KHALIFA CONTINUE DE HANTER MACKY
EXCLUSIF SENEPLUS - La « royauté », avec ses ors, ses fastes et sa solitude épiée, a ceci de paradoxal : elle incarne le pouvoir, la puissance mais souffre de paranoïa - Il faut arrêter Macky Sall pendant qu’il est encore temps
Une perception très répandue au Sénégal voudrait que la prison soit un raccourci vers le Palais. Même si cette perception ne rencontre pas toujours la réalité, on ne saurait l’ignorer au vu de notre trajectoire politique et du récit des compétitions électorales. Me Abdoulaye Wade est devenu président de la République, en 2000, après plusieurs allers et retours en prison. Idrissa Seck jouissait également d’une belle côte, lors de la présidentielle de 2007, après avoir été privé de liberté. Il sortira finalement deuxième de ce rendez-vous présidentiel. Ce qui est très honorable.
Pour servir son peuple, il faut toujours se préparer à entrer dans le « tunnel » qui mène à la « case palais » pour accomplir son destin. Et le destin n’est pas forcément la cour, ses privilèges et ses courtisans. Le destin de la victime de son « excès-llence » souffrant de boulimie de pouvoir, c’est avant tout la conquête de l’estime du peuple et de ceux encore attachés aux valeurs de la République. Aux nôtres. Et Khalifa Ababacar Sall a déjà tissé son destin. Il est digne de notre estime. Ni les geôles ni les lambris dorés n’y feront rien. Qu’ils en en rougissent, ces individus du « sommet » qui méprisent notre souffrance devenue routinière.
Ce sentiment viscéral faisant de la prison un raccourci vers le palais découle peut-être de notre rapport à la méditation, à la solitude. On y grandit en sagesse. On a une distance avec les insignifiances ; ce qui est essentiel pour une âme dont la centralité des préoccupations est le devenir collectif et d’apporter un soulagement à la détresse générale. C’est cela la noblesse d’âme ; la prison n’en prive point. Le palais n’en confère pas forcément non plus.
Il faut le regretter, Macky Sall n’a pas grandi en noblesse parce qu’il commet l’injustice. Il entretient la haine dans sa solitude de prestidigitateur. Le retranchement voulu ou imposé n’est pas profitable à tout le monde. Il n’est jamais trop tard pour se livrer à l’introspection. Que la raison l’y invite. Qu’il ne se laisse pas étreindre par la peur d’affronter son challenger le plus sérieux. A vaincre sans péril, on triomphe sans gloire. Bien des Sénégalais méritent d’entendre ce que Khalifa Ababacar Sall a à leur soumettre comme projet.
La « royauté », avec ses ors, ses fastes et sa solitude épiée, a ceci de paradoxal : elle incarne le pouvoir, la puissance mais souffre de paranoïa. Une peur panique et irraisonnée s’empare d’elle. On en arrive à s’interroger sur son rapport avec le pouvoir, si elle en est digne d’ailleurs. On ne peut pas être responsable du devenir de la Nation et se laisser submerger par ses ambitions égoïstes et le sort des individualités qui ne sont pas convaincues par les actions, jusqu’ici entreprises. Celui réservé au maire de Dakar est moins dramatique pour lui-même que pour notre pays que Macky Sall prétend mener vers des prairies plus vertes. Car, cela nous renseigne sur la déliquescence de nos institutions et de l’humanité de ceux-là chargés de donner sens à notre aventure commune.
En voulant condamner un sérieux candidat et le priver d’un rendez-vous important avec les Sénégalais, les tenants de ce pouvoir titubant en font un plus redoutable adversaire. Khalifa Ababacar Sall est devenu une hantise insurmontable. Qu’il soit à Rebeuss ou à Kédougou. Qu’ils l’exilent même. Ils voulaient l’atteindre et l’humilier. Ils l’ont rendu plus fort. Il a davantage éveillé la sympathie de l’opinion publique malgré la campagne de diabolisation et les mensonges facilement flairés même par les esprits les moins avertis et justes.Depuis son incarcération, Khalifa Ababacar Sall a vu son capital sympathie s’accroître au grand dam de la cour et de ses courtisans zélés.
Comment en est-on arrivés à commettre de telles bassesses que ni la compétition politique ni nos valeurs ne sauraient admettre ? Il faut arrêter Macky Sall pendant qu’il est encore temps. La peur de perdre le pouvoir, parce que conscient de son impopularité et de la déception généralisée des Sénégalais, ne doit pas pousser aux pires excès. Il ne s’agit que de peur panique en effet. Face à Khalifa Sall, l’affolement peut être fondé mais l’abus, dans une démocratie réputée en Afrique et ailleurs, est condamnable. Et pourquoi, pour parler de manière triviale comme les godillots de sa majesté, cette frousse ? Revisitons notre récente histoire politique.
Élu maire de Dakar, en 2009, face à la mouvance présidentielle avec ses pouvoirs exorbitants, réélu en 2014, cette fois-ci en concurrence avec la liste de Macky Sall, Khalifa Ababacar Sall est l’un des rares hommes politiques à avoir, à deux reprises, battu à des élections des candidats investis par le pouvoir. Ni soutien du pouvoir, ni opposant déclaré, Khalifa Ababacar Sall a fait montre d’une prouesse politique jamais égalée de 2009 à nos jours. Et son altesse n’aime pas qu’on lui fasse de l’ombre ! Les rapports qu’ont entretenus l’État central et la ville de Dakar, dont la gestion a été unanimement saluée, ici et ailleurs, en attestent largement. Celui qui en est l’édile s’est déjà engagé dans l’allée du succès qu’il envisage dans la construction de notre destin national. La prison ne le détournera point de cet objectif. Le rendez-vous avec 2019 est déjà pris. Que sa majesté s’y prépare.
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