NEUF CORPS REPECHÉS ET DES DISPARUS EN MER
Parmi les victimes, une jeune collégienne, symbole poignant d'une jeunesse désespérée. Ce nouveau drame soulève des questions sur l'efficacité des mesures de lutte contre l'émigration clandestine
La ville de Mbour pleure ses morts et espère retrouver ses disparus. Elle a connu encore des décès le week-end, suite au chavirement d'une pirogue transportant des candidats à l'émigration irrégulière vers les Îles Canaries, en Espagne. Le drame s'est produit dans la journée du dimanche. Selon des informations recueillies par les premiers intervenants auprès des naufragés, une pirogue de retour d'une partie de pêche est tombée sur une embarcation renversée, entourée de personnes accrochées à des bidons d'essence et des corps sans vie. Si les rescapés de l'odyssée macabre ont été pris en charge par l'hôpital Thierno Mamadou Mansour Barro de Grand Mbour, les corps sans vie ont fait l’objet d'identification. Il est dénombré, dans un premier temps, un nombre de quatre décès. Une collégienne en classe de quatrième est du décompte macabre.
La série macabre continue de plus belle. Une embarcation de la Marine nationale, visible du rivage, a mené toute la journée d'hier des recherches pour retrouver des disparus ou repêcher des corps sans vie. Des rescapés encore sous le choc et l'émotion ont du mal à ra conter leur mésaventure. Une seule question est posée : «qui seront les prochaines victimes des sirènes dévoreuses de l'océan ?» La mer engloutit encore et fait son plein. Le mal des passions dans l'agglomération mbouroise et le long du littoral et sur des kilomètres se résume à tenter l'exploit d'aller aux Canaries, au prix de sa vie. Des investigations menées ont permis de retenir que les candidats à l'émigration irrégulière sont recrutés dans toutes les couches de la société et de tous les âges. Les mobiles du voyage se résument à des questions économiques pour certains.
A l'opposé, à Mbour, des individus à l'abri du besoin se comptent dans le lot des candidats à l'émigration irrégulière. A titre d’exemple, un chef d'atelier avait déposé une somme de plusieurs centaines de milliers de francs CFA auprès d'un boutiquier, pour la dépense quotidienne pour des mois et des mois. Sur le plan social toujours, des écoliers ont quitté les classes pour tenter la périlleuse traversée de l’Atlantique. La seule explication recueillie est l'appât du gain.
Une "mafia" bénie au centre d'une escroquerie à grande échelle
Tout un monde de rabatteurs, de convoyeurs est au centre d'une "mafia" bénie passant entre les mailles du filet. Faire fortune les pousse à être des marchands de la mort, en enrôlant des jeunes candidats à la l’aventure périlleux de l’émigration irrégulière par voie maritime vers l’Espagne. Un octogénaire confie : «On ne saura jamais le chiffre exact des émigrés clandestins». Selon lui, «tant que le Code de la pêche ne sera pas respectée, dans l'achat du carburant sous Douane, l'Etat perd a grande échelle ses citoyens ses ressources. Le Carburant est subventionné». Au lot des personnes décédées lors de la traversée s'ajoutent des disparus, des interceptés dans des pays étrangers et séjournant dans des geôles. Pis encore, il y a des étrangers grisonnant dans les quartiers périphériques en attendant l'opportunité de tenter la traversée macabre.
L' association pour la sécurité et la préservation du littoral sonne l'alerte et propose des solutions
Selon Mbaye Boye et Gana Gning, les président et viceprésident du Kourel de l'Association en charge de la sécurité et la préservation du littoral, suppléant à cette chargé l'autorité et les Forces de défense et de sécurité, ont sonné l'alerte face l’ampleur des départs de candidats à l’émigration irrégulière. Ces derniers ont souhaité une assistance des autorités car, ils ne disposent pas de moyens matériels et techniques pour mener à bien leurs activités comme ce fut le cas lors de leur intervention pour sauver des naufragés avant-hier. Selon eux, la mer ne nourrit plus son homme. Les premiers émigrés clandestins ont réussi à donner une place au soleil à leurs familles, en leur assurant des conditions de vie décentes. En plus, dans la tradition des sociétés de pêcheurs, capturer du poisson ou recueillir des fruits de mer n'étaient pas leurs seules activités. Ils cultivaient la terre, faisaient de l'élevage pour la survie lors des périodes de repos biologique décrété par les communautés. Pour eux, une seule alternative sied ; c’est de favoriser la création d'emplois, l'implantation d'usines et des financements pour occuper les jeunes, après des sessions de formation aux techniques de gestion et de management.