UNE NOUVELLE CONFLICTUALITÉ VICIEUSE ET PERNICIEUSE
"Les attaques du réseau informatique de la Banque de l’Habitat du Sénégal et plus loin de chez nous de la Réserve fédérale américaine à quelques jours de la fin de l’année, remettent encore au jour la cyberguerre et la guerre informationnelle".
Les attaques du réseau informatique de la Banque de l’Habitat du Sénégal et plus loin de chez nous de la Réserve fédérale américaine à quelques jours de la fin de l’année, remettent encore au jour la cyberguerre et la guerre informationnelle qui sont les marqueurs et curseurs de la nouvelle conflictualité dans le monde.
Ce nouveau paradigme est tellement plus dangereux, vicieux et pernicieux qu’il n’y a ni symétrie et asymétrie. Tous les États du monde sont logés à la même enseigne. Avoir des hackers qui lancent des cyberattacks ou des officines qui fabriquent des fake news ne nécessite pas beaucoup de moyens, juste des jeunes talentueux, audacieux et véreux. Au-delà des cyberattacks qui sont quotidiens dans les structures financières, il y a lieu de craindre que cela soit étendu aux structures informatiques des infrastructures vitales. Les attaques de terrorisme international, notamment depuis 2001, à New York, sont venues rappeler l’existence de risques auxquels sont soumises différentes infrastructures et le besoin de les protéger et de les défendre selon les normes actuelles.
Sur le plan international, la résolution 2341 adoptée par le Conseil de sécurité des Nations unies en février 2017 exhorte les États membres à définir et à organiser la protection des infrastructures vitales dans le cadre d’une coopération générale. Jusqu’ici, la dimension informatique n’est pas totalement prise en compte dans ce que les études stratégiques appellent la protection des infrastructures vitales ou critiques.
Ces infrastructures sont définies comme étant l’ensemble des établissements et des équipements qui jouent un rôle crucial dans le fonctionnement de la société et dont la paralysie ou la destruction fragiliserait la sécurité nationale et compromettrait les intérêts économiques et sociaux d’un État. Ainsi, dans cette classification, se trouvent les structures en charge des services comme l’eau, l’électricité, les télécommunications, les transports, ports, aéroports, structures de santé, etc. D’où le relèvement des niveaux de sécurité et de sûreté sur le plan physique dans la protection des infrastructures vitales depuis quelques années. Ce paradigme de la nouvelle conflictualité a tellement évolué qu’il est devenu l’apanage de certains pays qui s’en servent davantage en créant des groupes de hackers servant ainsi de proxy war, c’est-à-dire des hackers prêts à lancer des cyberattaks par procuration. Dans ce domaine, la Russie est pointée du doigt comme étant le pays qui use le plus de cette tactique dans sa stratégie de containement des ambitions des autres puissances en Afrique ou dans d’autres parties du globe.
Ainsi, sur ce terrain, l’Afrique gagnerait à avoir une stratégie d’ensemble afin de se prémunir de ce nouveau fléau des nouvelles technologies. Plus de formation en cybersécurité et développer une souveraineté numérique pourraient être des prémices pour avoir les astuces nécessaires de ne pas être dépassés. Avec l’aide de la coopération dans le domaine sécuritaire, plusieurs initiatives ont pu voir le jour comme la création, depuis 2020, au Sénégal, d’une nouvelle école consacrée à la formation des cadres africains aux enjeux de cybersécurité.
Cette école, unique en son genre en Afrique, fruit de la coopération avec la France, a vocation à devenir un pôle de référence en la matière. Les réponses à ce nouveau paradigme ne doivent pas être seulement nationales tant les défis sont transnationaux. Il faudra ainsi, dans la nouvelle doctrine sécuritaire que le Sénégal compte adopter, y intégrer cette dimension cybersécurité ou cyberguerre comme l’ont compris beaucoup de pays occidentaux.
Il faudra aussi créer une synergie entre les acteurs privés nationaux, africains surtout, de la finance, afin de développer une cyberarchitecture de sécurité qui pourra aider à anticiper sur les risques de cyberattack. Cela pourra ainsi permettre de se prémunir de cette nouvelle conflictualité vicieuse et pernicieuse…