L'OMBRE DE MACKY A POLLUÉ L'ATMOSPHÈRE
Accord sur le mode de scrutin et désaccords subséquents
La Commission électorale nationale autonome (Cena) s’est démenée comme un beau diable pour trouver un « consensus », ce vendredi, à propos du mode de scrutin, au regard de la pléthore de listes aux législatives. Le Président de l’institution, Doudou Ndir, a estimé qu’un large consensus s’est dégagé sur la modification de l’article L78 du Code électoral afin de pouvoir permettre à l’électeur de choisir au moins cinq des bulletins au lieu de prendre tous les 47 comme l’exige l’actuel code.
Malheureusement, ce que l’on craignait dans cette chronique s’est produit. La Cena a été clouée au pilori par une partie de l’opposition, celle-là plus radicale, qui a trouvé que l’institution était au garde-à-vous face à un Exécutif qui lui aurait dicté la conduite à tenir.
Les critiques ont été acerbes, venant notamment de certains leaders qui ont parlé de « mascarade » et même de violation du protocole de la Cedeao. Les polémiques vont bon train et la tension est loin d’être amorcée.
On peut, cependant, à l’analyse, s’étonner d’une telle démarche de ces coalitions de l’opposition. La solution proposée va manifestement réduire le temps de vote et permettre de rester dans le timing sans coups férir. Cette situation s’imposait au regard de ces 47 bulletins que les électeurs auraient du mal à prendre tous. Mieux, la Cena a convoqué tout le monde et sur les 47, au moins 44 ont répondu présents. La parole a été donnée à tous. Et la solution qui a emporté la majorité a été adoptée. Alors, on ne pouvait pas avoir mieux. La Cena a fait ce qu’elle a jugé conforme à l’intérêt de l’électeur. Sa démarche ne souffre alors d’aucune ambiguïté.
Contestation de principe
Ce qui nous semble évident par contre, c’est que l’opposition voit, en travers la Cena, l’ombre de Macky. Il ne fait aucun doute que la contestation observée n’a été que de principe. Il s’agit d’une pétition de principe contre ce qu’ils considèrent comme la réalisation du vœu de Macky. Rien de plus. La solution proposée étant l’une des moins mauvaises, l’opposition n’a, a priori, aucun intérêt à s’y opposer si ce n’est pour démontrer au Président de la République qu’elle ne lui fera aucun cadeau.
Elle reste convaincue que la proposition vient du camp présidentiel et ne veut pas apparaître naïve aux yeux d’un adversaire dont elle redoute la fourberie.
S’il y a en effet une réserve à formuler, c’est celle du leader du MPC, Ali Mohamed Séga Camara, qui a estimé que la Cena n’était pas compétente à procéder à la modification des règles électorales.
Celui qui a défié Macky en mettant en place sa propre liste, nous a confié que le rôle de la Cena est de superviser le processus électoral et non de l’organiser.
En clair, pour notre interlocuteur, il appartient au Ministre de l’Intérieur de procéder à la convocation des partis pour discuter de la modification éventuelle des règles.
A l’en croire et pour bien d’autres, le fait que les autorités se cachent derrière la Cena, trahit un dessein forcément malsain.
C’est ce qui a été à la base du tohu-bohu auquel on a assisté.
Rôle du Ministère de l’Intérieur
Bien sûr, on peut légitiment se demander pourquoi le Ministère de l’Intérieur n’a pas lui-même organisé les concertions pour la modification.
Mais, là aussi, les autorités peuvent penser que la Cena était l’institution la plus crédible pour taire la suspicion et aboutir à un consensus.
Toutefois, si cette démarche n’entre pas dans le cadre des compétences de la Cena, on peut estimer qu’il y a eu méprise.
Mais cette méprise n’a aucun impact dès lors que la Cena elle-même ne va pas procéder à la modification en question. Il appartiendra au Président de la République de saisir l’Assemblée nationale parce qu’il s’agit d’une loi.
Et tout indique que Macky va tirer les conséquences de ce qui s’est passé le vendredi afin de demander la modification de l’article L78, malgré la levée de boucliers suscitée.
Une situation favorisée par le fait que tout le monde est en campagne électorale anticipée.