EGORGES COMME DES MOUTONS !
Qu’est-ce qui explique cette subite bestialité des Sénégalais ? Au Sénégal, les meurtres deviennent monnaie courante
Au Sénégal, les meurtres deviennent monnaie courante. Les deux homicides confirmés en l’intervalle d’une semaine, à Thiaroye et aux abattoirs de la Sogas, de même que le cas de l’enfant qui a failli être égorgé à Touba, sont des preuves de cette propension de nos compatriotes à tuer. Pourquoi un tel déchainement de violence? Récit de trois scènes absolument atroces
Ce sont trois histoires bouleversantes qui vont marquer à jamais des familles entières. Des meurtres avec le couteau... à la gorge. Des tueries enregistrées en l’intervalle d’une semaine à Thiaroye, à la Sogas (ex : Seras) et à Touba.
Dans la capitale du Mouridisme, un enfant de six ans du nom de Ibrahima a échappé de justesse à la mort. C’est un marchand ambulant de 27 ans habitant Touba qui a failli commettre l’irréparable. Selon les témoins, son bourreau fréquentait la famille de l’enfant. Devant les policiers, il dit ne pas comprendre son acte. Ce sont les cris de l’enfant sur le point d’être égorgé qui ont alerté des passants, lesquels sont arrivés juste à temps pour éviter le drame.
Un drame que vit, hélas, la famille Diop de Thiaroye à travers l’histoire de Baye Cheikh Samb et Baye Cheikh Diop. Tous les deux âgés de 19 ans. Le dernier nommé a été égorgé par Baye Cheikh Samb, un pêcheur originaire de Fass Boye, qui a plus tard été lynché par une foule enfurie. Deux jeunes adolescents à la vie ordinaire. Tous les deux sont des pêcheurs. L’un habite Fass Boye, l’autre Thiaroye. Le destin a croisé le chemin de ces deux jeunes gens. «Ils sont décédés le même jour», a témoigné le grand père de Baye Cheikh Diop, Ndiaga Dieng, parlant ainsi de ces deux jeunes au destin commun. Une mort barbare que la famille de Baye Cheikh Diop n’arrive toujours pas à comprendre. Idem pour la famille de Baye Cheikh Samb qui n’a pas pu échapper à la furie des habitants de Thiaroye.
Le jeudi passé, sa maman biologique a assisté à des faits d’une extrême violence. Encore sous le choc, la mère de Baye Cheikh Diop narre difficilement la scène. «J’étais dans ma chambre. Après j’ai eu envie de sortir un peu. Nous habitons à moins de 20 mètres de la plage. J’ai vu une altercation entre deux jeunes. L’un était en train de poignarder l’autre. J’ai crié fort pour alerter les voisins. Mais avant l’arrivée des habitants, il avait déjà égorgé son antagoniste. Je ne pensais même pas à mon fils. Je croyais que c’étaient des inconnus. C’est dur de perdre dans ces circonstances un fils adoré qui, de plus, était le soutien de notre famille», a confié la mère éplorée. Sonmari, qui était à l’intérieur de leur chambre au moment des faits, a accouru pour secourir le jeune homme blessé par son camarade. C’est une fois sur place qu’il a reconnu son fils en train de se vider de son sang. Un jeune plein d’avenir. Abasourdi, il a eu l’impression que le temps s’est arrêté. «Sa maman semblait avoir pressenti le drame. On est sortis sans savoir ce qui s’est passé. Quand je suis venu, j’ai vu que c’était mon fils. Il avait 19ans.Ilm’assistaitbeaucoup. Celui qui l’a tué, je ne le connais pas. J’ignore ce qui s’est passé entre eux. C’est quand j’ai voulu porter assistance à un blessé que j’ai reconnu mon fils Baye Cheikh gisant dans une mare de sang. Il ne m’a jamais parlé de problème avec quiconque. Son meurtrier l’a égorgé avec un couteau. Baye Cheikh était mon fils ainé. Il a voulu me dire quelque chose mais avec l’hémorragie, il n’a pu sortir un seul mot», a témoigné Rawane Diop, le père du jeune Baye Cheikh, encore inconsolable.
Le chef de quartier, Pape Sall, explique : «C’était vers les coups de 17 heures. On était à la mosquée. On a entendu des cris venant de la plage et parlant d’un meurtre. Plus exactement d’une personne égorgée. On s’est rendu sur les lieux. En tant que responsable, délégué du quartier, j’ai appelé le commandant de la brigade de Thiaroye pour l’informer du crime. Je demandais également du renfort vu le déchainement populaire. Sur place, on a vu un corps sans vie baignant dans une mare de sang. Le meurtrier était enfermé dans une chambre et ligoté. Il a essayé d’enlever la corde. Il avait un couteau entre les mains. Il était assis avec des tâches de sang sur la poitrine. Peut-être que le sang a giclé sur lui quand il tuait son camarade. Les assaillants, à travers la fenêtre, lui jetaient des pilons, des pierres, des bâtons... Ils voulaient se faire justice eux-mêmes. Subitement, ils l’ont aspergé avec de l’essence. Ils disaient : « si le vieux était sorti, on allait mettre le feu dans la chambre ». Les sapeurs-pompiers ont pris le corps en présence des deux commandants de brigade. Ils faisaient leur enquête jusque tard dans la nuit. Avec les représentants des pêcheurs, on a demandé aux étrangers de rentrer chez eux jusqu’à nouvel ordre. Le commandant nous a envoyé des éléments qui ont passé la nuit pour sécuriser les lieux. La gendarmerie a emporté avec elle les affaires du meurtrier. Celui qui a donné la pirogue aux pêcheurs de Lompoul, on dit qu’il est un habitant de Mbour. C’est la première fois qu’un tel drame arrive à Thiaroye. De notre temps, quand on donnait un coup à un ami, on attendait qu’il se relève. On n’était pas si violent jusqu’à égorger une personne ! On demande l’installation d’une brigade pour plus de sécurité dans le quartier. Nous, les délégués de quartiers, sommes fatigués. On essaie de régler les cas à l’amiable. Parfois on obtient satisfaction», a-t-il fait savoir tout en demandant aux parents de faire plus d’efforts dans l’éducation de leurs enfants. «Il y a beaucoup de laisser faire», s’est-il indigné.
Comme à l’abattoir
Toutefois, le plus horrible et effroyable des meurtres commis ces deux dernières semaines, c’est incontestablement celui commis parle nommé Abdou Mbaye sur son collègue et ami Abdou Diaw qu’il a égorgé «comme un mouton», selon les témoins. A la Séras, l’affaire continue de défrayer la chronique. Ndiogou Guèye n’arrive toujours pas à s’en remettre. Son cœur bat encore la chamade. «C’est terrifiant. C’est atroce. Egorger un homme comme un mouton. C’est déjà très dur à entendre, ça l’est plus encore quand on voit un corps à terre baignant dans le sang. Surtout à cause d’une affaire de téléphone. « On tue comme ça son ami. Ils étaient tous les deux mes amis également», a-t-il narré, ne pouvant retenir ses larmes.
Tout comme Ndiogou, la tristesse a encore envahi Baïla, un autre ami et collègue des deux Abdou. «C’est triste. Ils étaient tous mes amis. Abdou Diaw a laissé trois épouses. Ils étaient tout le temps ensemble. Il parait que c’est une affaire de téléphone vendu qui a mal tourné. J’ai vu le corps de Abdou Diaw. C’est atroce». Après avoir pleuré son ami mort et fustigé l’acte barbare commis par l’autre ami.