LE SÉNÉGAL EXCLUT TOUTE RESTRUCTURATION
Malgré une dette record, le ministre des Finances assure que le pays est solide. Les marchés applaudissent, les obligations grimpent. C'est un pari audacieux pour un pays qui doit déjà composer avec la suspension d'un important programme du FMI

(SenePlus) - Le Sénégal a fermement exclu toute restructuration de sa dette, une annonce qui a immédiatement rassuré les investisseurs internationaux et propulsé les obligations du pays parmi les meilleures performances des marchés émergents cette semaine. Cette décision, confirmée par le ministre des Finances, Cheikh Diba, lors d’un appel avec des investisseurs jeudi, a été saluée par les marchés, entraînant une hausse significative des obligations libellées en dollars du Sénégal, selon des données compilées par Bloomberg.
« Le gouvernement vise à procéder à des opérations de gestion des passifs pour continuer à honorer ses échéances de dette », a déclaré Diba, selon des sources proches du dossier citées par le journal américain. Ces sources, qui ont requis l’anonymat en raison du caractère privé de la réunion, ont également indiqué que le Sénégal ne fait face à aucune pression de liquidité immédiate.
La réaction des marchés a été rapide et positive. L’obligation sénégalaise arrivant à échéance en 2048 a grimpé de 1,6 centime pour atteindre 69,8 cents sur le dollar vendredi, après une hausse de 1,1 centime la veille. Cette performance place le Sénégal en tête des gains parmi les pays émergents, selon Bloomberg.
Cette dynamique intervient dans un contexte où la Cour des comptes a récemment confirmé que la dette publique et le déficit budgétaire national sont nettement plus élevés que précédemment annoncé. Selon ce rapport, la dette a atteint près de 100 % du PIB en 2023, un niveau qui aurait pu justifier des craintes de restructuration.
Malgré ces chiffres préoccupants, le ministre Diba a tenu à rassurer les investisseurs sur la capacité du pays à gérer sa dette sans recourir à une restructuration. « Le gouvernement n’envisage pas de restructuration de la dette », a-t-il affirmé, selon les sources de Bloomberg. Il a également évoqué des options de financement alternatives en cas de retard dans la mise en place d’un nouveau programme avec le Fonds monétaire international (FMI). Parmi ces options figurent l’émission de sukuk (obligations conformes à la charia) et des prêts garantis par des banques de développement.
Le Sénégal espère conclure un nouvel accord de financement avec le FMI d’ici juin. Ce programme fait suite à la suspension d’un précédent accord de 1,8 milliard de dollars par l’institution basée à Washington, en raison d’une enquête sur les finances publiques du pays.
Dans un communiqué publié après l’appel, un porte-parole du ministère des Finances a souligné que le gouvernement envisageait des réformes pour « contenir les dépenses publiques courantes dans le secteur de l’énergie » et poursuivre une « gestion active de la dette ». Le ministre Diba a également indiqué aux investisseurs que le gouvernement prévoyait de réformer les subventions énergétiques, tout en veillant à ce que la population puisse supporter ces mesures.
Les déclarations du ministre reflètent une stratégie équilibrée entre la nécessité de réduire les dépenses publiques et celle de protéger les ménages des impacts économiques. « Le gouvernement doit s’assurer que la population puisse supporter la mesure », ont rapporté les sources citées par Bloomberg.