontés aux mêmes problèmes.
"Nous n'avons pas d'espaces jeunes ou de centre-conseils où des services liées à la santé de la reproduction sont offerts en toute confidentialité, comme le dépistage, la planification entre autres", a souligné Djibril Bodian devant ses camarades.
Pour sa camarade de classe Khady Coly, les parents accompagnent rarement leurs enfants dans leur éducation sexuelle, considérant "toujours tabou les échanges sur ce sujet entre adultes et jeunes", alors qu'une bonne de la tranche d'âge (15-24 ans) est active sexuellement). Selon la dernière Enquête démographique (EDS) de 2013, 30% des jeunes sont actifs sexuellement dès l'âge de 15 ans.