MAMADOU OUMAR NDIAYE, LA RÉCOMPENSE D’UN BAROUDEUR
La modestie et la témérité incarnées dans un seul homme. MON, le dernier des Mohicans de la presse sénégalaise, accède à la présidence du CNRA. Son parcours, jalonné de défis et de convictions, témoigne d'une vie dédiée au journalisme intégré
La nouvelle a surpris au sein de la rédaction du Témoin. Osons le dire, le concerné a été lui aussi surpris de la décision du président Bassirou Diomaye Faye de le nommer à la tête du Conseil national de régulation de l’audiovisuelle (CNRA) en remplacement de Babacar Diagne. Il a prestement sauté de son bureau pour rejoindre la rédaction centrale pour s’enquérir de la nouvelle. Et pourtant certains d’entre nous, notamment votre serviteur qui lui sert de rédacteur en chef depuis le 01 er novembre 2015ne sont pas surpris d’une telle nouvelle. Il faut le dire après le départ de Babacar Diagne, j’ai pensé que le poste méritait de revenir à un doyen, mais surtout à un des derniers Mohicans de la Presse sénégalais qui formait la bande des 4 moustiquaires (Babacar Touré de Sud, Sidy Lamine Niasse de Wal Fadjri, Laye Bamba Diallo du « Cafard libéré » d’alors et Mamadou Oumar Ndiaye). Au sein de la presse, l’homme qui fonda en 1990 l’hebdomadaire Le Témoin devenu depuis 2015 un quotidien est familièrement appelé MON. Il jouit d’un profond respect de ses pairs. Du Soleil en terminant par le Témoin, Mon a été un baroudeur passionné d’un métier à travers d’autres rédactions notamment Takussan et « SOPI ». Le Témoin hebdomadaire a réussi à marquer le paysage médiatique sénégalais.
Sa parution du mardi était fortement attendue parce qu’elle recelait des révélations exclusives. Et pourtant l’homme déroute par sa modestie légendaire qu’il porte fièrement dans la quotidienneté de la pratique d’un métier qu’il savoure comme à chaque fois qu’on lui sert sa tasse de thé. Devant l’ordinateur, l’homme fascine par sa témérité, mais surtout par le courage de ses positions. Il ne se gêne guère de dire tout le bien d’un acte posé par le président de la République, un ministre ou une haute autorité publique. Après cela, ceux qui le connaissent ne seront pas surpris quelques semaines après de voir le même MON vouer aux gémonies ces mêmes autorités. Au décompte final, ce chevalier Bayard de la presse nationale qui reste le seul directeur de publication à son âge à continuer à pratiquer le journalisme de ses convictions est d’une témérité légendaire jusqu’à pouvoir battre le records Guiness des procès pour diffamation. Il a été condamné dans certaines affaires et relaxé dans d’autres mais était tellement habitué aux prétoires qu’il pourrait écrire un bouquin sur le délit de diffamation ! Récemment, je suis tombé sur une interview de l’homme qui rappelle que cette témérité lui a valu des représailles matérielles et physiques.
En exécution d’un procès qu’il avait gagné contre Mon, le fils de Bara Diouf, l’ancien DG du Soleil, avait fait exécuter la décision par le biais de son avocat qui n’était autre que… Me Augustin Senghor, l’actuel président de la Fédération sénégalaise de football ! Lequel avait envoyé un huissier saisir tous les biens meubles de MON qui avait dormi la première nuit sur une natte avant de se voir offrir par des âmes charitables des matelas et autres commodités matérielles pour équiper son appartement. En outre un beau matin de 1997, une forte explosion avait retenti chez lui. Les fenêtres de sa maison avaient été emportées par le souffle d’une forte explosion.
Cette histoire de l’attentat à la bombe chez Mon n’a jamais été élucidée. On oubliera son refus de recevoir une médaille de l’Ordre national du Mérite des mains d’un ancien président de la République. L’homme est resté chevillé à ses principes de dignité et d’orgueil Haal Pulaar, mais aussi à sa témérité d’enfant de la banlieue, plus précisément du quartier de Diamaguène-Diacksao dont il continue à se réclamer et où il se rend à chaque fois qu’un ancien voisin est touché par une épreuve. D’une générosité sans faille, notre dirpub a aussi le sens du partage mixé à un humanisme fécond. En réalité, MON reste un feuilleton vivant de l’histoire de la presse sénégalaise de ces 40 dernières années. Il a réussi à préserver son talent, mais surtout à faire aimer le métier à de jeunes professionnels qui sont passés entre ses mains dans sa prestigieuse rédaction du Témoin. Au Témoin, à ses côtés, nous n’avons cessé d’apprendre parce que MON est une école au quotidien pour tout journaliste qui veut progresser et bien faire son travail. Malgré notre proximité, MON n’a jamais hésité à censurer un article quand il doute de sa pertinence ou des faits qu’il contient. Il le fait sans état d’âme, mais il fait dans un strict respect en te donnant les raisons pour lesquelles le papier n’est pas publiable.
Au finish, nous lui concédons cela parce qu’il sait ce que nous ne savons pas. Le président Bassirou Diomaye Faye a vu juste. Sa décision ne sonne pas chez nous comme une récompense à notre directeur de publication. MON ne connait ni Bassirou Diomaye Faye, ni Ousmane Sonko, mais il n’a pas hésité à afficher ouvertement son soutien aux actes de redressement du duo à la tête de pays. Ce faisant, il se moque éperdument de ce que les autres peuvent penser de ce soutient. Parce quand il écrit, il le fait avec conviction. Voilà ce que l’on peut dire de MON. Mais une chose est sûre. Sa nomination à la tête du CNRA participera à donner à cet organe de régulation de l’audiovisuel de nouveaux gages de crédibilité. Parce que, encore une fois, c’est un océan de crédibilité dans le milieu de la presse nationale. Nous sommes convaincus que MON réussira sa mission. Bon vent grand MON et que Dieu t’accompagne dans cette nouvelle mission !