LE NEW YORK TIMES RÉVEILLE LA MÉMOIRE DE MARIAMA BÂ
Le quotidien new-yorkais fait revivre le destin exceptionnel de cette romancière sénégalaise. De l'École Normale de Rufisque aux plus hautes distinctions littéraires, elle a tracé un chemin d'émancipation pour des générations de femmes
(SenePlus) - Dans un portrait saisissant consacré à Mariama Bâ, le New York Times (NYT) révèle le parcours exceptionnel d'une femme qui a marqué la littérature africaine et le combat pour les droits des femmes au Sénégal post-colonial.
Née le 17 avril 1929 à Dakar, Mariama Bâ grandit dans un contexte où, comme le souligne le NYT, les opportunités pour les filles étaient rares sous le régime colonial français. Élevée par sa grand-mère dans une famille musulmane Lebu après la mort précoce de sa mère, elle bénéficie du soutien crucial de son père, Amadou Bâ, fondateur du Mouvement Autonomiste Africain.
"Vous avez un don", lui dit sa directrice d'école, rapporte le quotidien américain. À 14 ans, ses résultats exceptionnels la distinguent de ses camarades destinées à devenir secrétaires. "Tout le monde sauf vous. Vous êtes intelligente", lui déclare Berthe Maubert, sa directrice, l'orientant vers l'École Normale de Rufisque.
Son premier roman, "Une Si Longue Lettre", publié en 1979, remporte le premier prix Noma pour l'édition en Afrique. Selon le New York Times, ce livre figure parmi les 100 meilleurs ouvrages sur l'Afrique du XXe siècle selon la Columbia University Libraries. "Mon cœur se réjouit chaque fois qu'une femme émerge de l'ombre", écrit-elle dans ce roman devenu un classique.
"Nous devons donner, dans la littérature africaine, aux femmes noires une dimension à la mesure de leur engagement, aux côtés des hommes, dans les batailles pour la libération", déclare-t-elle devant l'Assemblée nationale du Sénégal en 1979, comme le rapporte le Times.
Décédée prématurément d'un cancer du poumon le 17 août 1981 à l'âge de 52 ans, Mariama Bâ laisse un héritage considérable. Le journal américain souligne qu'elle a fondé le Cercle Fémina, une organisation féministe, et qu'une école porte son nom sur l'île de Gorée depuis 1977, un hommage du président Léopold Sédar Senghor.
Son œuvre, notamment "Une Si Longue Lettre", continue d'être largement étudiée dans les écoles d'Afrique de l'Ouest. Comme le rappelle le New York Times, citant la journaliste Kidi Bebey dans Le Monde en 2021, son roman "questionne la condition féminine : les codes régissant les relations avec les hommes, l'importance des castes et, surtout, la polygamie."
À travers ses écrits et son engagement, Mariama Bâ a incarné la voix d'une génération qui se découvrait dans une nation nouvellement indépendante, laissant une empreinte indélébile dans la lutte pour l'égalité des sexes au Sénégal et au-delà.