LA VÉRITÉ SUR LES MONTANTS DE LA SUBVENTION ACCORDÉE PAR L’ÉTAT À LA SENELEC
Invité récemment sur le plateau de Dakarmatin, le Dr Abdourahmane Diouf est revenu sur les raisons de la hausse des prix de l’électricité qu’il explique par une suppression d’une subvention de 100 milliards de francs CFA.
À côté des polémiques politico-juridico-administratives qui continuent de polluer le débat public, la Présidentielle de février 2024 reste très rythmé par le débat autour du coût de la vie et du pouvoir d’achat des Sénégalais. Invité récemment sur le plateau de Dakarmatin, le Dr Abdourahmane Diouf est revenu sur les raisons de la hausse des prix de l’électricité qu’il explique par une suppression d’une subvention de 100 milliards de francs CFA.
Fidèle à sa réputation, le candidat à la candidature pour la Présidentielle, Dr Abdourahmane Diouf, continue son marquage à la culotte contre le candidat de la majorité Amadou Ba et son gouvernement. Invité récemment sur le plateau de Dakarmatin avec Pape Alé Niang, il revenait sur les raisons de la cherté du prix de l’électricité. Il disait : ‘’Cette question est très simple. En vérité, c'est l'État qui mettait 100 milliards F CFA au titre de la subvention de l'électricité. Maintenant qu'il a des difficultés, l'État a donné en sourdine des instructions à la Senelec pour augmenter les prix de manière à couvrir ces 100 milliards. C'est aussi simple que ça. L’État, qui mettait 100 milliards, ne le fait plus. Et la Senelec l’a répercuté sur le consommateur.’’
Joint par téléphone suite au passage du ministre chargé des Énergies devant la représentation nationale, le leader du parti Awalé, malgré un calendrier qu’il dit chargé, a tenu à apporter quelques précisions. ‘’Ce que je sais est que l’augmentation vient d’une subvention de 100 milliards F CFA que le gouvernement devait donner à la Senelec et qu’il a retirée. Ce qui fait que la Senelec a répercuté cette subvention sur les prix. On a fait payer le prix fort au client. Maintenant, je ne sais pas c’est 100 milliards de quoi, mais il y avait bel et bien ce gap de 100 milliards et c’est le client qui l’a payé’’, soutient-il non sans renvoyer à un de ses collaborateurs, Abdou Karim Ly, le chargé des questions de l’énergie.
Pendant ce temps, dans ses différentes sorties, le gouvernement continue de communiquer sur une enveloppe de 600 milliards destinée à la subvention des hydrocarbures. Ingénieur électricien, le chargé des questions d’énergie à Awalé précise : ‘’En fait, ce qu’il faut savoir, c’est qu’il y a la subvention globale qui est allouée aux hydrocarbures (électricité, produits pétroliers, gaz butane). Dans cette enveloppe, il y a une partie qui concerne les hydrocarbures destinées à la production de l’électricité. Une partie de cette subvention représentant près de 100 milliards a été enlevée et c’est ce qui a été à l’origine de la hausse que nous avons connue.’’
À l’appui de son propos, le délégué national chargé des questions énergétiques renvoie à un document du ministère des Finances et du Budget intitulé ‘’Feuille de route pour la suppression des subventions dans le secteur de l’énergie à l’horizon 2025’’.
EnQuête a pu accéder à ce document posté sur le site officiel du ministère le 7 janvier 2023. Selon le document, le Sénégal dépense plus de 4 % de son PIB dans les subventions d’électricité, des produits pétroliers (essence, supercarburant et gasoil) et du gaz butane. ‘’La subvention de l’électricité prend la forme d’une compensation tarifaire à verser à la société nationale d’électricité. Dans les conditions économiques actuelles, cette subvention devrait coûter 279,8 milliards F CFA au budget de l’État en 2023…’’, soulignait la note qui mettait en garde : ‘’Au total donc, les subventions énergétiques (électricité plus autres produits pétroliers et gaz butane, NDLR) franchiront la barre des 800 milliards F CFA en 2023, après avoir coûté 750 milliards en 2022. Ces subventions sont fortement régressives et limitent les marges de manœuvre budgétaires pour des dépenses sociales (santé, éducation) et pour les infrastructures prioritaires’’.
L’État reste très vague sur les chiffres
C’est dans ce cadre que l’État avait en fait entrepris, en accord avec les bailleurs de fonds, le programme de réduction drastique des subventions destinées non seulement à l’électricité, mais aussi au supercarburant et au gasoil, dans l’optique de les éliminer complètement en 2025. Il s’en est suivi une batterie de mesures dont celles relatives à l’augmentation des prix de l’électricité. Le document est très clair à ce propos.
‘’Le gouvernement a décidé d’augmenter les tarifs dans les proportions suivantes : +18,97 F CFA par kWh pour la basse tension ; +22,79 F CFA par kWh pour la moyenne tension ; +14,31 F CFA par kWh pour la haute tension’’. Ces mesures, selon les services de Moustapha Ba, devraient permettre à l’État de faire des économies de l’ordre de près de 100 milliards. ‘’Le réajustement tarifaire décrit ci-dessus devrait entrainer automatiquement une économie de 99,7 milliards F CFA pour le budget de l’État.’’ C’est de là que viennent les montants avancés par Dr Abdourahmane Diouf, candidat à la Présidentielle de février 2024.
Reste à savoir si la mesure a été complètement mise en œuvre comme initialement prévu dans la feuille de route ou bien des ajustements ont été fait. Si l’on en croit le ministre des Finances, en tout cas, tout n’a pas été mis en œuvre comme initialement prévu.
En effet, pour l’année 2023, il a été prévu de contenir la subvention 450 milliards. Selon le gouvernement, cette enveloppe a finalement été portée à 600 milliards. On ne saurait dire combien dans cette enveloppe est effectivement revenue à la subvention des prix de l’électricité au bénéfice des clients de la Senelec.
En définitive, il faut retenir que, conformément à la déclaration de Dr Diouf, l’Etat avait effectivement décidé au début de l’année de prendre des mesures qui vont lui faire gagner près de 100 milliards sur la subvention des prix de l’électricité. Sur le supercarburant et le gasoil, l’Etat avait prévu des économies de 158,5 milliards F CFA. Ces mesures avaient effectivement entrainé de manière vertigineuse des hausses des prix de l’électricité. Grâce à la grogne des populations, l’Etat a revu dernièrement la structure des prix.
Cet article est produit par l’Alliance des vérificateurs de faits pour l’élection présidentielle sénégalaise de 2024, un groupe de vérificateurs de faits, de médias et d'organisations de la société civile qui luttent contre la désinformation concernant les élections. Vous pourrez suivre les activités du groupe dans nos différentes plateformes, de même que sur le site enqueteplus.com et ses différents supports dans les réseaux sociaux.