LES PARENTS D’ELEVES DOIVENT ETRE LES PREMIERS PARTENAIRES DE L’ETAT ET NON LES BAILLEURS DE FONDS
Les parents d’élèves n’occupent pas la place et le rang qui devaient être les leurs dans la conception et la mise en œuvre des politiques éducatives au Sénégal.
Les parents d’élèves n’occupent pas la place et le rang qui devaient être les leurs dans la conception et la mise en œuvre des politiques éducatives au Sénégal. Ils sont placés par l’Etat du Sénégal derrière les bailleurs de fonds qui, pourtant, investissent pour l’éducation des enfants du Sénégal moins que les parents. C’est l’avis de Dr Ibrahima Giroux, enseignant-chercheur à l’université Gaston Berger de Saint-Louis.Par Abdoulaye KAMARA –
Plusieurs politiques publiques en matière d’éducation ont été expérimentées au Sénégal. La plupart n’ont pas donné les résultats escomptés.
Les cas d’échec sont imputables à la place que l’Etat du Sénégal donne aux parents d’élèves dans la conception et la mise en œuvre desdites politiques. C’est la sentence prononcée par le Dr Ibrahima Giroux, enseignant-chercheur à l’Ufr des sciences de l’éducation, de la formation et du sport de l’université Gaston Berger de Saint-Louis.
Il donne ce conseil aux autorités étatiques en charge de l’Education nationale : «Si on veut réparer les erreurs commises dans la conception et la mise en œuvre des politiques publiques en matière d’éducation, on doit commencer par respecter la famille sénégalaise, par respecter le parent sénégalais. Le respect dans le sens où on considère le parent comme le premier partenaire de l’Etat du Sénégal. Parce que le parent sénégalais dépense plus que la Banque mondiale et l’ensemble des partenaires réunis en matière d’éducation. On devait donner un respect 4 fois plus élevé aux parents qu’on en donne aux partenaires. En les considérant non pas comme des bénéficiaires, mais comme ce qu’ils sont, c’est-à-dire des partenaires. Ce sont eux qui dépensent le plus après les dépenses de l’Etat.» M. Giroux, Directeur général du cabinet Educhance Coaching, était à Bonconto (département de Vélingara), mardi et mercredi passés, pour participer à la formation des moniteurs des classes préscolaires communautaires initiées par le Conseil municipal. Comment s’y prendre concrètement ? Dr Giroux enseigne : «Du point de vue opérationnel, il faut, dans les réformes du système éducatif à venir, que l’Etat investisse dans le dialogue. Et c’est là que les collectivités territoriales entrent en ligne de compte. Il faut que l’on discute avec les communautés du nouveau projet éducatif sénégalais. Comment voulez-vous qu’on éduque l’enfant sénégalais de sorte que ça ne soit pas une question seulement de spécialistes ? C’est aussi une question de souveraineté, et la souveraineté appartient au Peuple.
Il faut prendre le temps de discuter avec le Peuple sénégalais et l’entendre sur sa vision de l’éducation. Le Peuple interrogé va parler de valeurs, d’éducation aux métiers pour gagner sa vie, il va parler de choses vitales pour éduquer les enfants.» Mais que faisons-nous en ce moment dans les salles de classe ? Dr Giroux répond : «Nous avons mis des disciplines qui n’ont pas de sens dans la vie de nos enfants.» Et puis de proposer : «les collectivités territoriales sont les mieux placées pour engager ce dialogue, déjà pour entendre les parents sénégalais, pour intégrer les familles, en particulier dans le préscolaire, non seulement dans la gouvernance mais aussi dans la mise en œuvre des activités. Il faut arriver à «désophistiquer» les programmes du préscolaire. Notre préscolaire est hyper sophistiqué, on pense que c’est quasiment un programme universitaire, tellement il est sophistiqué. Il faut aller dans le sens d’alléger le programme préscolaire. Au préscolaire, il ne s’agit pas de faire des Einstein, il s’agit d’essayer de donner l’envie aux enfants, de les faire aimer l’école, on est dans les dimensions émotionnelles, dans les dimensions patriotiques, pour construire les fondations de la citoyenneté», a-t-il tranché net.