TEL UN PHENIX !
Portrait d’une journaliste ambitieuse et courageuse, qui s’est imposée avec notamment son émission phare «L’invité de MNF».
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La Directrice générale de 7 TV a été violemment agressée, dans la nuit du jeudi, à coups de couteau. Maïmouna Ndour Faye, 48 ans, connue pour sa liberté et ses idées assumées. Portrait d’une journaliste ambitieuse et courageuse, qui s’est imposée avec notamment son émission phare «L’invité de MNF».
Les soirs à la télé sont devenus «ses soirs». Diction lente mais suave, comme sa démarche qui suggère la sérénité, Maïmouna Ndour Faye a conquis son monde par ses compétences, sa pertinence, son impertinence parfois, faisant d’elle une sorte de Bourdin, moins cru, ou de Ruth Elkrief. Mais d’autres pensent que «L’Invité de MNF» peut aussi être comparée à «The Oprah Winfrey Show !» Elle est entre le bâton de la fermeté et de l’assurance dans ses questions et la carotte du sourire et de la provoc’ pour tirer à son hôte les vers du nez. C’est comme cela que «L’invité de MNF» est devenue un passage presque obligé pour les hommes politiques et des leaders d’opinion en général. Et ça, c’est une forte personnalité et un travail de pro qui l’a imposé. Mais ce fruit mûr a été le fait d’un jardin bien arrosé de courage et d’abnégation. Dans un portrait qu’il lui a consacré dans son édition datée du 8 mars 2018, le journal EnQuête, sous la plume de Bigué Bop, décrit en ces termes la journaliste sauvagement agressée dans la nuit du jeudi. «Je ne regarde pas les gens en insistant sur le sexe. Pour moi, nous sommes tous des êtres humains. Je perçois le milieu comme un espace où il faut se faire une place à force de travail, de persévérance, d’abnégation, de détermination», disait-elle. Et dire que c’est ce 1er mars que ces bandits ont choisi pour perpétrer cet acte ignoble contre cette Clara Zetkin au moment où elle s’apprêtait à rejoindre ses pénates après le labeur.
L’enfant de Mboul, une âme généreuse
A la tête d’une entreprise qui emploie plus de 70 personnes, la Pdg de 3M Universel est décrite comme «une brillante élève», qui a fait ses humanités à l’école primaire des HLM Patte d’Oie avant de terminer son cursus à l’école El hadji Mamadou Ndiaye de Ouakam ensuite le CEM de Ouakam et le lycée Galandou Diouf. C’est dans «son» Ouakam où elle est née en 1976, particulièrement au quartier Mboul, qu’elle a été violentée à coups de couteau. Maïmouna Ndour est connue de tous et de toutes. Ayant eu une enfance et une adolescence calme, elle passait inaperçue, partagée entre les cours et ses recherches. Quasiment élevée par sa belle-mère, durant toute son adolescence, elle a toujours été une jeune fille sans problème et aimée de tout le voisinage. D’ailleurs, depuis l’annonce de son agression, le domicile de son père ne désemplit pas. Tous les voisins sont venus compatir. Redevable à son quartier Mboul qui l’a vue naitre, elle œuvre dans le social, si l’on en croit certains témoignages. Jugée «très généreuse», elle a construit une belle maison pour son père et sa belle-mère qu’elle gave de cadeaux et qui ne cessent de prier pour elle. «C’est une dame au grand cœur qui sait aider ses proches et ses voisins», témoigne le voisinage. Il n’est pas rare de la voir distribuer de l’argent ou des vivres à ses voisins qui sont dans le besoin. La mosquée de son quartier, bénéficie également de ses largesses, surtout lors de la conférence religieuse annuelle organisée par les jeunes où elle casque fort. Des actes de bienfaisance qu’elle multiplie durant le mois de Ramadan. Et comme l’a si bien dit une de ses voisines, «tenter de tuer Maïmouna, c’est tuer une famille entière, ces employés, mais aussi tuer tous les espoirs qui reposent sur elle».
Inspirée par Diatou Cissé et Jacqueline Fatima Bocoum
Après l’obtention du baccalauréat littéraire, elle est orientée à la Faculté des lettres et sciences humaines de l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar, précisément au département d’anglais où elle décroche une Maîtrise. Férue de journalisme, elle intègre la rédaction de Walf Quotidien. Dans un portrait qui lui a été consacré dans l’émission «Un jour, une femme» sur iTv en 2018, elle confie : «J’ai démarré dans le journalisme en 2006 en tant que stagiaire à Walf. J’ai pu mettre à profit les vacances de Noël pour intégrer grâce à Diatou Cissé. J’ai été guidée par la passion. J’ai également été inspirée par de grandes journalistes de la Rts comme Jacqueline Fatima Bocoum, Diatou Cissé Coulibaly à qui je voulais ressembler». Toute cette envie débordante de servir et d’informer, surtout dans un milieu où les femmes peinent à prendre le pouvoir, la motive. «Je faisais tout depuis toute petite, et je me suis toujours dit qu’en tant que femme, il n’y a pas un métier qu’un homme peut exercer que je ne puisse pas faire». C’est dit. Et surtout, c’est fait !
De Walf à 7TV
Après quelques mois à Walf Fm, MNF, ambitieuse, curieuse et soif de savoir et d’expérience, embrasse la télévision. «Je dois beaucoup à Canal Infos qui m’a faite et m’a permis de devenir ce que je suis. J’ai pu faire un master en journalisme et communication. Quand je suis allée à Canal Infos, j’ai jugé nécessaire de faire une formation pour compléter un peu le cursus universitaire. J’y ai fait un master en journalisme et communication. C’était comme une validation des acquis professionnels », avait-elle déclaré. Dans un entretien avec Seneweb, Maïmouna Ndour Faye expliquait : «J’ai mis en place l’agence de production audiovisuelle 3M Universel qui, dans un premier temps, se consacrait uniquement à la production de contenus. A partir de 2013, j’ai noué un partenariat avec la 2stv en tant que productrice. J’y animais une émission politique, et je présentais le journal de 20 h. J’étais fortement impliquée dans l’animation de la rédaction. J’ai quitté en 2015, la 2stv pour lancer le site AZactu. C’est là que j’ai décidé de lancer mon projet télé, qui me tenait à cœur. C’était difficile quand même, mais je me suis dite, il faut que je le fasse et finalement la télévision 7tv a été lancée en mars 2018».
MNF : «Chaque fois que je tombe, je me relève»
Maïmouna Ndour Faye a été choisie comme représentante du Sénégal sur invitation personnelle du président Barack Obama pour participer au Forum des jeunes leaders africains consacré à l’autonomisation de la jeunesse, la bonne gouvernance et les possibilités économiques. Mariée, mère de famille, elles est restée très ancrée dans son milieu d’origine. Aînée de sa famille, MNF est «très attachée» à ses valeurs traditionnelles. «D’ailleurs, on ne communique qu’en sérère», confiait-elle. Avec sa grande mère, qu’elle ne cesse de convoquer «sama mame (ma grand-mère)». Cette dernière, Marie Louise Adam Sarr disait : «Je l’ai éduquée comme je l’ai fait pour mes propres enfants. Elle prend soin de moi. C’est d’ailleurs elle-même qui a construit ma maison». Les images sont affligeantes, une dame affalée, baignant dans son sang, appelant au secours. Mais c’est mal connaître MNF, ce phénix : «J’ai également fait preuve de patience et de persévérance, car chaque fois que je tombe, je me relève». Elle est tombée hier. Et elle se relèvera !