LES THIANTACOUNES À LA BARRE SANS LEUR GUIDE
Le double meurtre de Médinatoul Salam sera au menu ce matin des audiences de la Chambre criminelle du Tribunal de grande instance (Tgi) de Mbour - 16 accusés feront face au juge, mais ce sera sans Béthio Thioune présentement en France pour des soins
Le double meurtre de Médinatoul Salam sera au menu ce matin des audiences de la Chambre criminelle du Tribunal de grande instance (Tgi) de Mbour. 16 accusés feront face au juge, mais ce sera sans Béthio Thioune présentement en France pour des soins.
L’heure de vérité sans le présumé acteur principal. Le Tribunal de grande instance de Mbour ouvre la première session de sa Chambre criminelle par la très médiatique affaire du double meurtre de Médinatoul Salam. Cheikh Faye, Khadim Seck, Mouhameth Sène, Samba Fall, Demba Kébé, Moussa Dièye, Aly Diouf, Mamadou Hann dit Pape, Mamadou Guèye et d’autres talibés feront face ce matin au juge pour les meurtres présumés de Bara Sow et Ababacar Diagne en 2012. En France pour raisons médicales, le guide des thiantacounes sera absent à la barre. Une absence qui enlève au procès toute sa consistance à cause de son implication présumée dans cette tragédie.
Ce mardi, ils seront 16 accusés à défiler devant le juge pour les délits présumés de meurtre avec usage d’actes de barbarie, de complicité desdits homicides aggravés et d’association de malfaiteurs, recel de cadavres, inhumation sans autorisation administrative, non-dénonciation de crimes, détention d’armes sans autorisation et de recel de malfaiteurs. Une longue liste de fautes retenues contre ces thiantacounes dont certains ont passé 7 ans en détention préventive.
C’est une histoire qui avait plongé le Sénégal dans une profonde consternation et érodé une partie de l’aura du Cheikh de Mermoz qui a réussi à retrouver son rang malgré le poids des accusations et alléger son contrôle judiciaire qui lui interdisait d’organiser des thiants.
Les faits remontent au 22 avril 2012. Bara Sow et Pape Ababacar Diagne se sont rendus à Médinatoul Salam pour mettre un terme au différend qui les oppose à l’entourage de leur marabout. Mais ils étaient loin d’imaginer que ce jour-là, ils avaient rendez-vous avec la mort. Arrivés sur les lieux, ils ont été sauvagement battus à mort par des talibés du guide des thiantacounes. La justice va entrer en action et par le biais de la gendarmerie, le guide Cheikh Béthio Thioune ainsi qu’une vingtaine de ses talibés seront arrêtés et envoyés en prison pour meurtre, complicité de meurtre, acte de barbarie, inhumation de cadavre sans autorisation, recel de cadavre, association de mal faiteurs.
Après sept ans de détention préventive, excepté Cheikh Béthio Thioune qui a bénéficié d’une liberté provisoire, les 16 autres présumés meurtriers seront épiés par les familles des victimes qui pourront enfin faire leur deuil.
Malgré cette perspective, elles sont toujours figées dans la tristesse. Lors de la commémoration hier de l’anniversaire de la mort de Ababacar Diagne au quartier Thiocé-Est de Mbour, sa famille a organisé un récital de Coran pour le repos éternel de leur enfant. Cette famille qui se dit toujours thiantacoune, mais ne reconnaît plus Cheikh Béthio comme guide a du mal à tourner la page de cette sombre histoire qui sera élucidée dans quelques heures. La maman de Ababacar Diagne, Ndèye Khady all, est toujours étreinte par la douleur : «Je vis avec cette douleur intense depuis 7 ans. Mon fils a été sauvagement tué et enterré dans une fosse commune. C’est pourquoi depuis sa mort, je vis avec sa femme et ses 4 enfants. Nous réclamons toujours justice. Et même si ce procès ne peut pas ramener mon fils en vie, qu’ils soient punis.»