Equipe de France: sur les traces de... 'Toto' Martial, des Ulis aux Bleus, comme Evra et Henry

"Voilà, c'est juste là qu'il habitait, Anthony Martial": Gaye Niakaté a désormais l'habitude de faire visiter les Ulis, cette commune d'Essonne qui a assisté aux débuts du discret phénomène, mais aussi d'un autre international présent à l'Euro-2016, Patrice Evra, et d'un glorieux ancien, Thierry Henry.
"Une fois c'étaient des journalistes anglais, j'ai dû passer le téléphone trois fois à ma femme (qui parle cette langue)!", se marre ce père de famille de 36 ans, qui travaille à la mairie des Ulis, à une trentaine de kilomètres au sud-ouest de Paris.
L'ancien immeuble des Martial, donc. Barrée d'un panneau "Jeux de ballons interdits", la tour Janvier compte une dizaine d'étages blanc cassé, dans le quartier des Bergères. "Une résidence tranquille", très verte et toute proche du centre ville, de la mairie et du stade Jean-Marc-Salinier.
"Ca fait longtemps qu'on entend parler de 'Toto'", raconte Gaye Niakaté. "Du genre: +Tiens il a marqué sept, huit, neuf buts sur un match.+ Ce n'est pas courant quand même!"
Son frère, Mahamadou Niakaté, directeur sportif adjoint du Club omnisport des Ulis, complète: "Il a été surclassé à tous les âges, il était vraiment très précoce, au-dessus de tous les autres."
Licencié au CO Les Ulis de 2001 à 2009, Martial a ensuite continué sa progression fulgurante. Recruté par Lyon, transféré à Monaco, l'imperturbable attaquant tape à 19 ans dans l'oeil de Manchester United lors de l'été 2015, après à peine une cinquantaine de matches de Ligue 1, à Monaco (11 buts).
"Je vais pas vous dire que je m'attendais à ce qu'il aille aussi vite dans un tel club, mais je n'ai pas tellement été surpris, je savais qu'il allait faire une belle carrière", assure Mahamadou Niakaté, assis sur la banquette du club house du CO Les Ulis, où trône une collection de maillots des anciens du club les plus prestigieux.
- 'Exemple de réussite' -
Celui de Martial y figure évidemment en bonne place. "C'est une grande fierté pour Les Ulis, un exemple de réussite pour les jeunes, pas seulement dans le football d'ailleurs", se réjouit la maire (sans étiquette) de la commune, Françoise Marhuenda. "Cela représente des valeurs comme le respect, le fair-play, le dépassement de soi et véhicule une image positive de la ville."
D'autant que le jeune homme est resté attaché aux Ulis. Il n'a pas hésité quand Gaye Niakaté lui a proposé de "coacher" des équipes de jeunes le temps d'une soirée de gala le 23 mai, à quelques semaines de l'Euro. Il n'était pourtant pas la tête d'affiche: "Il est jeune, il a encore une longue carrière devant lui tandis que, même s'il n'aime pas que je le dise, Patrice Evra est quand même un peu plus proche de la retraite!"
C'est ce qui rend exceptionnelle cette commune de 25.000 habitants: elle aura deux représentants à l'Euro. "Il y aurait même pu en avoir un troisième si Thierry Henry - qui a l'âge des Ulis (40 ans en 2017, ndlr) - était un peu plus jeune", s'exclame l'ami d'enfance du joueur de la Juventus Turin.
Henry, Evra, Martial, sacrée brochette! "Comment ça s'explique? Ah, ça, c'est la grande question!", sourit Mahamadou Niakaté. "Déjà, on a une ville avec des terrains partout, et puis je pense qu'il faut parler de la qualité des éducateurs, du côté familial du club. Chacun apporte sa pierre à l'édifice, et tout le monde connaît tout le monde, les entraîneurs, les parents, les joueurs..."
- 'Discipline stricte' -
"Après, pour Anthony ou Patrice, ce sont des garçons qui sont déjà vraiment au-dessus du lot", tempère-t-il. "Mais la relation d'honnêteté qu'on a avec les parents fait qu'il y a un climat de confiance qui, peut-être, les dissuade d'aller voir ailleurs."
C'est ce qui s'est passé pour Martial: "Nous lui avions fait signer un accord de non sollicitation (option pour intégrer le centre de formation, ndlr)", explique à l'AFP Gérard Bonneau, chargé du recrutement à Lyon. "Il était jeune et nous l'avions laissé un an de plus aux Ulis avec un suivi particulier, notamment scolaire."
"Il bénéficie d'un environnement familial extraordinaire", poursuit Bonneau, qui se souvient de parents "plus dans l'affectif qu'à regarder la future carrière éventuelle". "Ils voulaient que leur fils soit bien", assure-t-il.
Petit dernier de la famille, il a aussi bénéficié de l'expérience de ses frères aînés, Johann, également professionnel et qui évoluait cette saison au poste de défenseur à Troyes, et Dorian, capitaine de l'équipe première des Ulis, en Division d'honneur.
"Quand il était petit, il avait un sacré caractère, il y avait pas mal d'embrouilles entre nous", se rappelle ce dernier depuis le bord du terrain. "Mais nos parents étaient derrière nous avec leur discipline stricte."
"Il a toujours été attendu depuis tout petit", expose encore Dorian Martial. "Mais on sait qu'il a la tête sur les épaules, et de toute façon, mon père et nous-mêmes, on est derrière lui pour lui rappeler." Quant aux Ulissiens, ils seront là pour l'acclamer.