L’ONU EXIGE UNE APPLICATION STRICTE DE LA LOI
Malgré l’interdiction de l’excision depuis plus de deux décennies, onze fillettes âgées de cinq mois à cinq ans ont été mutilées le 15 février dernier à Goudomp, dans la région de Sédhiou.

Malgré l’interdiction de l’excision depuis plus de deux décennies, onze fillettes âgées de cinq mois à cinq ans ont été mutilées le 15 février dernier à Goudomp, dans la région de Sédhiou. Face à cette violation grave des droits des enfants, l’UNICEF, l’UNFPA et ONU Femmes dénoncent un recul inquiétant et appellent à l’application stricte de la loi pour mettre fin à cette pratique néfaste.
L’excision, pourtant interdite au Sénégal depuis plus de vingt ans, continue de sévir dans certaines communautés. Le samedi 15 février 2025, dans le département de Goudomp, région de Sédhiou, onze fillettes âgées de cinq mois à cinq ans ont été excisées collectivement. L’information, révélée par les services de protection de l’enfance et relayée par les agences onusiennes, a suscité une vive indignation.
Dans un communiqué publié le 21 février, l’UNICEF, l’UNFPA et ONU Femmes dénoncent avec fermeté cet acte barbare, qui survient quelques jours seulement après la Journée internationale de tolérance zéro contre les mutilations génitales féminines (MGF). Ces organisations regrettent que, malgré les efforts du gouvernement et les avancées législatives, cette pratique persiste dans certaines régions, souvent avec la complicité de membres de la communauté.
Si aucune interpellation n’a encore eu lieu, les agences onusiennes saluent le travail des forces de l’ordre, des services de santé et des acteurs engagés dans la lutte contre les MGF.
Elles rappellent l’urgence d’appliquer la loi pour traduire en justice les auteurs et complices de ces crimes.
Un fléau aux conséquences dramatiques
L’excision est une atteinte grave aux droits fondamentaux des filles et des femmes. Ses conséquences physiques et psychologiques sont profondes et irréversibles : douleurs aiguës, infections, complications obstétricales, traumatismes psychologiques et, dans certains cas, décès. « L’excision n’est pas seulement une atteinte à l’intégrité physique des filles, c’est une négation de leur avenir », a déclaré Jacques Boyer, Représentant de l’UNICEF au Sénégal. Tracey Hebert-Seck, Représentante de l’UNFPA, s’indigne également : « À cinq années de l’échéance des ODD de 2030, un seul cas est de trop ! Il est impératif de prendre nos responsabilités afin qu’aucune fille ne subisse encore ce sort. »
Arlette Mvondo, de son côté, souligne le paradoxe sénégalais : « Il est difficile de comprendre qu’une violation aussi grave des droits fondamentaux des filles ait lieu dans un pays pionnier dans la lutte contre les MGF. ». Les chiffres confirment l’ampleur du problème : au Sénégal, près de deux millions de filles et de femmes ont subi des MGF. Parmi elles, 12,9 % ont été excisées avant l’âge de 15 ans, et .80 % avant leur cinquième anniversaire.
Une loi en vigueur mais insuffisamment appliquée
Le Sénégal a pourtant été l’un des premiers pays de la région à criminaliser l’excision avec l’adoption en 1999 de la loi 99-05. Celleci pénalise non seulement la pratique elle-même, mais aussi son instigation, sa préparation, son assistance et son non-signalement. La Constitution sénégalaise, dans son article 7, garantit également la protection de toute personne contre toute forme de mutilation physique. Mais malgré ces avancées législatives, l’application de la loi reste insuffisante. Dans certaines communautés, l’excision demeure profondément ancrée dans les traditions et continue d’être pratiquée en secret.
Face à cette situation, l’UNICEF, l’UNFPA et ONU Femmes appellent à un sursaut collectif. Elles exhortent les autorités à poursuivre systématiquement les responsables de ces actes et à renforcer la sensibilisation pour éradiquer définitivement cette pratique. Depuis 2008, l’UNICEF et l’UNFPA soutiennent la mise en œuvre de la Stratégie nationale pour l’abandon des MGF. Ces agences collaborent avec les ministères, les collectivités territoriales et la société civile pour lutter contre les violences et les pratiques néfastes visant les femmes et les filles.
L’excision n’est pas une fatalité. Si la loi est appliquée avec rigueur et que les efforts de sensibilisation se poursuivent, il est possible d’en finir définitivement avec cette pratique d’un autre âge. Pour cela, un engagement ferme du gouvernement, des autorités locales et de la société dans son ensemble est indispensable.