IDRISSA DIALLO, UNE VIE DE COMBATS !
Il aura résisté à tout sauf à cette courte maladie qui finalement a pris le dessus lui.

Le maire de Dalifort-Foirail, Idrissa Diallo est décédé hier des suites d’une maladie. Membre de Taxawu Dakar et coordonnateur du Mouvement «Khalifa Président», l’enfant de Marsassoum a connu une vie jalonnée de combats.
Il aura résisté à tout sauf à cette courte maladie qui finalement a pris le dessus lui. Le maire de Dalifort-Foirail, Idrissa Diallo a rendu l’âme hier, selon les informations, à l’hôpital Idrissa Pouye de Grand-Yoff. Son enterrement est prévu aujourd’hui au cimetière musulman de Yoff.
Pour éviter les rassemblements à cause de Covid-19, la levée du corps est réservée seulement à la famille restreinte, indique sa famille. La nouvelle de sa disparition a mis la classe politique particulièrement les Khalifistes dans l’émoi et la consternation. «Nous perdons en toi un grand frère, un camarade engagé, loyal et constant qui a été à tous les combats pour le rayonnement de la démocratie sénégalaise. Tu es et resteras un modèle de droiture, de générosité, de discrétion. Un homme rigoureux et travailleur toujours au service de sa communauté», a posté le maire de Mermoz-Sacré-Cœur sur sa page Facebook. Avec Barthélémy Dias, Idrissa Diallo s’était fait remarquer dans la lutte pour la libération de Khalifa Sall. Monsieur Diallo n’a de cesse arrêter de défendre l’ancien maire de Dakar Khalifa Sall durant son emprisonnement dans l’affaire de la caisse d’avance de la ville de Dakar. Contre l’injustice et fidèle à Khalifa Sall, il n’a jamais varié dans son discours et a partagé avec ce dernier les moments les plus compliqués de sa vie.
SES DEBUTS EN POLITIQUE
Entre Idrissa et la politique, c’est depuis tout jeune. Son oncle Ibou Diallo fait partie des initiateurs du MFDC (Ndlr : mouvement des forces démocratiques de la Casamance) avec Emile Badiane. Dans une interview réalisée en 2012, il confiait avoir l’habitude d’accompagner son père à chaque fois qu’il partait animer une section du parti, avant de militer plus tard, pour le Parti démocratique sénégalais. Et cela, jusqu’en 2000, année de son départ vers les Etats Unis.
Toutefois, un drame va l’obliger à changer de couleur politique. Ayant perdu des proches dans le bateau le Joola et furieux de voir le régime de l’époque politiser l’affaire, il s’engage du côté du parti socialiste. «Al’ époque l’Etat était en train de politiser la tragédie. Quand nous sommes allés voir Tanor Dieng, il avait tenu un discours qui se démarquait de ceux des autres leaders politiques. Au moment où ces derniers nous exhortaient de nous battre contre l’Etat, il nous appelait à une concertation nationale autour du problème, en nous certifiant que c’était une affaire nationale et non de régions comme l’estimaient d’aucuns », expliquait-il. Séduit par le comportement du leader du parti socialiste, il crée plus tard un mouvement de soutien à Tanor. Il adhère par la suite au parti socialiste pour incarner son leadership dans sa localité.
En 2009, il devient, maire de la commune d’arrondissement de Dalifort Forail, puis député lors des législatives de 2012. «Je n’affiche aucune ambition politique», laissait-il entendre en 2012 se suffisant à l’époque de la gestion de sa mairie et de son travail parlementaire. «Je n’ai jamais rien réclamé, à chaque fois on me met au-devant. Je n’ai pas une obsession pour un poste quelconque, mais quand on me nomme où on m’élit, j’accepte», disait-il.
Député jusqu’à la fin de la 12ème législature, le maire de Dalifort, se désolait de l’implication continue de l’exécutif dans le fonctionnement de l’Assemblée nationale. Pour lui, les députés ne sont pas suffisamment formés pour faire face à certains défis liés au fonctionnement de l’Assemblée, ainsi qu’au contrôle qui leur est dévolu. Il réclamait ainsi l’organisation de séminaires afin de faire comprendre à tous les députés sans exception les procédures d’élaboration et de lecture du budget et de contrôle des lois, «comment formuler des questions, comment monter des commissions d’enquête etc.»
UNE VIE HANTEE PAR LA MER
Originaire de Marsassoum, dans le département de Sédhiou, Idrissa Diallo a vu sa vie sombrer un 23 septembre 2002.Des Etats Unis, où il se trouvait, il est informé du naufrage du bateau le « Joola », dans lequel se trouvaient ses trois garçons. L’aîné (15 ans) venait de décrocher son BFEM (brevet de fin d’études moyennes). Cet homme de défi a failli tout lâcher pour se détourner de la vie après le drame du Joola». Mais en fréquentant les familles des victimes du bateau, il décide de se battre à leurs côtés, devant un Etat qui leur manquait de considération. «J’ai commencé ainsi à retrouver goût à la vie», laissait-il entendre. Ce qui lui a valu d’être distingué comme président du collectif de coordination des familles victimes du «Joola». Entre temps, de façon inattendue, il a été recruté dans un projet du PNUD sur la prévention des risques et la gestion des catastrophes en 2007. «Je me suis retrouvé dans d’autres types de catastrophes et je me suis rendu compte que cela ne se limitait pas tout simplement au ‘’Joola ‘’», révélait-il. Très fort psychologiquement, il déclarait : «Quand je pense à mes rêves professionnels, à ce que je voulais être et ce que je suis devenu. Quand je vois la tournure de ma carrière à un certain moment, juste parce qu’un accident a eu lieu. Reprendre à zéro tout ce que j’avais planifié et revenir sur autre chose, sur des choses que je n’avais pas programmées je me dis que chaque homme a un destin tout tracé et on ne peut pas y échapper.»
CURSUS ET FORMATION
Né le 5 décembre 1959, il a passé toute son enfance à Ziguinchor. Ses parents sont tous les deux originaires du Sud du Sénégal. Sa maman est issue de Koukané (Kolda), alors que son papa vient de Sédhiou. Ce dernier travaillait au port de Ziguinchor, dans l’entreprise qui affrétait le bateau. « Malgré cela, j’ai toujours craint le bateau, je ne sais pas nager, j’ai horreur de tout ce qui est mer et ça s’est empiré avec le naufrage du ‘’Joola’’», disait-il. Ziguinchor représente la ville qui l’a bercé, où il a fait ses études jusqu’en 1977, année où il a obtenu son BFEM. Il quitte son royaume d’enfance, pour mettre le cap sur Dakar, au lycée Maurice De lafosse. Il décroche un bac technique moteur et se trouve dans l’obligation de faire un choix. «Mon rêve, c’était d’être électromécanicien. J’étais orienté sur dossier à l’école nationale de formation maritime pour devenir mécanicien bateau. Ça me plaisait. Mais, mes parents n’aimaient pas la vie de marin. Je me suis finalement retrouvé à l’école supérieure polytechnique ex ENSEPT. Je faisais partie de la deuxième promotion du département informatique », expliquait-il dans une interview réalisée en 2012. Sorti avec un DUT, il a pu intégrer des cabinets, avant d’être coopté au Port autonome de Dakar, suite à un concours organisé par les ports du Havre et de Dakar. Idrissa n‘est pas un simple travailleur qui se plie devant toutes les décisions de son employeur. Au contraire c’est un fervent syndicaliste. Il a été l’initiateur du plus grand mouvement syndical du Port de Dakar avec l’UNSAS (Union nationale des syndicats autonomes du Sénégal).
Suite à un départ négocié, en tant qu’informaticien de formation, il va monnayer son expérience et son talent aux USA avec le bug de l’an 2000.Un retour anticipé pour celui qui envisageait de faire partir sa famille. «Je voulais même y amener mes enfants. Je pensais que le monde de demain se fera dans la rapidité et la rigueur et j’étais fasciné par le modèle américains», confiait-il. Décrit comme quelqu’un de direct par ses proches, le maire de Dalifort avait malgré le drame qu’il avait traversé refait sa vie autour de son unique femme avec qui il éduquait ses deux filles. Ces dernières sont aujourd’hui orphelines de leur ange gardien. Celui-ci va ainsi rejoindre dans une autre vie ses garçons disparus il y a 18 ans dans le naufrage du bateau le Joola.
REACTIONS…
ABDOUL MBAYE, PRESIDENT ACT : «Khalifa perd un ami fidèle»
«Idrissa Diallo vient de nous quitter. Je l’ai revu il y a peu en compagnie de son ami Khalifa en mon domicile. C’était le 10 de ce mois. Il a tenu à rappeler nos anciennes relations professionnelles. Il n’avait pas changé: modeste, soucieux d’éthique en politique. Dalifort perd un grand maire. Khalifa un ami fidèle. Nos sincères et profondes condoléances vont à sa famille, ses amis, ses administrés, à la nation tout entière.»
MAMADOU KASSE, DG SICAP : «En toute honnêteté, reconnaissait les efforts du Président de la République Macky SALL»
«C’est la mort qui fait de la vie un destin. Je ne peux m’empêcher de rendre hommage à cet homme qui est fidèle à la vérité. A chaque fois que je suis interpellé sur les réalisations du Chef de l’État dans le domaine de la lutte contre les inondations, je cite systématiquement le maire Idrissa DIALLOqui, en toute honnêteté, reconnaissait les efforts du Président de la République Macky SALL en ce sens dans sa commune. Et la dernière fois que l’ai nommément cité, c’est aujourd’hui sur la TFM dans l’émission Infos du Matin. Il fut un excellent député lors de la législature passée. Je présente mes sincères condoléances à sa famille éplorée, aux populations de Dalifort. Qu’Allah, dans son immense miséricorde, lui accorde son pardon et l’accueille dans son paradis Firdawsi. »
ABDOULAYE BALDE, MAIRE DE ZIGUINCHOR : «Je partage la peine avec l’association des victimes du naufrage du bateau le JOOLA»
« C’est avec beaucoup de tristesse que je viens d’apprendre le rappel à Dieu de notre cher frère, mon collègue Maire de la Commune de Dalifort, M. Idrissa DIALLO. En ces douloureuses circonstances, je présente mes condoléances les plus attristées à sa famille, ses proches, ses collaborateurs et administrés de la commune de Dalifort ainsi qu’à ses parents et amis de Ziguinchor dont il est natif. Je partage également la peine et la douleur qui, j’imagine bien, habite l’association des victimes du naufrage du bateau le JOOLA avec laquelle il a mené d’énormes combats pour la satisfaction des préoccupations des familles de victimes. Idrissa a aussi été un acteur politique très engagé et déterminé aux côtés de notre ami Khalifa SALL, ex Maire de Dakar à qui je présente également mes sincères condoléances ainsi qu’à toute la classe politique du Sénégal. Qu’Allah SWT l’accueil dans son paradis céleste. Repose en paix cher collègue.».
CHEIKH BAMBA DIEYE LEADER FSD/BJ : «Il a été de ces perles rares»
«Dans ma vie politique, il m’a été rarement donné l’occasion de rencontrer des hommes d’exception. Pour le peu de temps que j’ai eu à partager avec M. l’Honorable Député et Maire de Dalifort, il a été de ces perles rares. J’ai pu admirer le patriotisme, le désintéressement et la noblesse de caractère de M. IDRISSA DIALLO. Humble et rigoureux, il a été un magnifique compagnon de lutte et un des plus fidèles compagnons de Khalifa Sall. Sa disparition soudaine est une immense perte pour le Sénégal des valeurs qui a perdu un de ses plus éminents porte-étendards. A sa famille, ses amis et compagnons j’adresse mes plus sincères condoléances. Qu’Allah le Miséricordieux l’accueille dans son immense paradis auprès des vertueux et hommes de foi émérite. Repose en paix mon cher frère et ami, tu auras rempli ta part de sacrifice dans ce pays qui t’était si cher.»